Textes : Ps 80 Ésaïe 63, v. 16 à 64, v. 71 Corinthiens 1, v. 3 à 9 Marc 13, v. 33 à 37Monsieur Jacques ValluisTélécharger le document au complet
1er dimanche de l’Avent
- Le passage concerné se situe à la fin d’un enseignement eschatologique dispensé par Jésus. Ce discours consacré aux fins dernières, qualifié par certains commentateurs comme l’apocalypse de Marc, est essentiellement conclu par une brève mais véhémente exhortation à la vigilance.
- À cet égard, l’enseignement porte au principal sur ce que doit être l’attitude du chrétien dans le présent.
- Le récit est plus une comparaison qu’une vraie parabole : c’est l’exemple d’un maître de maison qui part en voyage. Au temps de Jésus les gens voyageaient beaucoup plus qu’on l’imagine, simplement les déplacements étaient plus lents et partant, les absences plus longues. Au moment de son départ le maître confie à chacun une tâche précise toutefois seul le portier est cité. Il est le personnage central et rien n’est dit sur les autres serviteurs.
- En effet, le gardien est celui qui doit permettre au maître de maison de rentrer chez lui. Il est donc superflu dans cette perspective d’évoquer les autres serviteurs et les tâches qui leurs sont assignées.
- On notera que rien n’est dit sur ce que fait le maître à son retour, mais on est rendu attentif au fait qu’il s’agit du « vrai maître ».
- Il est possible que ce ne soit pas seulement aux quatre, ni aux douze disciples que ce chapitre XIII soit destiné. Cependant, on peut s’interroger s’il n’y a pas une distinction entre les apôtres(le portier) et tous (les serviteurs).
- On peut comprendre l’intention de l’auteur du récit évangélique en songeant à sa communauté : les serviteurs, ce sont tous les fidèles ; ils ont reçu leur mission particulière du Christ et ils sont exhortés à être vigilants. A ce titre la fin du texte est particulièrement explicite : « ce que je vous dis, je le dis à tous, soyez vigilants ! ».
- Le fait que le maître s’en aille à l’étranger se retrouve dans deux autres paraboles : celle des mauvais vignerons (12,1) et dans celle des talents (Mt.25, 14 ; Lc 19,12), mais le sens n’y est pas le même. Il n’y a pas de parallèle rigoureusement direct avec ce texte. Mais le thème de la vigilance détermine chez Matthieu de longs développements (XXIV v.36 à XXV v.30).
- L’Église jusqu’à la fin est en danger d’être séduite, prise au dépourvu, surprise, là où au contraire elle devrait être attentive et vigilante puisque dûment prévenue. Luc (XVIII, 8) laisse même entrevoir que lorsque le Fils de l’homme viendra, il est possible qu’il ne trouve sur la terre aucune attente, et que son retour survienne au milieu du sommeil général de l’Église et du monde.
- Il ne fait pas de doute que la vigilance doit être continue, c’est pourquoi le texte fait expressément référence aux quatre veilles de la nuit, qui correspondent au découpage des temps nocturnes.
- Le moment de la parousie, c’est-à-dire le temps de l’advenue du Christ est une question centrale. Les premiers chrétiens attendaient impatiemment ce retour, puis voyant que « depuis que les pères se sont endormis tout demeure comme dès le commencement de la création » (II Pierre 3,4) ils s’étonnèrent et même se mirent à vivre sans travailler « dans le désordre » (II Thess. 3,11-12). Il fallut les ramener à la raison : mille ans devant le Seigneur ne sont-ils pas comme un jour ? Jésus avait d’ailleurs précisé que nul ne connaissait la date « pas même le Fils, seul le Père » (Mt XXIV, 36) et que ce jour viendrait par surprise avec la soudaineté du déluge (Mt XXIV, 37-39).
- L’intention de Marc est claire : il cherche avant tout à exhorter ses auditeurs à la vigilance, et ce, d’une manière générale, en songeant à l’imminence de la venue du Royaume de Dieu ; toutefois, à vue humaine, le maître peut tarder à venir.
