(Reprise)

Fête de la Réformation

 

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 Notes bibliques

 

Introduction 

La fête de la Réformation d’abord Luthérienne avec la commémoration de l’affichage des 95 thèses de Luther en 1617 a été reprise en France en 1866 par la Société d’Histoire du Protestantisme Français (SHPF) pour « bénir Dieu pour ses bienfaits inestimables » et « nous rappeler avec émotion et gratitude ceux qui ont souffert et n’ont point vu se réaliser ici-bas leurs espérances ».La date a varié : 1er novembre (Toussaint pour les Catholiques et jour férié) ou 1er dimanche de novembre pour éviter la confusion avec la journée de prières des morts.

Une liturgie adaptée et des cantiques sont mis en place pour le culte solennel et la collecte est versée à la SHPF. Cette fête institutionnalisée a eu des périodes d’apogée et de déclin dues à des causes politiques (guerres), idéologiques, théologiques, sociologiques (œcuménisme, fête des morts). Aujourd’hui, pourquoi ne pas réhabiliter cette fête qui commémore le grand mouvement de la Réforme par des rassemblements d’Églises locales, de consistoire ? Que ce ne soit pas qu’un culte mais que la date fasse date et que la fête soit fête.

Source : Article de Marianne Carbonnier-Burkard (IPT Paris) Études théologiques et religieuses 1988/3.

 

Note sur l’ensemble des textes

Psaume 34 :

Je bénirai l’Éternel en tout temps… j’ai cherché l’Éternel et Il m’a répondu… Écarte-toi du mal et fais le bien. Recherche la paix et poursuis-la.

 

Deutéronome 10 : exhortation à l’obéissance et à l’amour : que demande l’Éternel… votre Dieu… le Dieu des dieux : tu aimeras l’Éternel, ton Dieu et tu observeras tous ses commandements… Siracide porte sur l’écoute, par Dieu, de la prière du pauvre. 

 

2 Timothée 4 : Paul pense à sa mort prochaine : j’ai combattu le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi… C’est le Seigneur qui m’a assisté… fortifié, afin que ma prédication soit portée par moi à sa plénitude et entendue de tous les païens.

 

Luc 18, v 9 à 14 : parabole du pharisien et du péager : quiconque s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé.

Ces textes sont choisis en fait comme chaque dimanche, par souci œcuménique, selon les critères de nos frères catholiques (30ème dimanche ordinaire, Année C), ils ne sont donc pas censés porter les grandes découvertes de la Réforme ; mais l’un des miracles des Écritures consiste à porter presque partout en germe une approche du Royaume de Dieu, et la Réforme s’est attachée justement à valoriser, dans un esprit de prière et de confiance en la grâce de Dieu, cette Parole de Vie : confession de nos faiblesses, pardon, louange, foi et développement spirituel orientés vers autrui. Nous trouvons tout cela dans les textes du jour.

– Le psaume 34 pourrait être en grande partie utilisé en louange introductive, ou comme prière.

– Deutéronome pourrait dire la volonté de notre Dieu

.- Timothée nous parle de confiance totale vécue en Christ, jusqu’au bout !

– Enfin, Luc, cet apôtre de la prière, qui montre Jésus priant en tout temps et en tous lieux, dresse un portrait inoubliable de l’orgueil face à l’humilité dans le quotidien de nos vies de prière et d’action. 

Notes bibliques Luc, 18, v. 9 à 14
v.9 – Il (Jésus) dit encore contexte proche : la parabole du juge inique et de la veuve réclamant justice. Contexte large, la partie de Luc qui mène Jésus de Galilée vers Jérusalem.Texte propre à Luc ; De même Zachée, chap. 19, un autre péager.Autour, récits ou paraboles : questions d’attente, de prière, d’accueil, d’entrée dans le royaume …

