Textes : Ésaïe 12 Sophonie 3, v. 14 à 20 Philippiens 4, v. 4 à 7 Luc 3, v. 7 à 18Pasteur Frédéric VerspeetenTélécharger le document au complet

3ème dimanche de l’Avent

Notes bibliques

Luc s’intéresse ici à la proclamation du message de Jean baptiste. Dans les versets 7 à 9 il insiste sur la menace de jugement. Le ton est immédiatement polémique. Jean s’en prend à ceux et celles qui viennent se faire baptiser. Luc considère que ces paroles sont adressées à tout Israël et que le « prophète » Jean baptiste les a prononcées de manière indéniable. Mais ils n’ont pas portés les fruits dignes de la repentance Alors lorsque Luc écrit son évangile nous sommes plus de 40 années après la venue et le ministère de Jean Baptiste et pour Luc la menace proférée par le baptiste est devenue réalité. Désormais il ne s’agit plus d’une possibilité qui aurait pu être écartée par le repentir du peuple mais d’un accomplissement du jugement inéluctable de Dieu. Le peuple n’échappera pas à la colère. Si notre texte est daté d’après 70 cela veut dire que la chute de Jérusalem a eu lieu et désormais la sentence divine envers Israël a été accomplie. En conséquence son message s’adresse désormais à d’autres qu’aux Israélites et particulièrement aux enfants d’Abraham venus de toutes les nations (thème qui sera amplement développé dans la seconde partie de son livre : les Actes des apôtres) Luc considère qu’il est absolument nécessaire de se référer à ces paroles du Baptiste. Accomplies envers Israël elles annoncent que Dieu veille sur sa Parole. Les auditeurs venus de toutes les nations doivent eux aussi entendre le Message d’appel à la repentance et changer de vie car Dieu appelle et accomplit aussi ses paroles de jugements. En se référant à cet évènement Luc met donc en garde ses auditeurs devant la tentation de mépriser la Parole de Dieu qui est certes appel à changer de vie. Grâce, pardon, mais aussi prophétie de jugement si son appel est méprisé. Après cet appel à prendre au sérieux la Parole de Dieu et son appel à la repentance, Luc combat l’idée selon laquelle il suffirait de se dire enfant d’Abraham pour s’être assuré d’être dans la voie droite. Luc place dans la bouche de Jésus des paroles qui évoquent la Puissance de Dieu qui suscite son peuple comme il le veut et quand il le veut. Dieu choisit et élit qui il veut et il appartient aux humains qui entendent cet appel d’y entrer par leur volonté.
v. 8
Si les auditeurs étaient vraiment désireux de se mettre en règle avec Dieu, ils devaient prouver le sérieux de leur repentance en menant une vie transformée. La repentance authentique porte des fruits. Ils devaient cesser de croire qu’il leur suffit d’être les descendants d’Abraham. Le fait d’appartenir à une famille pieuse ne rend pas pieux automatiquement. Dieu n’est pas limité à la descendance génétique d’Abraham pour accomplir son dessein; Il peut susciter une descendance à Abraham à partir des pierres qui bordaient les rives du Jourdain. Certains commentateurs ont vu dans les pierres le symbole des païens que Dieu transformera par un miracle de sa grâce pour en faire des hommes et des femmes ayant la même foi qu’Abraham. Pour Luc cela c’est produit. En tant que nation, la descendance physique du patriarche n’a pas reconnu le Christ. Mais de nombreux païens l’ont accepté comme Seigneur et Sauveur, et sont ainsi devenus la descendance spirituelle d’Abraham
v. 9
L’expression imagée: La cognée est mise la racine des arbres, indique que la venue de Christ mettra à l’épreuve la réalité de la repentance. Ceux qui ne portent pas les fruits de la repentance seront condamnés. Cela peut nous paraître bien dur à entendre mais c’est le texte Les paroles sortaient de la bouche de Jean comme des épées: « races de vipères», « la colère à venir», « la hache», « coupé et jeté au feu». Les prophètes du Seigneur n’oint pas eu un langage doucereux; ils étaient de grands moralistes, et souvent, leurs paroles frappaient les auditeurs
v. 10
Saisie, la foule demanda à Jean des précisions sur ce qui témoignait du caractère authentique de la repentance.
v. 11 à 14
Dans ces versets, Jean donne donc des conseils spécifiques leur permettant de démontrer leur sincérité. D’une manière générale, le précurseur demandait à ses auditeurs d’aimer leurs ennemis comme eux-mêmes, de partager avec eux le vêtement et la nourriture. D’une manière plus précise, il recommande aux publicains (collecteurs d’impôts) d’être parfaitement honnêtes dans toutes leurs affaires. Comme ils passaient généralement pour des escrocs, l’honnêteté serait le signe le plus évident de leur repentance. Enfin, il exhorte les soldats à renoncer à tous les péchés pratiqués habituellement par les hommes à l’armée: l’extorsion, la fraude et le mécontentement. Il faut cependant rappeler avec insistance que ces hommes n’étaient pas sauvés par la pratique de ces vertus; celles-ci n’étaient que la preuve ou le signe extérieur que leurs cœurs étaient vraiment droits devant Dieu. Autres pistes possibles de prédication (celles auxquelles j’ai renoncé)

