Textes : Philippiens 2, v. 12 à 30 Psaume 67 Actes 15, v. 1 à 29 Apocalypse 21, v. 10 à 23 Jean 14, v. 23 à 29Pasteur Jean-Jacques MullerTélécharger le document au complet
Notes bibliquesLes textes bibliques de ce dimancheLes textes sont choisis en fonction du calendrier liturgique. Le premier texte, qui pendant le temps pascal n’est pas tiré de l’Ancien Testament mais du livre des Actes des Apôtres, sert d’introduction à l’Évangile, dans une perspective christologique. De Pâques à Pentecôte, nous lisons des passages de l’Évangile de Jean, en particulier des passages des discours d’adieu dans lesquels Jésus annonce la venue de l’Esprit Saint.Actes 15, 1-29 est le récit de l’Assemblée de Jérusalem convoquée suite aux troubles dans l’Église d’Antioche, dans le but de résoudre les problèmes causés par la cohabitation de chrétiens juifs et de chrétiens païens au sein de cette Église. On peut relever en particulier la déclaration de Pierre à propos des païens : « Dieu, qui connaît les cœurs, leur a rendu témoignage, quand il leur a donné, comme à nous, l’Esprit Saint ». Le psaume 67 invite les nations à chanter leur joie à cause de la bénédiction et du salut que Dieu leur accorde. Il fait penser à l’universalisme des Actes.Apocalypse de Jean 21, 10-23 est une description de la Jérusalem céleste. L’absence d’une mention de l’Esprit Saint dans cette description signifie-t-elle que la présence et l’action de l’Esprit, comme prémices de la rédemption à venir (Romains 8,22ss), se limitent au temps entre la résurrection du Christ et la fin ?Jean 14, 23-29 fait partie des discours d’adieu de Jésus et contient des enseignements, des exhortations et des promesses pour les disciples, dont la seconde promesse de l’Esprit Saint.Les notes et la prédication portent sur Jean 14, 23-29, avec un élargissement possible.L’Esprit Saint dans l’Évangile de JeanNotre péricope n’est pas une référence isolée à l’Esprit Saint, ni dans les discours d’adieu, ni dans l’Évangile de Jean dans sa totalité. Les références à l’Esprit forment deux groupes au sein de l’évangile. Dans le premier groupe (chap. 1 à 7), l’Esprit est associé à la personne et à la parole de Jésus et c’est l’Esprit seul qui permet d’accéder à Dieu, au royaume de Dieu et à la vie : au témoignage que Jean-Baptiste rend à Jésus (« C’est lui qui baptise dans l’Esprit Saint », 1,32s) font suite les témoignages de Jésus sur l’Esprit à Nicodème, à la Samaritaine, à la foule et à ses disciples (« Ce qui est né de l’Esprit est Esprit », 3,5s ; « Dieu est Esprit », 4,24 ; « Les paroles que je vous ai dites sont Esprit et vie », 6, 63 ; « De son sein -de celui qui croit en moi- couleront des fleuves d’eau vive », 7,38 ), mais aussi les commentaires de l’évangéliste (« Celui que Dieu a envoyé dit les paroles de Dieu, qui lui donne l’Esprit sans mesure », 3,34, et « Il (Jésus) désignait ainsi l’Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui : en effet il n’y avait pas encore d’Esprit parce que Jésus n’était pas encore glorifié », 7,39). Ce dernier commentaire annonce les références du second groupe.Le second groupe (chap. 14 à 20) contient les quatre annonces et promesses de l’Esprit Saint par Jésus dans les discours d’adieu ; la dernière (Jn 16, 7-15), la plus développée, est le couronnement des trois premières (Jn 14,16s ; 14,26 et 15,26). Jésus annonce la venue de l’Esprit après son départ et le rôle qu’il jouera au sein de la communauté des disciples, mais aussi par rapport au monde. L’esprit Saint a une triple fonction : demeurer auprès des disciples, enseigner et témoigner de Jésus Christ. Les promesses de l’Esprit sont suivies de leur réalisation par le Ressuscité disant à ses disciples : «La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, à mon tout je vous envoie ». Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint ; ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis… » (Jn 20, 21ss).Les discours d’adieu de Jésus (chap. 13 à 17)Ces discours constituent un ensemble bien délimité et sont propres à Jean, même si dans la seconde partie de l’évangile, concernant la passion et la résurrection de Jésus (chap. 13 à 21), Jean est plus proche des trois autres évangélistes que dans la première partie.Dans son commentaire, R. Bultmann a introduit ces discours avec des mots saisissants : « Comparé au récit des synoptiques, le récit de cette nuit (chez Jean) atteint une extraordinaire concentration, qui accentue le contraste avec tout ce qui précédait. Les images variées de la première partie sont effacées ; le bruit du monde a disparu, le silence de la nuit règne. Jésus, en tant qu’il est le Révélateur, reste le même, et pourtant il est un autre. Il n’est plus au cœur du conflit, mais il parle