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Notes bibliques

Première lecture : Ex 32,7-11.13-14 

Le texte nous relate « le péché d’infidélité du peuple élu » quand, fatigué du Dieu invisible, il se fit de lui une image qu’on pouvait voir, toucher. Il se fabriqua une divinité en métal fondu, inspirée du dieu égyptien, le bœuf Apis que la Bible, par dérision, appelle un veau – et cela au moment où Moïse était encore sur la montagne pour recevoir de Dieu les signes de l’Alliance sacrée !Cet aveuglement du peuple provoque la colère de Dieu contre eux. Il veut maintenant les anéantir. Dieu nous est ici présenté comme une divinité colérique qui ne supporte pas qu’on ne le comprenne pas et qu’on ne lui obéisse pas au doigt et à l’œil. Il nous est présenté comme un père de l’époque patriarcale qui ne peut supporter que ses enfants le renient ainsi. Le texte d’évangile de ce jour nous proposera lui, une vision différente de Dieu. Jésus par la parabole parlera de manière émouvante de la figure du père de l’enfant prodigue. Moïse s’efforce alors d’apaiser Yahvé. Et ce qu’il dit à Dieu mérite que l’on s’y arrête : Il lui dit :

  • Pourquoi ta colère s’enflammerait-elle contre ton peuple ? Remarquez que Moïse est habile il rappelle à Dieu ses propres engagements :’’ ton peuple, celui dont tu es particulièrement responsable, que tu « dois » protéger’’.
  • Ton peuple que tu as fait sortir d’Égypte, de l’esclavage. Tu ne vas pas te contredire en l’écrasant après l’avoir délivré !
  • Le lectionnaire saute un argument qui ne manque pourtant pas d’habileté : Tu veux détruire ton peuple ? Mais alors, que vont dire les païens, quelle mauvaise image tu leur donnes de toi-même, celle d’un Dieu méchamment habile, qui sort les siens d’une mauvaise passe pour les jeter dans une pire !
  • Puis Moïse rappelle à Dieu qu’il a juré, promis de donner le pays de Canaan à son peuple ; juré aux grands patriarches Abraham, Isaac et Jacob. Il doit donc tenir sa promesse.

Moïse nous apparaît ici comme un homme audacieux, qui garde confiance en Dieu et qui n’hésite pas à dénoncer les apparentes contradictions de Dieu. Moïse serait-il en train de jouer avec le coté faible de Dieu ??? Et, plus impertinemment, cette faiblesse serait-elle son amour ?Le message de Jésus, dans le Nouveau Testament, semble le dire lui aussi. Nous découvrons ici un Dieu qui n’impose pas mais qui dialogue avec ceux qu’il aime. Il n’abandonnera pas son peuple, il ne laissera pas les siens. Il ne faut donc pas opposer le texte du Nouveau Testament avec celui du premier. Ils se complètent admirablement.

 

Deuxième lecture : 1 Tm 1,12-17 

Les Lettres de Paul à Timothée et celle adressée à Tite sont connues sous le nom d’épîtres pastorales, parce qu’elles s’adressent à des responsables de communautés qui exercent le ministère de berger. Nous sommes loin de l’élan missionnaire tous azimuts des premiers disciples. Il faut maintenant organiser les églises locales. … Timothée est né d’un père grec et d’une mère juive (Actes 16.1). Il n’est pas dit que son père était chrétien, mais Eunice, sa mère, et Loïs, sa grand-mère, étaient toutes deux connues pour leur foi sincère (comparez Actes 16.1 et 2 Timothée 1.5). Timothée habitait la ville de Lystre, dans la colonie romaine de Lyaconie en Asie Mineure, la Turquie actuelle. Paul fit probablement sa connaissance lors de son premier voyage missionnaire (comparez Actes 14.6). Depuis sa jeunesse, Timothée connaissait bien l’Ancien Testament et avait foi au Dieu d’Israël. Il est probable que Paul l’ait guidé vers la foi au Christ dont il est devenu disciple. C’est ainsi que l’apôtre devint son père spirituel au point où il l’appelle son véritable enfant dans la foi (1 Timothée 1.2) et son cher enfant (2 Timothée 1.2 ; comparez Philippiens 2.22). Timothée fut vite reconnu comme un candidat prometteur pour exercer un ministère au service de l’Église (1 Timothée 1.18 ; 4.14 ; 2 Timothée 4.5). Lors de son second voyage missionnaire, Paul le prit comme compagnon de route et il devint l’un des associés les plus fidèles de l’apôtre ainsi que son messager. Il vint même à représenter Paul lui-même, à être pratiquement son double en quelque sorte…La première lettre est intéressante par ses précisions sur les ministères, problème qui n’a jamais cessé d’agiter les Églises.Paul jette un regard sur son passé et se laisse aller à la confidence. Il dit notamment :’’Moi qui suis pécheur. Dieu m’a pardonné. Plus, il m’a fait confiance en me chargeant du ministère de l’évangélisation. Cette expérience personnelle, Paul l’appuie sur un petit Credo, tel qu’il en existait déjà de son temps, et qu’il introduit par une phrase-type que nous retrouvons souvent dans les lettres pastorales : Voici une parole sûre et qui mérite d’être accueillie sans réserve. Quant au petit résumé de foi, le voici : Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs. Donc il est venu me sauver, moi le premier, qui suis pécheur. Pécheur est à prendre au sens plus radical : vivre sans le Christ Jésus. Sans lui, notre vie s’en va à la mort, la seconde, la définitive. Avec lui Je suis sauvé. C’est sûr, et il me faut accueillir cette parole sans réserve, dans la joie de l’action de grâce, plein de reconnaissance. C’est bien là le motif profond du culte et le fondement de la vie nouvelle. Église avec ceux qui reçoivent la tache de la diriger doit vivre et annoncer cela. Elle n’existe que pour cela comme servante de son maître.