- L’important, c’est de n’être pas endormi au moment voulu car même si les signes annonciateurs de sa venue sont visés au début du chapitre, il peut arriver brusquement et prendre au dépourvu, soit avant… soit plus tard !
- Cette exhortation, si insistante, trois fois répétée, correspond parfaitement à l’attitude fondamentale de l’Église des premiers temps qui était eschatologique ; le ton particulier que peut prendre telle ou telle recommandation concrète en vertu de la proximité supposée de l’évènement ne change rien : Il faut être prêt, sans restriction pour le jour du Seigneur.
- Ainsi la vigilance eschatologique doit toujours être précisée, formulée concrètement, en fonction de la situation historique dans laquelle on se trouve ; ce peut être le refus des tentations du monde qui se détourne de Dieu, l’attention particulière que l’on prête à l’urgence des tâches terrestres et de tout ce que l’on appelle les engagements temporels. La vigilance constante du Chrétien est donc tout un programme !
Propositions de textes liturgiquesTexte d’accueilVoici venu le temps de re-poser nos vies dans la ParoleVoici venu le temps de donner de l’espace à notre prièreVoici venu le temps d’accueillir la Présence qui nous bénitQue la paix de Dieu, Père, Fils et Souffle saint soit avec nous tous ce matin !Qu’elle nous achemine vers la joie qui est au-dessus de toute joie !Francine Carrillo in TRACES VIVES, Paroles liturgiques pour aujourd’hui, LABOR ET FIDES 1997Prière de louangeLecture du Psaume 36 (psaume du jour)Prière avant la lecture de l’Écriture sainteS’ouvrir à ton Verbe créateur, Seigneur, recevoir le monde et ses lois comme un cadeau venu de toi, recevoir le monde par tous nos pores comme l’éternité à chaque aurore, t’entendre et te recevoir corps et âme, c’est là toute notre prière Ô Dieu notre Père, que ton Verbe créateur, comme au premier jour, réveille en nous le chant de ton amour.Lyta Basset in TRACES VIVES ibid.Prière d’intercessionRetrouvaillesNotre Dieu, il n’y a rien de plus chaleureux pour un cœur humain que de « retrouver », quand on pensait avoir définitivement perdu les autres et soi même, quand on avait tiré un trait sur l’addition de sa vie et que ce trait avait couleur de cendres. Car tous, nous sommes passés par ces moments où il faut, semble-t-il, clôturer sa perte. Tous nous avons connu les réveils du trop-tard, qui ne servent à rien. Tous nous avons perdu le contact, perdu l’estime, perdu le courage, perdu la confiance, perdu la foi.Mais, Ô Dieu, toi-même, tu n’es pas le Dieu des trouvailles, mais des retrouvailles. Tu n’es pas le Dieu du premier souffle, au début du ministère en Galilée, mais le Dieu du second souffle, au lendemain de Pâques, après la perte de tout au Vendredi Saint. Dans la première alliance, tu as bâti ton peuple sur douze frères, les douze fils de Jacob, dont onze s’étaient liés pour vendre le douzième à la captivité et qui se sont pourtant tous retrouvés, non pas dans la peur, ni le remords mais dans l’étrange joie que même le mal se soit converti en bien.Dans la seconde alliance, tu as bâti ton Église sur douze apôtres qui se sont liés pour livrer ton fils unique, leur frère aîné, à l’oubli de la mort et qui se sont pourtant tous retrouvés, non pas dans l’effroi, ni la honte mais dans l’étrange joie que Dieu ait conservé les anciens meurtriers pour en faire les nouveaux confesseurs.Tu n’es pas le Dieu de l’insurrection et des commencements, mais le Dieu de la résurrection et des recommencements, qui sont chose plus profonde, plus vraie, plus solide, plus grave et finalement plus joyeuse. Car il y a plus de joie, dans le ciel et sur la terre, pour une brebis perdue et retrouvée, que pour quatre vingt dix neuf brebis conservées, et qui se perdront peut