aux siens, à sa communauté ».L’atmosphère qui entoure ces discours est celle du départ de Jésus et de son amour extrême pour les siens (signifié par le lavement des pieds qui précède). X. Léon-dufour et J. Zumstein ont souligné la forme littéraire de ces discours qui est celle du testament ou du discours d’adieu qu’une personne, avant sa mort ou avant un voyage, adresse à sa famille, à ses amis ou à ses disciples. Le livre du Deutéronome, par exemple, est le testament que Moïse a laissé à Israël. Le discours d’adieu de Paul à Milet, adressé aux anciens de l’Église d’Éphèse, (Actes 20,17-38), relève du même genre, mais il est bien plus émouvant (larmes, embrassades). Paul est dépeint avec des traits du Christ. Il y a aussi un embryon de discours d’adieu avec des exhortations dans l’Évangile de Luc (22,24ss). Ce qui distingue les discours johanniques, ce sont leur profondeur théologique et la promesse de l’Esprit. Les exégètes divergent sur la composition de ces discours, qui soulèvent plusieurs difficultés. D’une part, Jn 14,31 constitue la fin d’un discours et la transition vers le récit de la passion en 18,1, de sorte que les chap. 15 à 17 ne semblent pas à leur place. Il y a, d’autre part, des incohérences (en Jn 16, 5, Jésus dit : « Aucun d’entre vous ne me demande : Où vas-tu ? », alors qu’en 13, 36 Pierre lui demandait : « Seigneur : Où vas-tu ? ») et des redites. Des exégètes en ont déduit que ces discours nous sont parvenus en désordre (Bultmann) ou ont connu plusieurs relectures et éditions, qui n’ont pourtant pas altéré la cohérence de l’ensemble (Léon-Dufour, Wilckens, Zumstein). Selon Zumstein, « Nous avons affaire à la poursuite et à l’approfondissement du travail interprétatif mené par l’évangéliste dans le premier discours d’adieu ». Tous soulignent la coloration et le style typiquement johanniques des discours d’adieu, que certains ont comparés au son monotone d’une cloche (J. Wellhausen). Zumstein écrit du style johannique : « Les répétitions et les variations permettent un approfondissement du thème particulier qui est abordé ». Dans les discours d’adieu, souligne Wilckens, « l’évangéliste Jean façonne profondément le texte comme dans aucune autre partie de son évangile ». Il propose, pour les discours d’adieu, un plan en six sections : 1. 13,31-38 : La signification de la glorification de Jésus pour ses disciples, 2. 14,1-31 : La promesse du retour de Jésus et la présence de l’Esprit (les sections 1 et 2 forment un seul et même discours), 3. 15,1-17 : Demeurer dans l’amour de Jésus, 4. 15,18-16,4a : La haine du monde et la persécution des disciples, 5. 16,4b-33 : L’action de l’Esprit comme accusateur du monde et retour de Jésus et 6. 17,1-26 : La prière de Jésus pour les siens.Jean 13,31-14,31 : le premier discours d’adieuNous avons, selon l’avis quasi unanime des exégètes, un premier discours bien circonscrit en Jn 13, 31-14, 31. « Si la macrostructure du discours, écrit Zumstein, est relativement simple à établir (13, 31-38 : introduction ; 14, 1-26 : corps du discours ; 14, 27-31 conclusion du discours), l’architecture de la partie principale prête à discussion ». Le cheminement de la pensée en Jn 14 n’est pas facile à suivre, il y a à la fois répétition et progression. Le passage d’un thème à l’autre se fait progressivement. On peut s’en tenir au découpage habituel des Bibles (TOB, Français courant, NBS) en deux parties : 14,1-14, Jésus, chemin vers le Père, et 14,15-31, la promesse de l’Esprit. Mais ce n’est qu’un choix possible parmi d’autres : Léon-Dufour place une césure entre les versets 11 et 12 et Zumstein, entre les versets 17 et 18. Le thème principal et unificateur du discours est la quête du Père et le mouvement vers le Père, comme étant le cœur de la foi d’Israël (voir Ps 43,3ss) et de toute religion. Cette quête, qui est celle des disciples mais aussi de tous les humains, s’exprime dans la demande de Philippe : « Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit » (14, 9). Le mot « Père » revient 22 fois dans Jn 14, dont le sommet est le verset 28 : « Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi ». Pour F. D. Bruner, qui fait une lecture théologique de Jean sans s’embarrasser des problèmes littéraires, le thème principal du premier discours (chap.14) est le Père, le thème du second (chap. 15), le Fils et le thème du troisième (chap.16), l’Esprit. La prière d’adieu du chap. 17 est centrée sur l’Église (Jesus’Church Prayer). C’est dans la perspective du mouvement de tout être humain vers Dieu, le Père, qu’il faut comprendre l’auto-proclamation de Jésus « Je suis le chemin » et ses déclarations relatives à l’Esprit Saint en Jn 14.Il est difficile d’isoler Jn 14, 23-29 en tant que péricope qui