Textes : Ps 104 Ac 2, v. 1 à 11Galates 5, v. 16 à 25 Jean 15, v. 26 à 27 & 16, v. 12 à 15Pasteur Jean-Jacques BonnevilleTélécharger le document au complet

Pentecôte

Notes bibliques

Je n’oublie pas qu’en ce dimanche de Pentecôte dans nombre de paroisses sont accueillis les catéchumènes. * Luc 24/49, Actes 1/8 rapportent l’ordre laissé aux disciples de rester à Jérusalem. C’est là qu’ils recevront cette puissance qui fera d’eux collectivement des témoins. Contrairement à Luc 9/1-6, ce n’est pas deux par deux mais ensemble qu’ils seront témoins. Contrairement à Luc 9/1-6, ce ne sont pas les seuls douze qui vont devenir témoins mais tous ceux qui sont rassemblés (les 120 de Ac 1/15) dont font partie entre autre le nouveau disciple (Matthias, Ac 1/26) et la famille de Jésus (Ac 1/14).

  • Les phénomènes de type charismatique n’étaient pas absents dans l’église primitive. On en trouve trace dans 1 Corinthiens 12, donc avant que Luc n’écrive son évangile. Veut-il par son récit dire que cette expérience a été donnée en premier aux disciples et à ceux qui les accompagnaient ?
  • Luc fixe cet élan missionnaire à Pentecôte. Pentecôte est une fête célébrée au début de la moisson (50 jours après la Pâque au cours de laquelle est offerte une première gerbe, celle des prémices, Lévitique 23/10). Le rituel de la célébration de Pentecôte se trouve en Lévitique 23/16-21. Cette offrande des prémices de la moisson était sans doute commune à bien des religions. Ce n’est que plus tard que la tradition judaïque en a fait la fête du renouvellement de l’alliance du Sinaï et de toutes les alliances renouvelées par Dieu avec son peuple.
  • Lorsque Jésus reçoit l’Esprit, lors de son baptême, il se manifeste de façon visible (une colombe) Luc 3/22, mais conduit Jésus au désert, au silence. À Pentecôte l’Esprit se manifeste de façon visible (langue de feu) et conduit ceux qui le reçoivent à parler. Langue (de feu) en grec même terme que la langue utilisée par les hommes pour communiquer (v6). Dieu communique, parle à ceux qui sont rassemblés et sa Parole brûle leurs lèvres, ils ne peuvent la retenir, elle les réchauffe, une présence qui donne confiance et courage.
  • La glossolalie dont il est ici question n’a rien à voir avec celle dont parle Paul (1 Co 12 et 14). Ici pas besoin d’interprète, le langage est compris de ceux qui parlent la langue dans laquelle on s’adresse à eux. Le message est universel, pas la langue (le phénomène n’est pas une incitation au retour vers Babel).
  • La confusion, la cacophonie est facilement imaginable au point de faire penser à certains que tous ces gens sont ivres. Peut-on imaginer ce que donnerait 17 personnes parlant des langues différentes et désireuses de se faire entendre de ceux qui parlent leur propre langue.
  • Toutes les personnes qui sont à Jérusalem y sont pour fêter Pentecôte, ce sont donc des juifs v5 (voir aussi les premiers mots de Pierre : vous juifs (Ac2/14). Ils viennent de la diaspora, des quatre coins du monde, c’est à eux d’abord qu’est destinée la parole proclamée. Et c’est par eux que le christianisme s’étendra vers les « païens » (de pagus : pays) ; Voir l’histoire et le chemin de l’apôtre Paul.
  • On doit encore noter l’enfermement initial : ils étaient ensemble dans la maison v.1 et 2 et noter l’ouverture à tous ceux qui sont là. Les portes de la maison se sont ouvertes !
  • Nous ne savons rien du message donné par ceux qui ont parlé : ils parlent des merveilles de Dieu. Quelles sont-elles ? Les évangiles nous avaient bien habitués à ne rien savoir de ce qui était dit cf. Marc 1/21, 2/2…, on peut toujours imaginer mais…. !
  • Pour ce qui est des fruits portés par ces annonces des merveilles de Dieu… certains se moquent v 13, d’autres se questionnent : que veut dire ceci v 12 ? Il faudra la prédication explicite de Pierre pour que la communauté grandisse. Notre prédication de Pentecôte pourra peut-être éveiller une curiosité, questionner… elle ne sera pas suffisante pour remplir nos temples la semaine suivante, inutile donc de vouloir tout y mettre et tout dire en 10 minutes. L’essentiel est sans doute d’être compris de tous ceux qui participent au culte quelle que soit leur origine confessionnelle, sociale, culturelle. Tous ceux qui étaient à la première Pentecôte avaient une racine commune : leur judaïté, il n’en sera pas de même dans nos cultes de Pentecôte 2009.