  • Comme Jean-Baptiste, nous ne sommes pas la Lumière, mais il nous faut rendre témoignage à celui qui est lumière !
  • L’espérance, la joie que nous pouvons faire lever autour de nous ne sont rien par rapport à ce que Jésus est venu faire lever. Il faut que tous entendent : « au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas ». Et nous sommes là pour faire comprendre que si chacun « aplanit le chemin du Seigneur », il n’y aura plus aucun obstacle entre lui et le Messie.
  • Pour resplendir de la lumière de Dieu il nous faut rester en relation constante et intime, « prier sans relâche », toujours revenir à Dieu. Compter sur l’œuvre de son Esprit pour nous rendre capable d’accomplir ce qu’il nous demande
  • Pour rester toujours habités de la joie et de la paix qui viennent de Dieu lui-même, il nous faut veiller à ne pas « éteindre l’Esprit », à ne pas « repousser les prophètes », à « discerner la valeur de toute chose ».

Textes bibliques : Sophonie 3, 11 à 18 Phillipiens 4, 4 à 7 Luc 3, 7 à 18 Cantiques proposés : AEC 311, NCTC 161, Alléluia 31-09 : « Comment te reconnaître » Str.1 à 4 AEC 321, Alléluia 31-31 : « Quand le Seigneur se montrera » Str. 1 à 4 AEC 319, Alléluia 56-07 : « Au dernier jour » Str. 1 à 5