se suffirait à elle-même, comme le propose le lectionnaire. Que le prédicateur/la prédicatrice se sente libre de lire, soit les versets 23 à 29, soit les versets 15 à 31, soit tout le chapitre 14, mais dans la prédication il faut tenir compte de tout le discours, tellement tout y est lié.Nous en faisons une lecture rapide, avec pour guides Léon-Dufour et Zumstein. Le discours est placé sous le signe du « maintenant » en 13,31 ; il renvoie à « l’heure » de 13,1 et de 17,1, qui est l’heure du retour de Jésus vers le Père et de sa glorification. Les v. 31 et 32 traitent de la glorification du Père par le Fils de l’Homme et surtout de la glorification (à la fois au passé et au futur) du Fils de l’Homme par le Père. Le thème de la glorification annonce la prière de Jésus de Jn 17. Au v. 33, Jésus annonce à ses disciples qu’il appelle « mes petits enfants » son départ imminent et il les avertit qu’ils ne peuvent pas le suivre et le chercheront comme les Juifs (7,3 et 8,1). Il faut donner à « chercher » un sens profond de quête humaine et religieuse. Aux v. 34 et 35, Jésus donne à ses disciples le commandement nouveau « Aimez-vous les uns les autres », qui est fondé dans son amour pour eux : « Comme je vous ai aimés ». Ce commandement est comme un refrain tout au long des discours d’adieu, surtout en Jn 15 et 17 qui sont centrés sur le lien entre Jésus et les siens (voir 17,26). Jn 13, 36-38 est une digression : un dialogue entre Jésus et Simon-Pierre. Pierre pose deux questions à Jésus : « Seigneur, où vas-tu ? » et « « Pourquoi ne puis-je te suivre tout de suite ? » La suite du discours est à la fois une réponse à ces questions et une invitation à la foi en Jésus qu’implique cette réponse. Jn 14, 1 : « Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi » (c’est la traduction la plus cohérente à mon sens, voir TOB, Bible de Jérusalem, contre NBS et Zumstein qui rend : « Croyez en Dieu et croyez en moi »). Tout au long du discours reviennent les verbes « croire », « connaître » et « voir » qui sont associés aux paroles de Jésus et à l’enseignement de l’Esprit. On pourrait parler d’une théorie de la connaissance johannique. Jn 14, 2-6 traitent du lieu où se rend Jésus (« la maison du Père » qui fait penser au Temple de Jérusalem (les prières et les chants de pèlerins dans les psaumes) et au chemin qui conduit à ce lieu. Les affirmations de Jésus en 14,6, « Je suis le chemin » et « Personne ne va au Père si ce n’est par moi », le conduisent à approfondir pour ses disciples la question de sa relation avec le Père en 14,7-11a. A la demande de Philippe, « Montre-nous le Père » (v.8), Jésus répond à la fois par un rappel de son cheminement terrestre avec ses disciples (objet de connaissance et de mémoire) et par une invitation à la foi : « Croyez-moi, je suis dans le Père, et le Père est en moi ». Tout, dans ce discours, est une question de foi.En 14, 11b-14, nous passons de la foi en Jésus à la foi en ses œuvres, qui sont les œuvres du Père en lui et par lui (v.9). Et des œuvres de Jésus, qui sont celles de son Père, nous passons aux œuvres de ses disciples (cf. Jn 5,17ss ; 6,27ss) Les œuvres du disciple sont avant tout sa foi, sa prière et la mise en pratique du commandement d’amour. En lien avec ces œuvres des disciples (en particulier leur amour) et comme exaucement de leur prière, Jésus leur annonce en 14,15 l’envoi par le Père d’un « autre Paraclet », appelé aussi « l’Esprit de vérité ». La vérité est la connaissance du Père et la communion avec lui. Le mot paraklètos signifie « celui qui est appelé auprès de quelqu’un » (en latin : advocatus) ; il est parfois traduit par : le consolateur, le défenseur, celui qui exhorte ou encourage… « L’autre Paraclet » demeurera toujours auprès des disciples, à la différence de Jésus dont la présence auprès d’eux s’achève. Ici, comme en 14,22ss ; 15,18ss et 17,9ss, l’opposition entre les disciples et le monde est soulignée. Le monde ne connaît pas l’Esprit, comme il ne connaît ni Jésus ni son Père. Bultmman écrit à propos de cette opposition : «La communauté se tient dans le monde et doit agir dans le monde, elle n’existe sur terre que dans une opposition marquée au monde ». Les deux promesses de l’Esprit aux v. 15-17 et aux v. 25-26 encadrent la seconde partie du discours. On peut, avec Léon-Dufour, intituler les v. 18-24 : la venue du Fils et du Père auprès des disciples. Zumstein parle « de la venue post-pascale du Christ auprès des siens ». Le chemin des disciples vers le Père devint ici le chemin du Fils et du Père vers les disciples, ils demeureront auprès d’eux (14,23). « Ainsi s’inverse le mouvement, esquissé en 14,2-3, des disciples emmenés par Jésus vers le Père : c’est le Père qui vient chez le