Textes : Ps 23 Ézéchiel 34, v. 11 à 171 Corinthiens 15, v. 20 à 28 Matthieu 25, v. 31 à 46Pasteur Jean-Luc CremerTélécharger le document au complet

Notes bibliques

Quelques remarques.Matthieu nous parle ici de la nécessité des œuvres. Mais attention de ne pas glisser sur une mauvaise compréhension de ce texte. Les œuvres commises ont été réalisées sans que les personnes soient conscientes qu’elles les faisaient. Il n’y a donc pas l’idée de faire quelque chose dans le but d’obtenir autre chose.Matthieu insiste sur le secours aux autres. à travers ces propos, le texte nous fait faire un bond en avant vers la fin des temps appelée aussi la parousie. Ce texte est donc un récit eschatologique. (Avènement glorieux du Christ).Le fils de l’homme. Il est le juge eschatologique (de la fin des temps). Il a l’autorité (il est roi et siège sur un trône). Ses fonctions s’étendent sur le monde et non pas seulement sur le peuple élu.Le fils de l’homme est solidaire de ceux qui souffrent. Il n’est pas dit que ces derniers soient chrétiens.Ceux qui font le bien ignorent ce qu’ils font. Cela leur est révélé. Le verbe « faire » utilisé ici est « abad » en grec qui signifie faire dans le sens de servir.Dans le fond, pourquoi Matthieu décrit-il le jugement dernier ? Pour appeler les chrétiens à la vigilance active. Cet appel n’est pas dans un but de « gagner son paradis ». Pour Matthieu la foi s’exprime dans les œuvres. L’action est la conséquence de la foi. L’idée de mérite n’habite pas Matthieu car pour lui la faute de l’homme est trop grande et quoi qu’il fasse, rien ne peut le racheter si ce n’est la grâce seule de Dieu. Je le répète, les justes ignorent ce qu’ils font et qu’ils ont servi le Fils de l’homme en servant les déshérités.

Prédication

Nous avons de quoi être déroutés ce matin en entendant ce texte de Matthieu. En effet il nous parle d’un temps qui n’est pas encore arrivé. Il nous décrit aussi comment ce temps se passera, il nous décrit en particulier un temps de jugement où les élus et les damnés seront séparés à tout jamais. Alors quel est ce temps que Matthieu nous décrit ? Il s’agit ici de la fin des temps, appelé aussi la parousie. C’est le moment où le Fils de l’homme (comprenons Jésus-Christ) « viendra dans sa gloire avec tous les anges, il s’assiéra sur son trône glorieux. Toutes les nations seront rassemblées devant lui. » Est-ce que vous arrivez à vous imaginer la scène ? En tous les cas ce jour-là, le Fils de Dieu sera en gloire, et le malin n’aura plus son mot à dire, il sera rejeté à tout jamais. Le Christ triomphera et le bien aura gagné. Le texte nous dit aussi que tous les anges seront là. Je ne sais pas combien d’anges habitent le « ciel », mais ce jour-là ils seront tous là avec Jésus qui sera assis sur son trône. Ainsi c’est bien en tant que roi du monde que le Christ prendra place devant toutes les nations. Ainsi les pouvoirs seront renversés sur la terre, les choses qui ont le plus de valeur pour les humains n’auront plus lieu d’être, un nouveau temps commencera et Jésus triomphera. Tout cela semble incroyable, majestueux, grandiose, et personnellement je dirai que cette description me fait un peu peur. Car en effet, rien de ce que je connais de concret, de réel n’est expliqué dans ce début de texte. Le Fils de l’homme qui vient. En fait, il vient d’où ? Sûrement de là où il est allé le jour de l’Ascension quand les textes et les hommes parlent du ciel. Donc il viendrait du ciel. Et le ciel, je ne sais pas trop ce que c’est. Est-ce là où vont les morts ? Je crois que dire le ciel, c’est une façon d’exprimer quelque chose que nous n’arrivons pas à décrire mais qui signifierait être avec Dieu. Et là, il y a des anges. Les anges, qui peut dire qui ils