être.Donne-nous donc les retrouvailles avec nos amis, parsemés dans la hâte et la négligence des années. Fais qu’elles aient alors la solidité du métal, passé au feu.Donne-nous donc les retrouvailles avec la foi, égarée comme une aiguille dans la botte de foin des objections, des déceptions et des désaffections. Fais qu’elle ait alors le brillant de la lune, au ciel de la nuit.Donne-nous donc les retrouvailles avec l’action, enlisée comme une barque dans la vase du pouvoir et les roseaux de l’opposition. Fais qu’elle ait alors la force de l’épée qui tranche les nœuds gordiens.Donne-nous les retrouvailles avec l’amour qui a glissé comme un anneau trop lâche au doigt inattentif de la vie. Fais qu’il ait alors l’éclat du diamant, ressurgi.Tu es le Dieu de Pâques et des retrouvailles. Mets-les, nous t’en prions, sur les chemins de nos vies humaines, pour que nos cœurs se réchauffent à l’itinéraire de ton propre cœur.AmenAndré Dumas, Cent prières possibles. Éditions CANA 1982. Réédition en poche chez Albin Michel 2007.Coll. Spiritualités.Suggestions de Psaumes et CantiquesPsaume 27 « Je chanterai », strophes 1, 2 et 4AEC 626, Alléluia 45-10 : « J’ai soif de ta présence », strophes 1, 2 et 3AEC 609, Alléluia 49-17 : « Quand le soir descend », strophes 1, 3 et 4
Veillez pour ne pas être surpris Nous avons le choix : soit être du camp des veilleurs, soit prendre le parti des dormeurs ! L’alternative est apparemment simple et tout naturellement nous voulons être du nombre des veilleurs. Or le sommeil gagne, les paupières deviennent lourdes. Allez ! Rien qu’un petit somme, à la sauvette, nul ne s’en rendra compte… C’est alors que nous nous abîmons dans une léthargie qui nous fait oublier notre détermination première. Ainsi va la vie : nos bonnes résolutions sombrent souvent dans le néant, et de sentinelles enthousiastes nous nous muons en somnambules velléitaires, sous couvert de repos nécessaire ! Soyez vigilants ! L’Évangile de ce jour nous livre une petite histoire édifiante qui doit nous conduire à méditer sur la pertinence de nos façons d’être et d’agir. Le maître de la maison doit s’absenter pour un certain temps, il part en voyage. Au moment de partir, il assigne à chacun une tâche spécifique : ainsi le portier devra faire preuve d’une particulière vigilance pour éviter les intrusions indésirables. À son retour de voyage, sans crier gare, le maître peut arriver à tout instant. Il faut donc veiller, c’est-à-dire être apte à l’accueillir et se mettre à son service, dés qu’il se présentera quel que soit le moment. Sur le fondement de cette exhortation s’est créée dans nos Églises toute une mystique du retour de Jésus, et il est à craindre que sous des apparences de piété on n’y ait trouvé la justification d’un attentisme qui n’est pas toujours de bon aloi, ou encore d’une fuite en avant devant les réalités, au lieu d’être, ici et maintenant, d’authentiques et agissants témoins de l’Évangile de salut qui est gratuitement offert à tous. Pour bien se faire comprendre, Jésus invite fermement ses disciples à se tenir sur leurs gardes ; en d’autres termes il les incite à ne pas se laisser surprendre, à ne pas se laisser intimider, à ne pas se laisser séduire. Et Dieu sait si en ce monde les tentations sont grandes car les démons qui nous rongent ont l’imagination fertile ! Une seule manière de tenir bon : la fréquentation quotidienne de l’Écriture sainte pour apprendre à exercer utilement notre discernement face aux situations familiales, professionnelles, ecclésiales, sociales, que sais-je encore ! La méditation nous invitera à la prière, c’est-à-dire à nouer un dialogue confiant et fructueux avec le Père, étant ici précisé que prier c’est, à n’en point douter, joindre ses mains pour