disciple fidèle », écrit Léon-Dufour. Alors que le retour des disciples vers le Père est censé avoir lieu à la fin des temps, lors de la parousie de Jésus, la venue du Père et du Fils chez les disciples se réalise dans un avenir proche, qui est celui de la Résurrection du Fils et de l’envoi de l’Esprit. Le présent du v. 18, « Je viens à vous », désigne les apparitions du Ressuscité à ses disciples, Jn 20,19.24. Selon Zumstein, « la venue renouvelée de Jésus coïncide avec l’expérience pascale. Pâques et la parousie sont ici un seul et même événement ».A l’épreuve de l’absence (13,33) se substitue en 14,19 la joie de la présence : « vous me verrez vivant et vous vivrez vous aussi ». Les v.18 à 24 suggèrent la fusion en un seul événement, en une seule expérience, de la rencontre avec le Ressuscité, de la parousie, de la venue du Paraclet, de l’inhabitation du Père et du Fils dans les disciples et de la mise en pratique du commandement d’amour. Il n’y a plus d’extériorité, plus de distance, plus de séparation : le temps, l’histoire, le monde, la mort semblent abolis, il n’y a plus que l’union des disciples avec le Père et le Fils. Cette lecture est confirmée par les exégètes : « Au schème de l’extériorité qui, par la vision et même l’audition, demeure celui des récits d’apparition, se substitue le schème de l’intériorité, de l’inhabitation. Toute distance, tout vis-à-vis sont supprimés : dans la relation personnelle de l’amour la dualité devient union » (Léon-Dufour), « En rencontrant le Christ ressuscité, c’est à la plénitude de vie offerte par Dieu que les disciples accèdent. La communion du Christ avec son Père est désormais une communion partagée avec les disciples » (Zumstein). Au v. 22, Judas (l’un des Douze, aussi appelé Thaddée, Lc 6,16 ; Mt10,3 ) soulève pourtant la question : qu’en est-il du monde ? Est-il exclu de la manifestation de Jésus à ses disciples ? Y a-t-il ici une allusion à la critique du judaïsme : Jésus n’est pas réellement ressuscité puisqu’il n’y a pas eu d’apparition publique (voir Actes 10,40ss) ? Ce serait plutôt le refus de Jean d’une révélation eschatologique (pour la fin des temps), cosmique et apocalyptique (telle que, par exemple, elle se trouve en 1 Thessaloniciens 4,13ss). Jean ne retient qu’une révélation personnelle et communautaire, intérieure et spirituelle, réservée à celles et ceux qui, par la foi et l’amour, sont unis au Père et au Fils ; cette révélation n’est pas localisée à la fin des temps, mais peut advenir à tout moment, en tout lieu. A partir du v. 21, Jésus ne s’adresse plus directement à ses disciples, mais parle du croyant en général : le « vous » cède la place à « Celui qui… ». Les exégètes parlent de l’eschatologie réalisée ou présente dans l’Évangile de Jean. La réponse de Jésus à Judas au v. 23 est un peu énigmatique : l’opposition n’est pas tant entre la communauté des disciples et le monde qu’entre celui qui aime et celui qui n’aime pas.Nous avons à la fois une continuité et une rupture entre les v. 25 et 26 (qui est soulignée par le « mais » au début du v. 26, que la TOB a laissé tomber), entre « Je vous ai dit ces choses pendant que je demeurais avec vous » (un passé sur le point de s’achever) et « Le Paraclet, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses… » (un futur proche). « Au temps fondateur, celui de la révélation de Jésus de Nazareth, fait suite le temps de la même révélation par le Paraclet, qui en est le dévoilement plénier. Le ministère terrestre a pris fin (v.25) mais, grâce au Paraclet, les paroles de Jésus s’éclaireront pour ses disciples bien plus que lors de leur audition première », écrit Léon-Dufour. « Il vous enseignera toutes choses » : l’accent est mis sur la totalité et la plénitude de l’enseignement de l’Esprit. Léon-Dufour parle d’intériorisation et de pleine compréhension des paroles de Jésus par les disciples au travers de l’enseignement de l’Esprit (Jérémie 31,33ss, Ézéchiel 36,26ss), Zumstein souligne plutôt le rôle de l’Esprit comme artisan de mémoire et interprète des paroles de Jésus. Pour Bruner, le « et » du v. 26 est plus explicatif que conjonctif, il signifie « à savoir » : «Le Paraclet…vous enseignera toutes choses, à savoir : il vous fera ressouvenir de tout ce que je vous ai dit ». Il me semble que ces lectures minimisent la fonction de l’Esprit Saint qui enseignera toutes choses. Ces choses, concernant le Père dépasseront les paroles que Jésus a dites pendant sa mission terrestre, car le Père est plus grand que le Fils et le Fils est en chemin vers le Père. Voir à ce sujet l’article fort intéressant de G. Siegwalt, « La promesse en partie inaccomplie du discours d’adieu de Jésus. Le Paraclet comme esprit de prophétie et la continuation