sont ? Pourtant régulièrement j’entends des personnes raconter qu’à tel ou tel moment de leur vie elles ont été protégées par leur ange gardien. Oui, les anges et le Fils de l’homme sont des réalités comprises et ressenties dans la foi, que beaucoup de nos contemporains ne connaissent pas. Alors ce jour-là, le Fils de l’homme et les anges seront là et toutes les nations seront présentes. Les nations, j’arrive mieux à me les imaginer car elles représentent les civilisations, les pays, enfin bref, tout ce qu’il y a sur la terre. Donc tout le monde sera là face à celui qui est assis sur le trône, en attente de son jugement. Car c’est bien un jugement qui est décrit dans notre texte. « II séparera les uns des autres comme le berger sépare les moutons des chèvres. Il mettra les moutons à sa droite et les chèvres à sa gauche. Alors le roi dira à ceux qui sont à sa droite « venez, vous qui êtes béni de mon Père ; héritez le Royaume qui a été préparé pour vous depuis la fondation du monde…. Ensuite il dira à ceux qui sont à sa gauche : « Allez-vous en loin de moi, maudits, dans le feu éternel préparé pour le diable et pour ses anges ». » Ce jour-là, la joie ne sera pas pour tout le monde et je ne peux m’empêcher de me demander de quel côté je serai ? Ce qui est aussi remarquable, c’est que celui qui est assis et qui donne le jugement a l’autorité sur toutes les nations. Et les élus et les autres obéiront et se soumettront à son autorité. Car son jugement ne vient pas de lui seul, mais de son Père. Ainsi le Fils de l’homme est comme un Fils envoyé par son père pour aller donner le jugement sur les nations. Et encore une fois Dieu est appelé « père ». Oui, ce jour-là, qui sera parmi les élus ? Qui sera parmi les damnés ? Savez-vous qu’au Moyen-Âge en particulier la peur de l’enfer et de faire partie des damnés était ce qui habitait l’esprit des hommes en Europe. Et cette histoire du jugement dernier été utilisée par l’Église pour justifier le rachat des péchés. Et pour sortir de cet enfer, de ce lieu infernal du péché, l’Église prônait la rédemption par les œuvres et l’achat des indulgences. Pour sortir de cette condition humaine vouée à la perdition, la solution était de s’approcher de Dieu. C’est ainsi qu’en devenant moine, on sortait de « la masse » pour s’élever. Un moine allemand, Luther, ne s’est pas contenté de se retirer du monde pour vivre dans un monastère, il est devenu docteur en théologie, a appris le grec et l’hébreu. Mais plus sa connaissance théologique s’approfondissait, plus il sentait qu’il s’éloignait de la vérité. Plus il était tourmenté. Jusqu’au jour où en lisant l’épître au Romains il a compris que la mort et la résurrection du Christ le rendaient juste aux yeux de Dieu. Qu’il n’avait rien à faire pour être sauvé. Il avait seulement à reconnaître qu’il était pécheur et pardonné. Mais je ne vais pas aller plus loin dans l’époque du Moyen-Âge, pour revenir avec vous sur ce texte. Nous avons donc entendu que deux groupes seront constitués : d’un côté les bénis du Père et de l’autre les maudits qui iront brûler dans le feu. Mais sur quoi donc ce jugement sera-t-il prononcé ? Qu’est-ce qui fera que certains seront, disons, du bon côté, et d’autres du mauvais ? Eh bien, à la première lecture du texte, je dois vous avouer que je suis un peu déçu. Oui, j’aurais aimé lire une phrase du type : Ceux qui ont donné leur vie à Jésus-Christ seront à la droite du Fils de l’homme. Ou bien : ceux qui ont reconnu Dieu comme Père, seront à la droite du Fils de l’homme. Car je crois profondément que le salut est offert à tous ceux qui reconnaissent Jésus-Christ comme leur Seigneur et Sauveur. Et je suis dans la même communion que le réformateur Luther. Mais alors ce n’est