 

Évangile : Lc 15,1-32 Un évangile dans l’évangile, a-t-on dénommé ces trois paraboles de la miséricorde : celle du berger qui retrouve sa brebis, celle de la femme qui retrouve sa pièce d’argent, celle du père qui retrouve son fils prodigue.

 

1/la brebis perdue et la femme qui a perdu sa pièce Un berger a cent brebis. Ce n’est pas énorme, comparé aux milliers qu’avaient les riches. Une de perdue, cela compte ! Une femme (voyez comme Luc, quand il le peut, ne manque pas de mettre en valeur la femme) a dix drachmes. C’est bien toute sa fortune. Elle en perd une, l’équivalent d’une journée de travail. Pour elle, la perte est importante. Ainsi, Jésus nous explique comment Dieu voit le pécheur : le pécheur est quelqu’un que Dieu a perdu. Il appartient à Dieu pour lequel il est précieux. Quelle valeur, cet homme ! C’est l’avoir de Dieu qui se perd ! Jésus ne dissimule ni n’enjolive le péché : le pécheur est bel et bien dit tel. Mais Dieu ne le considère pas d’abord comme enfreignant une loi (c’est ainsi que le voyaient les pharisiens), mais comme son avoir qu’il a perdu… Peut-être ne sommes-nous pas tout à fait des brebis perdues, mais il se peut que nous manquions de ferveur dans nos efforts pour suivre le Berger. Nous sommes tous faibles et parfois nous nous détournons du droit chemin. Dieu nous cherche et nous attend. Il n’est pas seulement à la recherche des ‘’grands pécheurs ‘’ qui se sont éloignés de Lui. Il est là pour nous aussi, des chrétiens qui Le suivent, mais qui ont besoin de l’encouragement de ses appels et de la tendresse de son amour. Notre Père ne veut pas qu’un seul de ces petits se perde. Jésus nous enseigne aussi dans cet évangile à sortir à la rencontre des autres, à les aider à quitter le désert spirituel et humain qui les sépare de Dieu. Peut-être dépend-t-il de notre attitude que d’autres brebis reviennent au Christ? Attirons-les non tant par nos discours, mais par notre accueil fraternel.

 

2/ Sur le père admirable Cette parabole si connue ne cesse de nous étonner. Plusieurs choses sont importantes à la première lecture :

  • Qui est ce Père qui ne fait aucun reproche, ni au départ de son fils cadet, ni à son retour, ni au fils aîné jaloux ? Rembrandt a représenté ce moment de l’accueil où seul le cœur parle. Sur le tableau, le peintre a peint les deux mains du père sur le dos de son fils en pleurs et à genoux.
  • Pour qui y prête attention, l’une des mains est masculine, l’autre plus fine maternelle. La miséricorde de Dieu est à la fois paternelle et maternelle. Elle est infinie.
  • Nous sommes ici confrontés au mystère de la liberté de l’homme.
  • Un thème douloureux qui amène certains, à en perdre la foi.
  • Le texte évoque aussi le mal qui peut dominer l’homme si profondément et le conduire à détruire sa vie et la vie des autres.
  • Ce texte nous ramènera inévitablement à des situations concrètes dans nos vies personnelles, mais aussi dans la vie du monde, hier et aujourd’hui ! Ce mal qui entraîne l’homme dans des abîmes…
  • Mais au fond des pires abîmes, l’amour de Dieu est toujours là,
  • Il peut se réveiller, dans un moment de perdition.