de la révélation du Dieu vivant », (Études théologiques et religieuses 86, 2011/2, p.227 à 236). Siegwalt reproche à la théologie occidentale l’absorption de la doctrine de l’Esprit dans celle du Christ, il parle de rétrécissement de la révélation et de « théologie de la délimitation ». Au nom d’une doctrine christologique stricte et par crainte des débordements, on rejette toute parole et tout acte prophétique, toute spiritualité et toute religiosité se référant à un Esprit qui ne « procéderait » pas du Christ (le fameux filioque, « et du Fils », correctif et réducteur, ajouté dans le Credo), d’un Jésus ou d’un Christ figé dans un passé historique ou dans une doctrine christologique, alors que le Christ ressuscité est vivant et en chemin vers le Père qui est plus grand que lui. La question de la relation entre le Christ et l’Esprit Saint est l’une des plus épineuses de la théologie chrétienne.La conclusion du discours (14,27 à 31) récapitule l’essentiel de ce que Jésus a dit à ses disciples : « Vous avez entendu ce que je vous ai dit », v.28. Après avoir annoncé la venue prochaine de l’Esprit, Jésus donne la paix (il ne la promet pas seulement) à ses disciples. En tant que Messie, il est « le Prince de la paix » (Ésaïe 9,5ss). La salutation de la paix sera reprise lors des apparitions pascales (Jn 20,19.21.26). L’opposition au monde est encore soulignée ; je ne vous donne pas la paix comme le monde peut la donner. « La paix intérieure profonde donnée au croyant est le fruit de la victoire du Christ sur la mort », écrit Léon-Dufour pour dire ce qui est le propre de la paix donnée par Jésus. L’essentiel est résumé au v. 28 : les deux affirmations ou les deux mouvements s’éclairent mutuellement : «Je m’en vais et je viens à vous » et « Je vais au Père qui est plus grand que moi ». L’Esprit Saint relie ces deux affirmations de Jésus, en créant entre elles un lien et un espace de joie, de paix, d’amour et d’espérance. Tout à la fin, il est rappelé que le monde reste l’horizon du dessein d’amour et de salut de Dieu (Jn 3,16). L’injonction finale a sans doute aussi un sens symbolique : « Levez-vous, partons d’ici », autrement dit : « Engagez-vous dans le combat de la foi et du témoignage » (Dodd).Bibliographie : j’ai consulté les commentaires sur l’Évangile de Jean de R. Bultmann (1941), de X Léon-Dufour (tome III, 1993), d’U.Wilckens (2000), de J. Zumstein (chap. 13-21, 2007) et de F.D. Bruner (2012). Avec l’article de G. Siegwalt, on peut encore mentionner celui de J. Zumstein, « Interpréter le Quatrième Évangile aujourd’hui. Questions de méthode », Revue d’histoire et de philosophie religieuse 92, 2012/2, p. 241-258. Je signale aussi la méditation de G. Siegwalt sur Jn 14,23-29 pour ce dimanche 5 mai 2013 dans « Notre pain quotidien ».PrédicationNous venons d’entendre, dans l’Évangile selon Jean, un passage des discours d’adieu que Jésus a adressés à ses disciples, après son dernier repas avec eux et avant son arrestation au Jardin des Oliviers.Ces discours avec la prière qui les conclut ne se trouvent que dans l’Évangile selon Jean, qui leur a donné une très grande importance – ils couvrent presque cinq chapitres. Ils contiennent des paroles de Jésus qui sont décisives pour ses disciples, non seulement pour les disciples qui l’entouraient lors de son dernier repas, mais encore pour l’Église et les croyants de tous les temps, des paroles concernant tout autant leur foi et leur vie personnelles et communautaires que leur présence et leur témoignage dans le monde. Les discours et la prière d’adieu de Jésus sont en quelque sorte la quintessence de l’Évangile selon Jean. Nous y trouvons en particulier des promesses et des explications relatives à l’Esprit Saint, à sa venue et à son rôle. Cet Esprit Saint, le Père l’enverra prochainement, au nom de Jésus et à la suite de sa prière, il demeurera pour toujours auprès des disciples, les éclairant par sa présence, son enseignement et son témoignage. Dans les discours d’adieu johanniques, l’Esprit Saint porte un nom original, il est appelé « le Paraclet », c’est-à-dire celui qui est appelé pour être auprès de quelqu’un, d’une personne ou d’une communauté. Il est aussi appelé « l’Esprit de vérité », notamment « l’Esprit de vérité qui procède du Père » (Jean 15,26) ; ce titre souligne sa fonction comme enseignant et témoin.C’est justement pour cette annonce et ces explications relatives à l’Esprit Saint que nous sommes invités aujourd’hui, comme dimanche dernier et jusqu’à Pentecôte, et même au-delà, à lire et à méditer, chaque dimanche, un passage des discours ou de la prière d’adieu de Jésus dans l’Évangile selon Jean. Ces lectures témoignent de l’importance que la tradition ecclésiale et liturgique