Cette parabole Est-ce une parabole, une image, une comparaison, une fable, une métaphore, une allégorie … un récit qui explique, instruit, surprend, appel à conversion, argumente, révèle, donne à voir, à imiter… ? pour certains souligne le caractère polémique de ce qui va suivre persuadés en eux-mêmes, qu’ils sont des justes et méprisent les autres « traduire « en méprisant les autres »

v.10 – Deux hommes Jeu de figures parallèles et opposées, deux personnages typés, comme dans la parabole précédente. Notez l’absence de noms. montèrent au temple non indispensable pour prier, mais on y bénéficie de l’entraînement ou de l’émulation de la prière collective.pour prier L’élite et le paria, Le pharisien impeccable et le pécheur péager. Tous deux une quête, une requête.l’un pharisien l’autre péager consulter un lexique biblique ou par exemple le précieux petit livre de Bernard Gilliéron « Les gens du Nouveau Testament, Édition du Moulin »

l’un pharisien racine araméenne se séparer, expliquer, se distinguer, milieu souvent modeste, croyants convaincus, légalistes, stricts observants de la Loi, fustigés dans la mesure où ils se sont opposés au christianisme naissant ; éviter la caricature ! Tout en repoussant la casuistique légaliste des Pharisiens (cf. Mc 2,23-28), Jésus partagea à bien des égards leurs ambi­tions réformatrices ; il suscita leur intérêt (Jn 3,1), voire leur protection (Lc 13,31 ), et fut maintes fois invité à leur table (Lc 7,36 ; 11,37 ; 14,1).

Les controverses parfois assez virulentes qui les opposèrent (Mc 2,16-17.18-22.23-28 ; 7,1-23 ; 8,11-13.15 ; Mt 21,33-46 ; 22,15-22 ; 23,1-36) reflètent plutôt la situa­tion postérieure à l’an 70 où les relations entre judaïsme et christianisme se tendirent jusqu’à la rupture. (D’après B.Gilliéron) 

l’autre péager Le péager (collecteur d’impôt) a reçu en fermage, de l’occupant romain, la collecte de taxes ou d’impôts. Il travaille pour les païens. Considérés comme malhonnêtes, mais surtout, politiquement, socialement, religieusement mal vus, voire exclus, bannis, pécheurs. ( (Mt 11,19 ; Mc 2,15-16 ; Le 5,30 ; 7,34). Jésus s’est souvent compromis avec eux, ne craignant pas les sarcasmes : Cet homme-là fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux ! (Lc 15,2 ; cf. les trois paraboles qui suivent, 15,3-7.8-10.11-32).

L’un des collecteurs d’impôts, Matthieu ou Lévi, devint son disciple (Mt 10,3 ; Le 5,27-28). Quant à Zachée, un chef des collec­teurs d’impôts de Jéricho, il le reçut tout joyeux dans sa mai­son (Lc 19,1-10) (d’après B.Gilliéron)v.11 – le pharisien debout priait ainsi en lui-même O Dieu je te rends grâce car je ne suis pas comme le reste des hommesvoleurs, injustes, adultères ou encore comme celui-ci le péager.

Ne pas le taxer d’emblée d’hypocrisie, sa prière est eucharistique dans son entrée « O Dieu je te rends grâce »Mais il la pervertit en ce sens qu’il ne rend pas grâce pour ce que Dieu est et fait, mais pour ce qu’il fait lui. Hypertrophie du moi (emploi important du pronom « je »).Il confesse ses fautes surtout en confessant celles des autres.Il soliloque, il prie en lui-même, « devant lui-même ». Une prière narcissique. Sans doute à mi-voix. Il jjette un coup d’œil au péager …

Luc semble avoir repris la prière du pharisien d’une prière courante que l’on trouve dans le Talmud au premier siècle : »Je te remercie, Seigneur mon Dieu, de m’avoir donné part avec ceux qui s’assoient dans la maison d’enseignement et non pas avec ceux qui s’assoient au coin des rues. Car, comme eux je me mets tôt en route, mais je m’en vais tôt vers la Parole de la Loi et ceux-ci vont tôt vers des futilités. Je me donne de la peine, ils s’en donnent aussi : je me donne de la peine et reçois ma récompense ; eux se donnent de la peine mais ne reçoivent aucune récompense. Je cours et ils courent : je cours vers la vie du monde futur et ils courent vers la fosse de perdition.  » 12- je jeûne deux fois la semaine je paie le dixième de tout ce que j’acquiers.