demander, remettre, remercier et implorer avec humilité et ferveur, mais aussi –et peut-être surtout- à retrousser ses manches pour être authentiquement des artisans du Royaume qui est et qui vient. Veiller c’est aussi, à l’évidence, ne pas s’assoupir à l’instar des trois disciples à Gethsémani qui se sont endormis à l’heure cruciale. Rester éveillé, ce n’est pas non plus « banaliser » l’instant présent ; pas plus qu’il n’est question de rêver éveillé mais de demeurer attentifs, écoutants et disponibles à tout ce qui se passe autour de nous pour être des acteurs agissants, témoins du Dieu sauveur. Si le maître nous a quittés, c’est manifestement dans notre intérêt, pour nous apprendre à agir en son nom et mettre ainsi à profit le temps de l’absence. Et même, si devant l’ampleur de la tâche, nous sommes souvent en butte au désespoir, au découragement, à la lassitude et à la peur, Il est là, mystérieusement présent dés lors qu’on l’invoque. Il vient à notre aide, il se hâte de nous secourir car, dans le temps de son humanité, ici bas, Il a aussi connu ces vicissitudes et ces tribulations qui sont notre lot commun. L’important est donc de ne pas être endormi pour le temps du retour du Seigneur, il faut être prêt à le recevoir. Il peut survenir brusquement malgré les signes annonciateurs de sa venue tels que relatés dans l’Écriture, il peut surtout arriver alors qu’on ne l’attend pas, ce qui signifie tout à la fois, avant le moment où nous l’attendons, ou beaucoup plus tard que nous le pensons. Mais la date exacte, le jour et l’heure ne sont pas essentiels ; l’essentiel, c’est que les disciples et les fidèles soient toujours vigilants, qu’ils soient toujours prêts. Cette vigilance est à elle seule tout un programme ! L’exhortation à la vigilance au crible de notre quotidien Honnêtement, quelle place faisons-nous dans nos vies à la Bonne Nouvelle de Jésus Christ ? Est-ce qu’au fond nous ne la considérons pas comme une fausse bonne nouvelle tant nous la traitons avec indifférence, et lorsque nous y faisons référence n’est-ce pas en manière d’alibi et seulement pour la forme ? Est-ce que nous vivons notre conversion, marquée par le sceau du baptême et sa confirmation comme une réelle et définitive révolution dans nos existences ? Ne sommes nous pas des adeptes d’une sorte de « religieusement correct » qui ne nous inciterait à ne nous « mouiller » que du bout des doigts ? Lorsque nous confessons nos péchés et que nous dressons le constat de nos reniements et de nos infidélités, nous avons devant nous des vies dont la caractéristique est la tiédeur ; nous sommes des adeptes du ni chaud ni froid ! Reconnaissons, dans ce contexte, que la vigilance à laquelle nous sommes instamment invités par le Maître n’est pas de l’ordre de nos préoccupations premières, si tant est que nous y pensions jamais ! Mais, Dieu voulant, il est parfois de simples choses qui bouleversent nos existences : une rencontre, une prière, une lecture, un cantique, le regard d’un frère, d’une sœur qui font effraction dans nos cœurs et qui nous disent : désembourbe-toi, prends la mesure de toutes choses, cesse de te complaire en vaines préoccupations et obsessions qui ne sont rien. Ton argent, tes biens, ta quête de reconnaissance sociale, ta soif de réussite, ton aspiration au bonheur, bref, toutes ces choses, qui tout compte fait ne pèsent pas lourd, parasitent durablement ton existence et t’empêchent effectivement de discerner l’essentiel de l’accessoire qui, somme toute n’est que dérisoire.« Je le dis à tous : veillez » Que ce mot d’ordre nous mobilise, nous relève, nous mette en mouvement, nous incite à l’action, qu’il soit le maître-mot pour nos vies afin de préparer et d’aplanir les voies du Seigneur. Que Dieu nous soit en aide ! Amen