Prédication

 

Parabole du Père qui donna sans compter et donna encore plus ! Luc 15, 11 à 32

Ah ! Ce texte de Luc 15, cette parabole, cette histoire émouvante que nous avons tant et tant de fois entendue…Dans ce récit, nous sommes plongés dans un contexte bien particulier : les pharisiens et les scribes trouvent que le maître a de bien mauvaises fréquentations (Luc 15/1-2). Il accueille les pécheurs et mange avec eux. Les péagers, les gens de mauvaise vie, bref, les pécheurs officiels, patentés, déclarés tels de manière irréversible dans les codes moraux de certains maîtres de la Loi à l’époque, sont assis à sa table. Alors, chers amis, vous qui travaillez au sein de nos entraides, il y a fort à parier que vous entendrez aussi dire de vous que vous avez de bien mauvaises fréquentations : vous vous occupez de sans papiers, de SDF  [s’ils le sont, c’est de leur faute], de petits délinquants [ils n’avaient qu’à ne pas faire ce qu’ils ont fait !] Peut- être même demain serez-vous suspects… Mais je n’irai pas jusqu’à vous dire de la part de Jésus : « réjouissez-vous lorsqu’on dira faussement de vous toutes ces choses à cause de moi », car je ne suis ni prophète, ni Jésus, mais je n’ai pas résisté à vous suggérer cette parole parce qu’elle vient vers nous au moment où nous avons l’impression que nous sommes en panne d’espérance.

Trois paraboles se suivent dans ce chapitre où reviennent comme un leitmotiv les mots « perdu et retrouvé » avec, chaque fois, une gradation : un sur cent, un sur dix, un sur deux. Apparemment l’objectif est d’amener ces auditeurs murmurants à se réjouir des retrouvailles avec ce qui était perdu, à découvrir le vrai visage du Père, à entrer dans une autre compréhension de l’humanité. Dans les diverses traductions de la Bible des intertitres ont été ajoutés à notre passage et induisent des optiques différentes pour le comprendre : « Le Fils prodigue », « La Parabole du fils retrouvé », etc. Alphonse Maillot notait que le titre le plus approprié pour cette parabole devrait être « Le Père aimant ». Peut- être est-ce d’abord en aimant que l’on ouvre à nouveau la voie de l’espérance…

La parabole révèle en effet que le fin mot sur Dieu réside en ceci : il est un Père aimant (cf. le Notre Père), son projet est bien que ses enfants apprennent à vivre comme des frères différents, membres d’une même famille, aimés d’un même amour… Beaucoup de membres de nos Églises ont tendance à se montrer critiques à l’égard des distancés de Église et de la société, de ceux qui ne prennent contact que pour un baptême, un mariage, un enterrement. Mais la liste ne s’arrête pas là. Il y a aussi ceux et celles qui sonnent à nos portes aujourd’hui, ne demandent ni baptême, ni mariage, mais disent très prosaïquement : « T’aurais pas un ticket de métro, un sandwich ou 100 balles ? » Les réflexes que nous pouvons avoir vis-à-vis de telles demandes sont extrêmement divers. Nous pouvons refuser, nous méfier de ceux qui nous sollicitent ainsi, mais nous pouvons aussi considérer que leur demande mérite d’être prise au sérieux au même titre que les demandes d’actes pastoraux. Dans le judaïsme, on estime qu’il ne faut jamais dire à celui qui nous sollicite pour une aumône : « Reviens demain… ». S’il venait à mourir dans la nuit, nous aurions sa mort sur la conscience. Il est vrai que l’Église, dans sa réalité sociologique institutionnelle, a toujours eu un peu de mal à entrer dans de nouvelles perspectives d’accueil envers les plus fragilisés ; il est vrai que cela ne s’est jamais fait sans débat interne. De même c’est aujourd’hui un débat réel et difficile dans notre société. Lorsque retentit à Paris, en 1878, la parole du pasteur Tommy Fallot dont la famille d’industriels avait participé à la vie d’une  » Société des amis des pauvres « , comme on disait alors ! et qu’il affirme qu’il s’agit d’aller au-delà de l’assistance, même utile et nécessaire, par une pratique sociale qui donne des signes du « Royaume »… il est inutile de souligner et de vous dire que ses paroissiens ne furent pas tous gagnés à cette manière de voir !