Prédication

Dimanche dernier pour ceux qui suivent scrupuleusement le lectionnaire de la Fédération Protestante nous étions déjà en compagnie de Jean Baptiste. Ainsi défile sous nos yeux, les débuts du ministère de Jean, sa vocation, sa prédication qui résonne dans le désert, son appel adressé à tout Israël et le signe du baptême qui est posé comme un engagement de vie nouvelle. Notre texte aujourd’hui continue sur ce registre et retentit comme un appel à la repentance. La repentance ne se borne pas à être un vague regret pour une peccadille mais il s’agit de la nécessité de changer de vie. On peut même dire de changer de direction. Le mot grec : « métanoia » signifie précisément changer d’esprit, changer d’état d’esprit. Pour Jean Baptiste et pour Luc, disciple de Jésus Christ, la rencontre avec Dieu commence par cette prise de conscience. Nous sommes par nature livré au désordre dans notre vie morale et spirituelle, notre conscience est obscurcie, endormie et voilà qu’elle se réveille et que nous cherchons à sortir du cercle infernal du mal. Pour Luc la repentance est un retour à Dieu le commencement d’un nouveau chemin. Une autre vie en vérité. En ce temps de l’avent nous aurions tort de considérer qu’il ne s’agit là que d’un remords suscité par l’ambiance de la préparation à Noël. En réalité il ne s’agit pas d’un vague regret mais d’une réponse à l’appel que Dieu nous adresse. Israël selon Luc n’y a pas prêté attention et l’appel s’est transformé en jugement. La ville de Jérusalem est tombée en 70 de notre ère. Beaucoup de personnes avaient autrefois entendu l’appel de Jean lorsqu’il prêchait sur les rives de Jourdain et lorsque sa voix prophétique exhortait ses compatriotes à revenir à Dieu en lui offrant leur être tout entier. Mais voilà qu’est ce donc que changer de vie ? Qu’est ce donc que se repentir ? Est – il uniquement nécessaire de se faire baptiser, d’obtenir un sauf conduit car ainsi Dieu nous accueillera à la porte du Royaume en demandant notre laisser passer ? Non, trois fois non et Jean ne s’y trompe pas il va expliquer en quelques phrases ce que veut dire changer de vie. Alors il commence en invectivant sérieusement ses auditeurs pressés de recevoir le baptême. « Engeance, race, de vipères, qui vous a appris à fuir ainsi la colère à venir ? », leur dit-il ! Il leur reproche de vouloir fuir la colère de Dieu en ayant recourt à une sorte de parapluie protecteur : le baptême. Ils sont assez calculateurs pour fuir la colère de Dieu par un petit arrangement dont ils pensent que le Seigneur sera dupe. Puisque Dieu demande le baptême, baptisons, faisons nous baptiser, faisons lui plaisir il en restera toujours quelque chose, cela peut toujours servir ! Un vaccin vaut mieux que la mort possible éternelle possible ! Mais voilà les enfants d’Israël qui ont entendus la prédication du prophète ont commis une erreur grave, ils se sont trompés sur l’intention de Dieu ou n’ont pas voulu la comprendre de peur que cela dérange leurs habitudes. Ils ont eu tort de croire que leur ascendance célèbre les préservait du malheur. Ce n’est pas parce que Abraham a été l’homme juste qui a cru aux promesses de Dieu que sa foi à lui seul suffit pour eux tous. L’on ne devient pas juste parce qu’un illustre ancêtre l’a été. Mais on le devient parce que l’on s’ouvre soi même à Dieu et que l’on accepte de prendre un autre chemin. Pour LUC qui reprend les enseignements du baptiste il ne faut se tromper. La repentance exige des actes, une conduite, qui soit véritablement la conséquence d’une authentique conversion. Quelque chose de visible de frappant qui n’a cependant rien à voir avec du cinéma de la mise en scène mais qui traduit l’expression authentique d’un cœur transformé, libéré, orienté vers une nouvelle manière de vivre les relations aux autres et créer ainsi les bases d’une société nouvelle fraternelle et a la place de tous. La repentance se présente ici à nous comme un mouvement articulé autour de trois moments : Il y a d’abord la prise de conscience, le regret, la sensation de n’avoir pas été sous le soleil et sous le regard de Dieu comme nous aurions du être. Le psaume 51 évoquait déjà cette démarche d’un homme pour qui cette prise de conscience douloureuse et tragique produit, si elle est sincère et authentique, l’accès à une vie nouvelle. La prise de conscience de nos erreurs est ici salutaire et libératrice. Ensuite vient l’aveu, la reconnaissance, la confession qui nous permet de mesurer le mal produit et de commencer le chemin et le travail de réconciliation avec Dieu, avec soi même et avec les autres. Enfin vient la réparation, l’abandon du mal et de toutes nos actions malsaines. C’est cela que Jean aborde face à la question de ses interlocuteurs. « Que devons nous faire ? ». Il est d’ailleurs important de remarquer que ses auditeurs ne demandent pas « que faut – il croire ou qui faut – il croire pour être sauvés ? », mais ils lui disent : « que devons nous faire ? » Ils ont compris que l’expression d’une foi authentique ne se cantonne pas à la déclamation de justes doctrines mais que le service de Dieu est un chemin qui passe d’abord par des exigences pratiques. Alors Luc en reprenant ces paroles de Jean le baptiste s’adresse à trois catégories d’interlocuteurs. D’abord il s’adresse à la foule en général, puis