Sa pratique est réelle, ascétique et scrupuleuse. Il jeûne deux fois la semaine, (le lundi et le jeudi) et donne le dixième de tous ses revenus.. C’est plus que ce que la Loi demande. Rien de « condamnable ».Le reproche vise ici l’orgueil de se croire juste et le mépris dont il fait preuve vis-à-vis des autres.

v.13 – par contre le péager Contraste !se tenait à distance n’osant même pas le vocabulaire souligne la crainte lever les yeux vers le ciel à l’écart, à « distance » les yeux baissés mais il se frappait la poitrine en disant : O Dieu Il commence sa prière par les mêmes mots. Tous deux reconnaissent le Dieu d’Israël, mais Il n’a rien à faire valoir devant Dieu sois favorable à moi le pêcheur Il est dans la catégorie des pécheurs. Sa prière n’est pas un discours mais un cri : Sois favorable à moi le pécheur (noter l’article « le » le pécheur connu !) En même temps que la reconnaissance de son péché, il exprime une revendication de dignité. Le pécheur : il ne pense pas aux autres et ne cherche pas la consolation dans le fait qu’il existe d’autres pécheurs. Il se réfugie dans la grâce : Sois favorable. Un mot rare dans le NT, le seul autre emploi est dans Hébreux. 2/17 avec la signification d’ «effacer les péchés du peuple », d’expier.

Une confession de foi ? C’est une supplication. Pas un repentir masochiste, mais une faim et soif de dignité reconnue.v.14 – Je vous le dis C’est la double conclusion interprétative. « Je vous dis » Jésus parle avec la voix de l’autorité du fils de Dieu ; Solennité devant les destinataires de la parabole.celui-ci descendit vers sa maison ayant été justifié. ayant été justifié, le passif d’un verbe surtout employé par Paul et moins par les évangélistes. Pas une justification judiciaire mais justifiante (Luc pouvait connaître Paul) Elle prend le sens de réconcilié, de réintégré dans la communion plutôt que celui-la. Une comparaison, le justifié rentre dans sa maison, mais le « plutôt que l’autre » laisse entendre que la porte n’est pas fermée au Pharisien (sans doute lui faut-il abandonner toutes les gloires qui l’encombrent …) Car quiconque s’élève lui-même sera abaissé celui qui s’abaisse lui-même sera élevé.

Redoublement de la sentence en reprenant une phrase déjà citée en Luc 14/11, dans la conclusion concernant les convives invités au repas.

Notion de renversement en lien avec le Royaume futur, même image dans le magnificat, avec le renversement riche/pauvre. (Luc 1/53). Cela donne une teinte « eschatologique » à la parabole (en lien avec les temps derniers, le dernier jour). Mais pour Luc, si le jugement de Dieu doit être révélé au dernier jour, il n’en est pas moins à l’œuvre.

 

Pistes pour une prédication
1/ Être justifié, ce n’est pas devenir juste en « faisant ce qu’il faut pour ça », c’est être regardé par Dieu comme si on était juste, alors que c’est impossible à l’homme.

Le péager ne fait rien d’autre que d’en appeler à la grâce de Dieu. Et cela suffit pour qu’il soit justifié : il découvre la gratuité de la relation que Dieu entretient avec nous. Oublions nos théologies, pour nous laisser porter par la grâce, dans la confiance, l’humilité et la reconnaissance.

2/ Comment prions-nous ? Prière tournée vers nous-mêmes (comme le pharisien qui dit « je »). Ou prière tournée vers Dieu (comme le péager). En d’autres termes : dis– moi comment tu pries et je te dirai qui tu es !

Dans tous les cas, quel que soit le moment de notre vie, notre état d’esprit, notre situation…, nous savons que Dieu est présent, qu’il nous écoute et nous accueille tels que nous sommes.

3/ Le thème de l’humilité peut être retenu. Mais voir dans cette parabole une exhortation à l’humilité spirituelle, risque de faire de l’abaissement une recette (il faut imiter le péager) et donc une œuvre. Ce qui nous ramènerait, d’une certaine façon, à l’attitude du pharisien (« Vois, Seigneur, comme je suis humble ! », c’est-à-dire à nous croire capables (en faisant de l’humilité une prescription) de nous justifier par nos propres moyens. Telle n’est pas l’attitude du péager, dont l’humilité ne relève pas de l’application d’une recette, mais de la pleine conscience de son incapacité à «se mettre en règle », à sortir seul de son enlisement. Ce qui l’amène à se tourner vers Dieu.

Voir aussi, dans les autres textes du jour, Dt. 10, 16 : « Vous circoncirez donc votre cœur, vous ne raidirez plus votre nuque» = transformation intérieure et humilité.