Ce récit de l’évangile de Luc nous provoque parce qu’il présente deux fils. Nous nous prenons souvent à imaginer que, dans son amour, Dieu nous a un jour regardés comme le fils prodigue. Mais ne sommes-nous pas plus souvent identifiables au fils aîné qui, lui, est resté bien cadré dans le système de valeurs qu’il a reçu et qu’il s’est donné ? Ce système, finalement, n’est pas si mauvais puisque son frère insouciant, dilapidant ses biens, en bénéficiera : il trouvera quelqu’un qui lui permettra de garder les pourceaux moyennant un salaire de misère ! Et c’est aussi parce que lui n’aura pas aliéné la part de bien qui lui revient que le Père pourra encore partager ce qui reste et ouvrir le fils repentant à l’espérance. Lorsque l’évangile de Luc est rédigé, dans les années 80, les communautés missionnaires sont composées de personnes qui sont d’origines extrêmement diverses, juives, païennes, émigrées, esclaves, un monde où les habitudes issues de la culture varient. Un monde où déjà les riches côtoient les plus pauvres. Les premières communautés chrétiennes témoignent bien de la dure réalité du « comment apprendre à vivre ensemble ? ».Comment vivre ensemble lorsque l’on est jeune, riche et bien portant et que l’on croise des pauvres, sans un sou, dont il y a fort à parier qu’ils ne mangent pas à leur faim ? Nos démocraties européennes ont inscrit dans leurs chartes et constitutions de grands principes visant à rendre cela possible mais il n’est pas déplacé de souligner qu’il y a encore bien du chemin à parcourir pour aller plus loin et le concrétiser authentiquement. ***

 

 

1/ Depuis vingt siècles les questions ouvertes par ce récit du Père admirable restent présentes et persistantes.

Il y a encore parmi nous des riches, des trop riches et des faibles, des pauvres, des cigales et des fourmis, des prévoyants et des insouciants… Alors y aurait-il un comportement qui serait digne de l’écoute de la Parole ? Un comportement modèle qui nous permettrait de mesurer l’insertion sociale correcte, unique modèle stéréotypé ? Un modèle unique et acceptable ? Face à cela, le récit qui met en confrontation les deux fils et le Père souligne que nous sommes avant tout frères. Frères et sœurs de celui qui frappe à notre porte. Nos associations d’entraide quels que soient leur taille, leurs aspects techniques, ne sont pas seulement des « services sociaux » mais des lieux qui rappellent que nous sommes responsables de nos frères. Église dans tout cela, même si elle n’a pas su le dire correctement quand il le fallait, ne le conteste pas. Par contre elle a du mal à le décliner et à l’actualiser. Aujourd’hui c’est dans le cadre d’un culte que nous nous retrouvons et nous entendons cette parole qui ne cesse de nous redire que nous sommes frères. Ce terme utilisé, me semble-t-il, 345 fois dans le N.T., ce terme inclusif qui compte aussi les sœurs, renforce l’idée selon laquelle Église est d’abord une grande famille où se retrouvent ceux qui viennent de tout horizon, de toutes les séparations, de toute religion. Mais, lorsque l’on a affirmé que Dieu est le Père de tous sans distinction, l’on a peut être dit quelque chose de très beau mais d’insuffisant car le plus dur reste à faire : comment le vivre et l’incarner ? La Bible parle souvent des déchirures de notre humanité fraternelle, pour souligner les combats, les oppositions, les haines. Les appels des prophètes dénonçant la spoliation et invitant à une véritable communauté fraternelle ne cesseront de se faire entendre et nous ramènent à une constante : « dans l’histoire de notre humanité, la fraternité est loin d’être idéale ». Lorsque nous nous engageons, comme l’a fait le Père de notre histoire, à réparer la faute du cadet, même si cela peut paraître abusif aux yeux de l’autre frère, même si le cadet semble avoir été aidé bien plus qu’il ne le faudrait, nous entrons dans une logique qui dit publiquement que nous ne pouvons pas vivre en acceptant la dégradation des conditions de vie des autres sans réagir. Lorsque nous nous engageons dans le processus global de ce que l’on appelle « l’entraide », nous sommes un peu comme le Père de cette parabole qui dit : « Certes ! Il y a eu du gâchis lié peut-être à une manière de vivre ou à des conditions sociopolitiques dont il serait vain et inutile de nier « l’efficacité » souvent destructrice. Peut-être aussi ce gâchis est-il dû à des fragilités psychologiques indéniables, peut-être même ce qui a été gâché ne pourra pas être totalement réparé, remplacé… Mais malgré cela une nouvelle manière de vivre est possible, imaginable : elle est à construire ! ». Elle ne peut naître que de la rencontre et de l’acceptation d’un consensus nouveau qui n’est jamais écrit par avance, qu’il faut donc inventer, mais, pour le faire, on ne part pas de rien. Il nous faut construire une fraternité qui accepte qu’il y ait des conflits, des divergences de vue ; une fraternité qui prend en compte les oppositions pour tenter et réussir à les dépasser ; une fraternité qui n’est pas béate mais combative, souvent même partisane et qui forcément devra re-poser ses fondements, revoir ses manières de faire et de vivre la solidarité ; une fraternité qui inévitablement fait des choix et vise non pas à maintenir la communion mais à la créer entre tous. 