a accordée à ces discours et à cette prière. Pourtant notre calendrier liturgique, avec ses quarante jours entre Pâques et l’Ascension du Christ et ses cinquante jours, c’est-à-dire ses sept semaines, entre Pâques et Pentecôte, s’inspire davantage du livre des Actes des Apôtres que de l’Évangile selon Jean. Cela explique sans doute la lecture simultanée des deux écrits du Nouveau Testament pendant le temps pascal.Les données chronologiques du livre des Actes des Apôtres sont à la fois historiques et symboliques, il s’agit d’inscrire l’avènement de l’Esprit Saint et la naissance de l’Église dans la continuité de l’Alliance de Dieu avec Israël et de souligner en même temps la nouveauté radicale que représente le don de l’Esprit Saint aux nations païennes, comme le déclarait Pierre à l’Assemblée des apôtres à Jérusalem. Tout en se situant dans la même perspective, l’Évangile selon Jean s’intéresse moins à la chronologie et au calendrier. Pour lui, les faits et les vérités doivent être intériorisés par les croyants et l’Église, et saisis dans leur signification profonde.On parle de discours et de prière d’adieu, parce qu’il s’agit de paroles que Jésus a prononcées avant sa mort, avant sa séparation d’avec ses disciples Il ne faut pourtant pas faire une lecture trop historique ou trop sentimentale de ces paroles ; elles sont sobres, voire austères, et ont une portée générale au-delà de leur contexte immédiat. Le contraste est frappant entre les discours d’adieu johanniques et l’émouvant récit du livre des Actes des Apôtres rapportant le discours d’adieu de Paul à Milet, aux anciens de l’Église d’Éphèse, qui se termine avec des larmes et des embrassades (Actes 20, 17-38). L’évangéliste Jean ne veut pas nous raconter, à la manière d’un historien ou d’un romancier, le moment particulièrement émouvant du départ et de la mort de Jésus. Pour ses lecteurs, des chrétiens de la fin du premier siècle de notre ère, et encore plus pour nous aujourd’hui, cela n’aurait qu’un intérêt historique et ne susciterait que des sentiments confus de tristesse, de mélancolie et de piété à l’égard de Jésus. On a sans doute trop interprété les discours d’adieu de Jésus comme des paroles de consolation, de réconfort et d’encouragement pour des disciples confrontés à la mort de leur maître et à son absence -d’où le titre « discours d’adieu » qu’on leur a donné. Il s’agit plutôt d’un enseignement, de la communication de vérités fondamentales aux chrétiens de tous les temps. La question brûlante que soulèvent les discours d’adieu et à laquelle ils répondent est celle-ci : le témoignage que portent les chrétiens au nom de Jésus, leur Seigneur, tient-il ses promesses, à savoir ouvrir à une connaissance de Dieu, à un chemin conduisant à lui, ou n’est-il qu’illusion comme l’affirment ses critiques, comme peuvent parfois se le demander les chrétiens eux-mêmes lorsqu’ils sont confrontés à ces critiques ou à leurs propres doutes. Il y va dans ces discours de l’existence même de la communauté chrétienne, de la vérité de sa foi et de la crédibilité de sa parole.Nous essayons maintenant, dans la mesure où nous sommes capables de la comprendre, de suivre la pensée du premier discours d’adieu de Jésus : une pensée qui progresse lentement avec ses redites, ses digressions, ses rappels et ses incursions vers le futur, avec ses mots-miroirs dans lesquels se reflètent à la fois le monde biblique et celui de l’humanité tout entière, leurs quêtes et leurs aspirations comme leur effroi devant le néant et l’absurdité. Une pensée difficile à saisir au travers d’un langage d’un autre temps et pourtant cohérente, ferme et rude, qui ne cherche ni à séduire ni à faire peur, mais est mue par la force de la vérité et de l’amour.Débordant sur les contours du passage que nous avons entendu, nous entreprenons une traversée rapide du premier discours d’adieu de Jésus, encadré par deux départs, celui de Judas disparaissant dans la nuit, et celui de Jésus et de ses autres disciples, se levant pour affronter cette même nuit. Ce premier discours constitue un tout, comportant les principaux enseignements donnés par Jésus. Les discours et la prière qui suivent en sont des reprises, avec des précisions et des approfondissements sur certains aspects. Une affirmation et un commandement dominent le premier discours. D’abord, l’affirmation de la glorification de Dieu par le Fils de l’Homme. Glorifier Dieu a été la mission de Jésus dans le monde, elle reste la mission du Crucifié et du Ressuscité et elle sera encore la mission de l’Esprit Saint, jusqu’à ce que cette glorification atteigne sa plénitude. La glorification de Dieu par le Fils ou le Fils de l’Homme est indissociable de la glorification du Fils ou du