4/ Quelle attitude avons-nous à l’égard des autres en tant que chrétiens, en tant que protestants ? N’avons-nous pas toujours tendance à nous comparer aux autres, comme le pharisien ? : « Merci, Seigneur, de m’avoir fait protestant plutôt que catholique, réformé plutôt qu’évangélique ». Ou encore : « Merci Seigneur de ne pas m’avoir fait comme le pharisien de cette parabole »… ce qui revient en fait à se comporter comme ce même pharisien ! Or Jésus Christ nous dit que nous n’avons pas besoin de comparaison pour être aimés : Dieu nous aime tels que nous sommes. 

 

Prédication

Luc 18, v. 9 à 14 ; Dt 10, v. 12 à 11, v. 1

« J’ai fait un rêve… » Ainsi commence la célèbre prière du pasteur Martin Luther King. Rêve de fraternité entre les humains. Entre les Noirs et les Blancs, entre les habitants du Sud et ceux du Nord. Entre gens des campagnes et gens des villes, entre les hommes et les femmes, les croyants et les non croyants… et à l’intérieur même de l’Église : entre catholiques et protestants, ou évangéliques et réformés…

On peut allonger cette liste à l’infini, selon les situations, les époques. Fraternité rêvée… Et pourtant sans cesse compromise !

L’histoire en porte les traces, tragiques autant que sanglantes. Des cicatrices anciennes ou récentes, blessures sans cesse rouvertes… La fraternité est-elle donc vouée à s’échouer sur les rivages de nos rêves les plus audacieux ? Est-elle condamnée à mourir les bras en croix, ou une balle logée en plein cœur ? N’est-elle qu’un mot égaré sous la plume de quelque poète en mal d’utopie ? Ou encore une parole naïve, juste un peu d’air remué par des lèvres d’enfant ignorant du mal qui lui a déclaré la guerre ? Et que peut un enfant, face à l’abîme du mal ? À moins que quelque prophète bien inspiré ne s’en saisisse, et, d’un mot d’un seul, tienne tête aux fossoyeurs de l’humanité…

Mais celui-là qui rêve tout éveillé l’impossible fraternité – tant désirée pourtant – n’ignore pas les forces contraires qui s’agitent au dehors, et pas davantage celles qui l’habitent intérieurement. Aussi ses mots sont-ils condamnés à charrier dans leur sillage la boue de sa propre existence. Devrait-il se taire dès lors ? Certes non ! Celui-là parle de fraternité qui sait et la misère de son existence et la promesse qui sourd sous ses mots, promesse d’une terre réconciliée où s’embrassent justice et paix. (Psaume 85)

La fraternité germera de cette paix retrouvée avec soi et avec Dieu. Une paix qui advient non pas sur la base de savants discours, mais à partir de ces quelques mots que prononce le collecteur d’impôts de la parabole que nous venons d’entendre : O Dieu ! Sois favorable, à moi, le pécheur ! Cette prière, d’une simplicité désarmante, représente un seuil indépassable. L’humain ne peut pas aller plus loin. Quand il est rendu là, c’est comme s’il déposait les armes après un dur combat, ou qu’il revenait sur ses pas après une trop longue errance. Ce qui se passe ensuite, c’est l’affaire de Dieu. L’humain, lui, n’a rien d’autre à faire qu’à s’avancer vers Lui dans la nudité de ces paroles humiliées : Sois favorable, à moi, le pécheur ! Ce qui advient alors, peut-être le collecteur d’impôts n’en a-il pas encore une claire conscience… – pas encore du moins – mais nous, nous entendons, à travers les paroles que Jésus prononce alors, la parole libératrice entre toutes, celle qui console et relève tout à la fois tous ceux qui, s’abaissant ainsi, n’ont rien d’autre à offrir que l’aveu de leur pauvreté. Et tout à recevoir de Dieu : la grâce du pardon, cette eau jaillissante du cœur de Dieu, qui vient irriguer les terres désolées, et la joie du retour dans sa propre maison, qui signe la réconciliation de l’être au plus intime de soi. Celui-là parle de fraternité, qui sait et la misère de son existence et le pardon offert, gracieusement. Celui-là seul en parle véritablement, car il va alors en sa vie, réconcilié avec lui-même et avec Dieu, et peut alors construire la paix avec les autres. Voici ce que pourrait bien dire en substance, Jésus à «certains qui sont persuadés en eux-mêmes qu’ils sont des justes ». Pour eux, il plonge à corps et à cœur perdus dans la noirceur du monde, la noirceur des êtres. Car lui, ne se résout pas à voir la fraternité disparaître sous les décombres de la haine.

L’évangile d’aujourd’hui met en lumière cette haine qui avance masquée, impossible à discerner sous le vêtement de la justice. Impossible pour ceux-là même qui s’en sont revêtus. C’est là qu’entre en scène le Pharisien de la parabole. Lui, c’est l’homme pieux par excellence, le passionné de Dieu, le gardien de la foi dans toute sa pureté. Le Pharisien est un croyant véritable, « qui se plaît dans la loi du Seigneur et murmure sa loi jour et nuit », comme le chante le psalmiste. Un authentique croyant, fin connaisseur des Écritures. Alors… alors, comment expliquer qu’il soit à ce point oublieux que, sur terre, il n’est pas de justes ? Pas même un seul ! s’exclame l’auteur du livre de l’Ecclésiaste. Et comment expliquer qu’il soit à ce point aveugle qu’il ne voit pas la scandaleuse contradiction qu’il y a à faire cohabiter sous le même toit la justice et le mépris des autres ? Le récit d’aujourd’hui suggère une possible réponse, sans pour autant prétendre tout expliquer : Il se pourrait que ce Pharisien amnésique et aveugle le soit en raison même de ce vêtement de justice dont il s’est revêtu. Un vêtement qu’il a tissé lui-même avec le fil doré de cette auto persuasion qui lui tient lieu de croyance. Conforté par l’image que cet habit de vertus lui renvoie de lui-même – une image bâtie à la contre image de ceux qu’ils méprisent du haut de sa superbe – ne s’abuse-t-il pas lui-même en vérité ? C’est pour lui que Jésus parle à présent. Pour lui et pour tous ceux qui lui ressemblent. Pour vous peut-être… pour moi sûrement. C’est pour lui qu’il relance en avant la promesse bafouée, méprisée, qui renaît sur ses lèvres. Sans garantie aucune, si ce n’est la foi nue qui risque tout, qui donne tout… Jésus lui parle car, si ses yeux sont brûlés par le soleil qu’il est à lui-même, peut-être entendra-t-il ce qu’il ne peut plus voir ! Et la parabole dessine alors une scène étonnante : Deux hommes qui montent ensemble au temple… Deux hommes que tout sépare dans la vie, mais qui, dans l’espace du récit parabolique, peuvent cohabiter, le temps de le dire… Juste quelques instants qui pourront, peut-être, devenir le temps de la grâce…Ce collecteur d’impôts – sans doute un peu voleur, injuste… peut-être même adultère (en cela le Pharisien dit vrai) – c’est l’image d’une humanité compromise avec les puissants de ce monde. Cette humanité de laquelle le Pharisien s’est séparé, par amour de Dieu.

Mais peut-on seulement aimer Dieu tout en haïssant son prochain ? Le Pharisien n’est-il pas en train de se perdre dans les eaux troubles de son pieux mensonge ? En racontant cette parabole, Jésus tend en réalité un miroir à tous ceux qui sont persuadés d’être des justes. Ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui. Peut-être reconnaîtront-ils dans la figure de ce collecteur d’impôts le reflet de leur propre humanité déchue ? Jésus parle, et sa parole tente alors l’impossible, elle vient ouvrir un chemin dans la mer de leurs illusions, afin qu’ils puissent s’y engouffrer, et passer d’un « Moi je » solitaire, désespérément seul, au « Me voici » de ceux qui ne craignent plus de reconnaître ce qu’ils sont devant Dieu : non pas des justes, mais des pécheurs… c’est à dire des humains égarés, perdus – selon le sens premier de ce mot.

Ce sont leurs propres paroles qui lèvent alors le voile de cette pseudo justice qui les tenait éloignés d’eux-mêmes et de Dieu, perdus pour leurs frères. Mais c’est la parole du Fils – Parole de Dieu sur la terre déchirée des humains – qui leur donne d’entendre, au plus intime de l’être, dans ce «chez soi » retrouvé, le OUI du Père qui vient justifier leur existence, toute leur existence, aimée et désirée, depuis toujours, et pour toujours. Amen.

 

Cantiques suggérés

Avant la prédication :

  • AEC 536, Alléluia 36-22 : Seigneur, tu cherches tes enfants …
Après la prédication :

  • AEC 528, NCTC 243, Alléluia 36-08 : O Jésus, tu nous appelles …
En ouverture du culte (louange) ou en finale :

  • AEC 249, NCTC 260, Alléluia 42-03 : Béni soit le Seigneur…
 

 Thématique : Fraternité/Paix avec soi/Paix avec Dieu/Grâce du Pardon/