pas ce que me dit le texte de Matthieu, ce matin. Non, vous l’avez entendu comme moi, seront sauvés du feu éternel, seront bénis du Père, seront héritiers du royaume ceux qui, … écoutez bien : Relire les versets 35 à 37. C’est sur ce que les hommes ont fait que sera basé le verdict final. Alors il faut faire de bonnes actions pour être sauvé ? Je crois qu’il faut lire et relire ce texte avec attention. Ici, le verbe utilisé pour « faire », se traduit par le verbe « servir ». Il ne s’agit donc pas de faire, mais de servir. D’être en dessous de celui vers qui nous destinons notre attention. Il ne s’agit pas de se tourner vers les plus démunis d’un air hautain, ou dans l’idée de faire une bonne action, ou encore dans l’idée de mériter quelque chose. Non il s’agit de se tourner vers les autres et de les servir. D’être au service de celui qui est nu, qui a soif, qui est étranger, qui a faim, qui est malade. Il s’agit d’être à sa disposition, de s’incliner devant lui, comme le font les serviteurs. Et puis, surtout, ceux qui servent ne sont pas conscients de ce qu’ils font. Ils le font avec un élan du cœur. Ils le font sans retenue. Ils le font spontanément. Ils le font sans rien attendre en retour, même pas un merci. Ils le font par compassion. Ils le font parce qu’ils ne supportent pas la souffrance des autres. Vous me direz que ce service là est exigeant. Et qui de nous ici peut dire que tout ce qu’il fait envers les plus démunis est libre de toute arrière-pensée ? En tous les cas si je suis honnête avec vous, je vous dirai que je ne suis pas toujours dans une belle disposition de cœur, avec toujours un esprit de service. Pourtant il y a des hommes et des femmes qui à la fin des temps seront bénis parce que Dieu aura vu leurs cœurs lorsqu’ils ont aidé leur prochain. Mais qui sont-elles donc ces personnes ? Qu’est-ce qui leur permet d’agir dans cet esprit de service et de désintéressement ? Je crois simplement que c’est parce que j’étais un jour malade à l’hôpital et que quelqu’un est venu me visiter, que j’étais dans une situation de faiblesse et qu’une personne m’a mis à l’honneur, qu’alors à mon tour, je peux aller visiter. Parce qu’un jour j’ai eu faim et une personne m’a invité à sa table et m’a honoré d’un bon repas, aujourd’hui, je peux offrir à manger à celui qui à faim. Parce qu’un jour j’étais étranger dans un pays où je ne comprenais rien à la langue aux coutumes, aux codes, abandonné de tous, j’ai été pris par la main pour faire des démarches avec le sourire et beaucoup de patience, aujourd’hui je peux donner du temps pour accompagner ceux qui arrivent et qui sont perdus. Parce qu’un jour j’étais dehors, dans le froid de l’hiver, sans savoir où dormir, et quelqu’un m’a ouvert sa porte m’a proposé une douche et un bon lit, alors je peux ouvrir moi aussi ma maison pour accueillir. Parce que j’étais en prison, seul, banni de la société, et quelqu’un est venu me visiter, me dire que j’existe, alors moi aussi je peux aller visiter les prisonniers. Ainsi, c’est parce que je me reconnais pécheur, perdu. Parce que je me reconnais un blessé de la vie. Parce que je reconnais que sans l’autre qui vient à mon secours je ne suis rien, je peux alors à mon tour partager ce que j’ai reçu. C’est parce que je reconnais que je ne peux pas me sauver moi-même et que j’accepte l’amour du Christ dans ma vie, que je peux alors à mon tour partager cette Bonne Nouvelle avec tous ceux que je rencontre. Ceux qui seront bénis, ce sont ceux-là mêmes qui se sont reconnus en attente et qui une fois rassasiés se sont tournés vers les autres. Et comme l’a dit Luther à la fin de sa vie : « Celui qui évangélise, c’est un mendiant qui dit à un autre mendiant : « là-bas il y a du pain ». » Amen.