Fils de l’Homme par Dieu. C’est par cette glorification de son Fils que Dieu se fait connaître comme Père. Les paroles de Jésus comme les disciples auxquels elles sont destinées entrent dans le mouvement de la glorification mutuelle du Père et du Fils.Ensuite, le commandement de Jésus, « Aimez-vous les uns les autres ». Ce commandement est comme la porte qui fait entrer les disciples dans l’intelligence des paroles de Jésus et leur permet d’accéder à la réalité et à la vie que contiennent ces paroles. En même temps, le désir et la possibilité d’accomplir le commandement d’amour résultent de l’accueil et de la compréhension par les disciples des paroles de Jésus. Ayant ainsi, dès ses premières paroles, esquissé les traits essentiels de son discours, Jésus en vient à parler de la situation concrète et présente de ses disciples : « Je ne suis plus avec vous que pour peu de temps. Vous me chercherez et comme j’ai dit aux autorités juives : « Là où je vais, vous ne pouvez venir », à vous aussi maintenant je le dis.» Au-delà de la situation particulière de ses disciples, les paroles de Jésus visent la situation de tout être humain, considéré comme un être en recherche, en quête d’un chemin et d’un but. L’évangéliste Jean applique le verbe « chercher » à des situations et à des personnes diverses : aux disciples de Jean-Baptiste qui se mettent à suivre Jésus, à la foule et aux autorités juives -après la multiplication des pains, Jésus a dit à la foule : « Ce n’est pas parce que vous avez vu des signes que vous me cherchez, mais parce que vous avez mangé des pains à satiété », à Marie de Magdala se tenant près du tombeau à laquelle Jésus demande : « Femme pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? », jusqu’aux soldats venus arrêter Jésus, « Qui cherchez-vous ? », leur dit Jésus. Nous sommes ici au cœur de la tradition des écrits de Sagesse, dont le thème central se résume dans ce verbe « chercher », chercher le bien, le bonheur, la paix, la vérité, chercher Dieu dont le nom désigne l’horizon ultime de toutes les quêtes humaines en même temps que l’au-delà de tout ce que les êtres humains peuvent penser, désirer et réaliser. La sagesse est censée être le chemin pour atteindre ces buts et pour parvenir à Dieu. L’Évangile selon Jean identifie la Sagesse à Jésus, comme les autorités juives l’identifient à la Loi de Moïse. Dans le discours d’adieu, les disciples, et à travers eux tous les êtres humains, sont d’abord placés dans l’impossibilité de suivre Jésus qui est la Sagesse et le chemin vers Dieu. La tentative de Pierre de le suivre quand même se solde par un échec humiliant. Pourtant, l’intention de Jésus est bien d’ouvrir aux êtres humains le chemin vers Dieu, vers la vérité et la vie. C’est le sens de son encouragement : « Que votre cœur ne se trouble pas ». A partir de là, il leur délivre un enseignement, une catéchèse du « croire », qui commence également par une affirmation et une injonction : « Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi ». Jésus présuppose chez tout être humain une certaine foi en Dieu, telle que Luther l’a définie : Dieu est pour toi ce en quoi tu places ta confiance. Mais ce qui est décisif, c’est que la foi soit une vraie foi au vrai Dieu. La foi en Jésus ne vient pas s’ajouter à la foi en Dieu, mais elle donne un contenu, un sens et une vérité à cette foi, pour en faire une connaissance véritable de Dieu. Croire en Jésus et en sa parole est l’acte initial qui fait accéder à l’enseignement qui suit. Sans la foi en Jésus, la suite ne serait qu’un enseignement théorique et abstrait, une succession de mots et d’idées, sans qu’aucune réalité vécue ne leur corresponde. La foi en Jésus s’incarne et s’épanouit en une connaissance vraie, réelle et vécue de Dieu, en une communion d’amour et en un témoignage vivant. L’enseignement de Jésus, que nous nous contentons d’esquisser, se déploie en deux temps. Premier temps : Jésus est le chemin. Il est le chemin parce qu’il est la vérité et la vie, et il est la vérité et la vie parce qu’il est le chemin. Il est le chemin qui conduit à Dieu, en tant que Dieu est le Père qui aime le Fils et qui, en son Fils, aime les êtres humains et le monde. Nous avons la belle métaphore de la Maison du Père avec ses nombreuses demeures. Elle renvoie bien sûr au Temple de Jérusalem qui, bien que détruit au moment où écrit l’évangéliste, conserve toute son aura. Dans les paroles de Jésus affleurent celles du psalmiste exprimant, dans sa prière de pèlerin en chemin vers le Temple de Jérusalem, son profond désir de rencontrer Dieu, qui est source de vie et de joie, de le voir et de le connaître (lire Psaume 43, 3-5, dont Jn 14 semble être le commentaire). Jésus est à la fois le chemin