Prédication

Aujourd’hui PENTECOTE ! ! ? ? Noël on sait à peu près ce qu’il s’est passé. La naissance de Jésus que les chrétiens nomment Christ. Pâques ? Peut-être un peu moins, c’est pourtant le cœur de la foi chrétienne : Le Christ qui était mort est ressuscité. L’Ascension ? C’est plus dur (c’est normal pour une ascension !) Cette fête chrétienne nous dit que le Christ a quitté notre condition humaine pour aller vers son Père, il n’est plus présence physique au milieu des siens, sa présence est spirituelle. Pentecôte ? Si on n’est pas participant à la vie de l’église, on ne sait en général pas qu’il s’agit du don de l’Esprit aux premiers chrétiens. Si vous êtes de Nîmes, Pentecôte, on vous dira : feria, si vous êtes à Pau on vous dira : course automobile, le grand prix historique, ailleurs on vous dira autre chose lié à l’histoire ou la tradition locale. Et, si vous rencontrez des protestants réformés, ils risquent bien de vous dire : accueil des catéchumènes ou première communion. Ce matin nous sommes dans ce temple pour un temps de culte, comme nous y sommes invités chaque dimanche, un temps où nous souhaitons écouter une Parole pour nos vies, et regarder devant nous avec espérance. Pour certains d’entre nous ces rassemblements du dimanche font partie de l’histoire, ne font plus partie de la réalité mais rappellent quand même de bons souvenirs d’enfance et nous retrouver ici secrète un brin de nostalgie, un peu comme un grand prix historique. Pour d’autres peut-être, face aux événements du monde, aux catastrophes, se retrouver dans ce lieu est un moyen de chercher une protection, un secours, une aide, et sortir de la sombre réalité de chaque jour pour s’enquérir d’une parole d’espérance qui puisse donner du sens à une vie. Pour d’autres encore, il est une certitude, Dieu à travers les témoignages qui nous sont rapportés dans la Bible a quelque chose à nous dire sur nos façons d’être et de vivre. Pour d’autres, dans leur relation à Dieu, ce temps d’écoute et de louange, de prière et de silence, ce temps partagé avec d’autres est nécessaire et c’est une fête qui vaut la feria. Nous sommes ici, ensemble, avec des motivations différentes, avec des attentes différentes et c’est bien ainsi que nous constituons l’Église de Jésus-Christ. L’Église n’est pas un lieu de pensée unique, réservée à certains, elle est et veut être un lieu ouvert ou chacun avec ses interrogations ou ses certitudes puisse se sentir accueilli et reconnu, invité et attendu. Dans notre relation à Dieu elle est un lieu d’écoute et dans notre relation aux autres un lieu de partage. Aujourd’hui elle est en fête dans bien des paroisses parce que des jeunes vont signifier leur désir d’appartenance à cette église. Toujours est-il qu’au cœur de cette journée voici venu le temps de l’écoute, de la méditation de la Parole qui de témoignages en témoignages est parvenue jusqu’à nous. C’est cette parole qu’au long des années d’école biblique, de catéchisme nous essayons de décrypter. C’est elle que dans les différentes activités de la paroisse et au cours de nos cultes nous interrogeons pour chercher ce que Dieu attend de nous, pour donner une direction à nos chemins de vie. Ainsi nous apprenons que vivre avec Dieu est une aventure, vivre en suivant les patriarches, les prophètes, le peuple hébreu, vivre en suivant Jésus-Christ, c’est choisir de marcher sur un chemin où des choses inattendues peuvent arriver, arrivent, des choses souvent étonnantes et parfois déconcertantes. La Parole qui rapporte tout cela, toujours, m’interpelle. Elle interroge ce que je dis et ce que je fais, comme elle questionne mon église et le monde dans lequel je vis. Il y a des moments où je trouve en elle ce qui fait avancer ma réflexion sur le sens de la vie, d’autres où elle ne me dit rien. Qu’en sera-t-il aujourd’hui ?… ; revenons à notre texte. Juste avant l’Ascension, les disciples sont rassemblés avec Jésus. Ils reçoivent une promesse : « vous recevrez une puissance, celle du St Esprit survenant sur vous, et vous serez mes témoins… » Cette promesse est donnée et Jésus disparaît. Vivre d’une promesse, c’est difficile. C’est difficile pour les disciples au moment de l’Ascension parce qu’ils espéraient que leur monde allait changer grâce à Jésus. Cette disparition les place dans une situation de fragilité et de questionnement. Ils vont s’enfermer dans leur maison comme il peut nous arriver de nous replier sur nous-même lorsque les choses ne se passent pas comme nous le souhaitons, comme il peut arriver à l’Église de se replier sur elle-même quand elle ne sait plus ce qu’elle doit dire et faire, quand elle n’ose pas ou ne veut pas risquer une parole dans le monde, quand elle refuse de devenir missionnaire, envoyée comme témoin. C’est quand ils sont dans cette situation de scepticisme, de repli que l’Esprit Saint va leur être donné. Alors qu’ils tournent à vide, fatigués et sans énergie mais dans l’attente de la réalisation d’une promesse, l’Esprit, le souffle de Dieu vient les réanimer. Une image, remplie de symbole, nous est donnée, l’Esprit qui descend sur eux est comparé à du feu. Le feu certes peut détruire, mais il rend aussi la vie plus douce. Il permet entre autre de s’éclairer, de se réchauffer en hiver. « La Parole de Dieu est un feu dévorant » disaient les prophètes. J’aime bien cette image, elle me fait penser à un écobuage, cette pratique des hommes de la terre qui consiste à la fin de l’hiver à brûler tout ce qui est mort dans la nature pour permettre à des pousses nouvelles de croître. Pentecôte c’est un peu cela pour les disciples rassemblés. L’Esprit de Dieu, comparé à du feu, va brûler en eux tout ce qui les retenait enfermés dans leur chambre haute. Il va nettoyer tout ce qui en eux n’était pas porteur de vie, il va les faire aller vers les autres. Plus que cela, ce feu de l’Esprit de Dieu va éclairer leur vie. La peine, le doute, la souffrance dans lesquelles ils étaient plongés, la peur dans laquelle ils étaient va être éclairée par cette présence de Dieu. Ils vont pouvoir trouver le chemin pour sortir de l’obscurité et cette lumière va les conduire vers les autres pour témoigner. Ce feu de l’Esprit, les réchauffe, les fait sortir de leur hibernation pour aller témoigner de la vie qui remporte la victoire sur la mort ; il va leur permettre de regarder et de parler à ceux qui sont autour d’eux. Ce feu de l’Esprit va changer leur vie. De repliés sur eux-mêmes, ils vont sortir et porter la lumière et la chaleur de Dieu aux hommes et aux femmes de leur temps d’où qu’ils viennent, quelle que soit la langue qu’ils parlent. Les disciples attendaient, les bras croisés dans leur chambre haute que Dieu agisse, c’est déjà important d’attendre avec impatience que la volonté de Dieu se fasse, mais l’Esprit de Dieu les pousse à ne pas rester spectateurs, il les conduit à devenir acteurs. Il veut leur donner assez de force, assez d’imagination et d’amour pour être ceux qui peuvent étonner et questionner les hommes de leur temps. Ce même Esprit de Pentecôte nous est donné à nous aussi. Ce feu de l’Esprit qui vient de Dieu, dans notre texte, se partage et donc se multiplie pour que chacun le reçoive. Nous n’en avons qu’une parcelle, c’est dans la communion avec les autres que nous percevrons la plénitude de Dieu, nous n’avons pas seuls la vérité, mais chacun individuellement nous sommes importants, avec nos questions et nos affirmations, avec nos doutes et nos certitudes. Le baptême et la communion signifient tout cela. Le témoignage individuel comme le témoignage de l’Église sont ce à quoi nous sommes appelés. Nous avons l’habitude de dire que Pentecôte est le point de départ de l’Église missionnaire, de son ouverture. La nôtre n’est sans doute pas l’Église idéale ; comme disait Marcel Manoël lors d’un synode, « elle est formée de gens ordinaires, rassemblés parce qu’ils ont reçus un appel ou qu’ils font partie de la famille, parce qu’autrement ils seraient seuls dans la vie ou parce qu’ils trouvent là un lieu de militance, parce qu’ils y sont reconnus et que ça leur fait plaisir ou au contraire parce qu’on ne les sollicite pas trop et ça les rassure, elle est formée de gens ordinaires, normaux, avec leurs passions et leurs fatigues, bref par des gens comme vous et moi ». Je crois que l’église, notre église, est habitée du feu de l’Esprit de Dieu dont nous avons parlé, même si ce n’est pas la seule. Elle a une parole à dire dans les moments de joie ou dans les moments difficiles de la vie, elle doit aussi avoir une parole questionnante et même dérangeante dans notre monde. Je vous souhaite d’y trouver votre place, elle a besoin de tous pour remplir sa mission au service de Dieu et des hommes, elle a besoin de tous pour vivre la mission qui lui est confiée : témoigner…. des merveilles de Dieu.