 

.2/ L’histoire qui nous est proposée parle de réconciliation.

Des récits d’opposition, de jalousie, de destruction, de calculs, il y en a de nombreux dans la Bible, par contre les histoires qui évoquent la rencontre, les retrouvailles, la réconciliation, ne sont pas si nombreuses que cela. Nos Églises, nos œuvres et mouvements existent parce que nous sommes conscients qu’il y a là un enjeu plus que jamais actuel. Nous sommes conviés à créer, construire, mettre en œuvre une fraternité nouvelle. Et il paraît de plus en plus évident que ce travail nécessite la rencontre de personnes partageant des convictions politiques, religieuses et philosophiques différentes. Dans la crise de l’espérance, il y a nécessité de convergence, de dialogue, de propositions communes pour éviter les replis et les exclusions consenties. Si l’Église n’est pas en elle même un programme politique, elle ne peut se satisfaire des décisions qui créent des différences, des inégalités et renforcent les oppositions sociales. Elle ne peut accepter les éthiques à géométrie variable ; la dissociation entre une éthique politique utilitaire et une éthique qui s’inspire de l’humanisme ou du christianisme. Comme vous l’avez remarqué, le récit ne se contente pas de nous relater l’histoire malheureuse du Fils dit prodigue mais elle met en situation le Père. Nous n’allons pas nous engager dans une approche psychologique de la figure du Père qui agit comme un être vigilant qui guettera le retour de son Fils et saura le précéder sur le chemin de la réinsertion. Car, le récit le dit, le premier à reconnaître de loin le fils perdu est bien le Père, il l’embrasse, il est même rempli de joie. Finalement, par ce geste qui semble le livrer en spectacle, le Père dépasse l’indifférence humaine et reconnaît que l’autre souffre. Il entend sa plainte et lui fait droit sans compter. Il se fait alors le défenseur de celui qui n’a plus de voix car il s’est discrédité socialement. 

 

3/ La troisième chose que j’aimerais partager avec vous pourrait s’intituler « petit catéchisme à la portée de tous pour travailler à redonner l’espérance. » 

L’Évangile n’a cessé de nous le redire, le temps de carême le précise : « le fils de l’homme est venu chercher et sauver ceux qui étaient perdus» (ce et ceux). Alors le Père sur la trame de ce récit nous apparaît comme celui qui recrée un espace, un lieu où les enfants que nous sommes, comme celui de ma parabole seront à nouveau : AcceptésReconnusAimésCapables de refaire des projets. Oh ! Certes il n’est pas évident que l’aîné, l’autre fils soit gagné à l’idéal du Père. Il n’est pas dit que le fils prodigue ne souffrira pas des gens bien-pensants qui jugeront utile de lui rappeler qu’à un moment de sa vie il n’était qu’un déchet… Mais cela n’empêchera pas qu’il redevienne par une volonté délibérée, partisane, résolue, un membre à part entière de la société à laquelle il appartient. Ces mots, ces mots fragiles ne sont pas faciles, mais ils continuent d’être la base d’une théologie de l’espérance, d’ouverture à demain, d’ouverture à Dieu… d’ouverture à l’autre et finalement au Tout AUTRE. Amen

 

Thématique : Portrait du Père/Les 2 fils/Famille de l’Église/Réconciliation/Espérance.