il s’intéresse aux publicains (collecteurs d’impôts), enfin il se tourne vers les soldats. Aux premiers il propose le partage de leurs biens, vêtements et nourriture. Cet appel au partage n’est pas seulement un geste matériel mais il s’agit en vérité d’une véritable lutte spirituelle contre l’égoïsme naturel, contre l’indifférence envers le voisin le proche le malheureux, l’étranger. En cette fin d’année 2009, ils sont nombreux les blessés du chemin qui correspondent précisément aux catégories de notre récit. Et il n’y a aucun doute possible si l’on se veut fidèle à l’intention du texte. Lorsque le Seigneur nous adresse cette année encore cet appel, il nous propose le même chemin. Les banques ont été renflouées, de nombreux salariés sont devenus chômeurs. Le partage a eu lieu mais il a récompensé les mêmes, les plus riches qui disons le sans détour en ont le moins besoin. Jésus disait à Judas « des pauvres il y en aura toujours parmi vous », sa parole est malheureusement vraie et nous replace devant cet appel de Luc : « partagez votre nourriture et votre vêtement ». Mais l’on pourrait ajouter donnez un toit à celui qui n’en a pas, une couverture sociale et des soins à ceux qui en sont dépourvus. Ce constat social nous conduit à remarquer combien le chemin proposé par l’évangile est encore loin de la préoccupation de notre occident que l’on dit porteur par des valeurs Judéo chrétiennes ! Nous n’avons certes pas les moyens en tant qu’individu isolé de faire changer les rouages de notre monde en un instant mais la question nous est aussi adressée à nous. A notre niveau avec nos moyens comment exprimons-nous notre attachement à ces paroles ? Ensuite Luc s’en prend aux collecteurs d’impôts, ces personnages dans notre histoire sont riches, ils se servent bien aussi eux-mêmes au passage en rendant ce qui revient à César. Ce sont des trafiquants légaux et ils n’ont aucun scrupule à gonfler leurs comptes bancaires sur le dos des démunis. Touts cela est légal !! Alors surgit la règle : « N’exigez rien de plus que ce qui doit être ».Cet appel nous est aussi adressé, et au-delà des richesses de ce monde nous sommes invités à rechercher celles qui ne rouillent pas et qui sont inscrites dans le secret des cœurs ouverts et livrés à Dieu. Enfin Luc s’adresse aux militaires ou à la police auxiliaire et les exhorte à ne pas sombrer dans la violence aveugle et inhumaine. Cette question est difficile en elle même au sein de nos sociétés en crises sociales ; il suffit de penser aux conflits localisés, ethniques partout dans le monde, mais aussi aux affrontements dans certaines banlieues, sans parler des bavures. Nous sommes invités à réfléchir sur l’escalade de la violence et ce qu’elle produit, mais aussi à ses racines. Nous devons être ces acteurs qui au sein de leurs familles de leurs communautés, associations, posent les actes d’une vie apaisée. Peut être encore une fois nous sentons-nous bien en dessous de ces exigences mais ici en citant les paroles de Jean, l’évangéliste Luc nous invite à comprendre que cela ne dépend pas entièrement de nous, mais que quelqu’un nous rejoint sur ce chemin et rend possible ce qui ne l’était pas : « Moi je vous ai baptisé d’eau mais il vient après moi celui qui vous baptisera du Saint-Esprit ». Pour Luc nos vies sont portées par l’œuvre de Dieu, son souffle nous emporte. La communauté de ceux qui ont cru n’est pas réduite à se repentir et à reconnaître ses fautes, mais, elle est rendue capable de marcher sur ce chemin nouveau par l’œuvre même de Dieu, par son Esprit, par sa présence spirituelle quotidienne. Pour Luc la vie terrestre est véritablement le lieu où doit et peut s’exercer notre foi en celui qui transforme toutes choses. Nous n’attendons pas seulement le messie, il est en quelque sorte déjà venu et il revient au travers de cette proclamation de l’Avent nous redonner la force et la volonté de nous engager à l’écoute de ses promesses. Nos vies engourdies, nos oreilles bouchées, nos déceptions sont appelées à céder devant la parole transformatrice de celui qui porte en lui le vouloir et le faire. La bonne nouvelle peut jaillir à nouveau, Luc ne nous renvoie pas seuls devant les paroles des prophètes ou devant les commandements mais il nous replace devant le maître de toutes choses, devant celui qui nous donne par son Esprit la capacité, la force, la volonté de devenir authentiquement Fils de Dieu , témoins, disciples dans un monde troublé. Prière possible pour ce troisième dimanche de l’AVENT Il faut des lieux où la musique de Dieu rejoigne le chant des hommes, et où chacun puisse venir cueillir le soleil de la fraternité. Il faut des hommes et des femmes, humbles et discrets, inspirés par l’Évangile, et capables avec tous les autres de n’importe quelle langue ou de n’importe quelle culture ou de n’importe quelle religion, de travailler à la mise en place d’une terre enfin humaine. Il faut des lieux où les esprits et les cœurs sont stimulés à passer les frontières et à s’ouvrir aux murmures et aux cris du monde. Il faut des lieux où à travers des hommes et des femmes, l’Église devienne la présence réelle de l’amour de Dieu. Il faut des hommes et des femmes nourris de la Parole du Christ et dont le seul souci est, à la suite de leur Seigneur, de mettre la lumière et la joie dans le monde.