et le Temple, où Dieu se laisse rencontrer et connaître dans sa vérité, dans une communion de vie, d’amour et de joie.Avec la prière, la promesse et les explications relatives à la venue de l’Esprit Saint, l’enseignement de Jésus aborde un second temps, un second mouvement, qui est moins la suite du premier que son autre face. « Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens à vous », dit Jésus à ses disciples. Le mouvement s’inverse : d’un mouvement vers le Père, il devient un mouvement vers les disciples, mais c’est toujours le même mouvement.La venue ou le retour de Jésus vers ses disciples peut avoir lieu à différents moments et selon différentes modalités. L’évangéliste insiste moins sur la diversité des venues de Jésus vers ses disciples, dans les apparitions du Ressuscité, lors de sa parousie à la fin des temps, dans la venue et la présence de l’Esprit Saint, au travers de la parole et du sacrement de la Cène, que sur ce qui est commun à toutes ces venues. « Je viens à vous » est une parole au présent, un présent qui englobe tous les temps et peut désigner n’importe quel moment.Qu’ont donc de commun toutes les venues de Jésus ? Le fait qu’elles sont en même temps des venues du Père, qui vient demeurer avec le Fils chez le croyant. « Si quelqu’un m’aime, dit Jésus, il observera ma parole, et mon Père l’aimera ; nous viendrons à lui et nous établirons chez lui notre demeure ». Le croyant qui aime le Fils et garde sa parole devient ainsi le Temple, dans lequel le Père et le Fils viennent demeurer. Peut-on mieux dire la communion intime et profonde entre le croyant et Dieu, au travers de la parole et de l’amour de Jésus ? Mais ici les paroles de Jésus suggèrent aussi une pente à laquelle il faut résister. C’est l’enfermement du croyant dans sa communion avec Dieu et Jésus, son isolement des autres et du monde, son repli dans une intériorité qui devient exclusive. La question de l’autre Judas mérite d’être entendue : « Seigneur comment se fait-il que tu aies à te manifester à nous et non pas au monde ? »Il faut d’abord se rappeler ce qu’a dit Jésus au début : « Croyez en moi ». La foi n’est pas abolie ou dépassée par la communion intime du croyant avec Dieu et Jésus. Cette communion ne devient jamais une propriété ou une qualité du croyant, elle reste de l’ordre de la foi, de la foi en la parole et la promesse de Jésus. A la fin du discours, Jésus exhorte encore ses disciples à croire. Si la foi prémunit le croyant contre la tentation de faire de Dieu, de Jésus ou du Christ sa propriété, que ce soit sous la forme d’une connaissance historique, d’une qualité spirituelle ou d’une orthodoxie doctrinale, la mise en pratique du commandement d’amour évite également cet enfermement. Jésus répond à Judas en l’invitant à l’aimer et à aimer les autres.Et, même si les discours d’adieu de Jésus sont placés sous le signe de l’opposition et de la haine du monde, le monde n’en reste pas moins le monde que Dieu aime et veut sauver, et le monde doit l’entendre, le savoir et pouvoir le vivre.Ce sont surtout la venue et l’action de l’Esprit Saint qui libèrent le croyant et la communauté chrétienne de la tentation de l’enfermement et du repli. Les discours d’adieu de Jésus dans l’Évangile selon Jean sont sans doute une mise en garde contre un double danger qui guette le croyant et l’Église : d’un côté le repli sur eux-mêmes, sur leur passé et leur identité, sur un Dieu, sur un Jésus ou un Christ dont ils ont fait leur propriété ; de l’autre des prophéties et des expériences qui vont dans tous les sens au gré des modes et d’individus qui imposent leur pouvoir à une communauté, en la séduisant ou en la culpabilisant. L’Esprit Saint est l’Esprit de vérité qui demeure auprès des croyants et des communautés, les enseignant, leur rappelant les paroles de Jésus et les gardant dans son amour et sa vérité, mais il est aussi l’Esprit qui procède du Père qui est plus grand que Jésus et vers lequel Jésus est en chemin. Comme Jésus et en communion avec lui, l’Esprit Saint est aussi le chemin, la vérité et la vie, le chemin vers le Père et le chemin du Père vers nous. Il ne peut être réduit à aucune expérience, à aucune qualité, à aucune connaissance, à aucune doctrine, à aucune institution, à aucun espace ni à aucun temps. Il élargit les cœurs, les intelligences et les vies aux dimensions du Père, de son amour et de son œuvre créatrice et rédemptrice pour sa création tout entière. « Il vous enseignera toutes choses », disait Jésus à ses disciples à propos de l’Esprit Saint. Et à Nicodème, il déclarait : « Ne t‘étonne pas si je t’ai dit : il vous faut naître d’en haut. Le vent souffle où il veut, et tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit ».