Textes : Ps 24 Apocalypse 7, v. 2 à 141 Jean 3, v. 1 à 3 Matthieu 5, v. 1 à 12Monsieur Jacques ValluisTélécharger le document au complet

Les béatitudes

Notes bibliques
  1. Bibliographie :
  • L’évangile du Royaume, Hebert ROUX, Labor & Fides Genève, 1956.
  • L’Évangile selon Matthieu, Pierre Bonnard Labor & Fides Genève, 1982.
  • Vocabulaire biblique, Collectif sous la direction de J.J Von Allmen, Delachaux & Niestlé, Neuchâtel Paris, 1964.
  • Les Béatitudes, Daniel Bourguet, Réveil Publications.
  • Théodore Monod in. Revue Itinéraires n°49 Automne Hiver 2005
  1. Textes :

« Imaginez que le sermon sur la montagne devienne la règle de vie de tous les hommes, « à commencer par les chrétiens : le lendemain, il n’y aurait plus ni guerre, ni « esclavage, ni torture, ni cruauté. « C’est là l’évidence ! « Mais bien des choses nous empêchent d’appliquer le sermon sur la montagne. « Voilà pourquoi je n’ai jamais dit que le christianisme avait échoué, j’ai toujours dit « qu’il n’avait pas encore été essayé. « Le jour où nous essaierons le christianisme, ce jour là quelque chose se produira : le « monde changera. « Pour l’instant, ce n’est pas le cas, alors soyons modestes ! »

  • Michel Bouttier, article « Heureux » in vocabulaire biblique (cf. Supra).

« 2- Nouveau Testament « Ici s’ouvre le drame eschatologique : en Jésus Christ c’est l’avènement du « Royaume qui s’accomplit .Désormais le bonheur est lié à cet évènement exclusif « et décisif qui inaugure la venue du Messie. Le destin du monde prend un tour « dramatique, une séparation inattendue, étonnante s’opère entre les hommes : « Heureux ceux à qui il est donné la suprême intervention de Dieu et d’y prendre « part ; malheur à ceux qui passent à coté de la Bonne Nouvelle ! « … « Tout ceci se trouve comme récapitulé dans la proclamation royale des Béatitudes « (Mat. 5.3-12 ; Luc 6. 20-23 et leurs antithèses dans Mat.23, 13-33 ; Luc 6,24-26). « Leur accent solennel provient du renversement catastrophique des valeurs « établies. « Paradoxes, oui, car elles saisissent le présent à la manière du futur, et voici qu’en « Jésus Christ, le futur est là ! « Le bonheur promis n’est pas un hypothétique lot de consolation, c’est la parole de « celui qui peut voir et juger le présent à partir de la dernière heure. « Alors que les riches, les puissants les pharisiens se trouvent les mains vides (cf. la « prophétie du Magnificat, Luc 1.51 sq.) les pauvres, les humbles, les affamés se « trouvent brusquement être les heureux : Rien d’autre ne peut les combler que la « venue du Royaume. « De par leur condition humaine et sociale (Luc) comme de par leur attitude « intérieure (Mat.), ils attendent et comptent sur quelqu’un d’autre. « Les voici donc destinataires de l’évangile. « C’est pour eux que vient le Roi, crucifié et ressuscité ; ils sont en conformité avec « lui. « Leur cause se révèle liée à celle de Dieu. »

  1. Suggestions pour la liturgie

3.1 ChantsPsaume 33 : « Réjouis-toi peuple fidèle », strophes 1, 3 & 5AEC 624, NCTC 247, Alléluia 41-11 : « Dans toutes nos détresses », strophes 1, 2 & 3AEC 180, NCTC 157, Alléluia 14-06 :  » Souviens-toi de nous Seigneur » strophes 1 à 93.2 Prière d’intercession »Demandes pour l’homme » in Cent prières possibles ; André Dumas, Espaces Libres Albin Michel Réédition en poche 2003 Paris. Préface d’Olivier Abel.

Prédication

Piste Après le « Notre Père », les « Béatitudes » constituent le texte le plus connu de l’Évangile de Matthieu. Elles sont l’ouverture – et quelle ouverture !- du Sermon sur la Montagne. Qui peut demeurer insensible au lyrisme et à la poésie du texte mais aussi à sa force. Elles sont porteuses d’une nouvelle inouïe et bouleversante : « Le Royaume des cieux s’est approché ! ». Le Royaume des cieux n’a jamais été décrit dans la Bible comme une réalité statique. L’Ancien Testament par la voix des Prophètes nous dit ; « Il viendra » ; Jean Baptiste le répète : « Il vient » et Jésus dit : « Il est là ! ». Cette présence du Royaume des cieux, cette extraordinaire proximité de Dieu change, transforme, transfigure la réalité vécue par ceux qui proclament que Jésus Christ est le Seigneur et le Sauveur de tous les hommes. En effet l’annonce et la description du Royaume sont indissolublement liées à la venue de Jésus. On en saisit le sens plénier en appréhendant le mystère de l’incarnation. En Jésus Christ, Dieu se fait homme, homme baptisé, homme porteur d’une bonne nouvelle pour tous, homme crucifié, homme vainqueur de la mort et du péché. En Lui, la justice de la loi est accomplie. En la circonstance, Jésus réussit le tour de force de s’adresser simultanément à deux auditoires différents : – ses disciples auxquels il a demandé de s’asseoir auprès de lui, – la foule qu’il peut mieux observer du haut de l’éminence où il se trouve, et à laquelle il parle également, pour peu qu’elle prête l’oreille ! Somme toute deux « publics » : les militants engagés qui ont fait choix de placer le Christ au cœur de leur vie et la masse de ceux qui ne veulent pas tout quitter pour le suivre ou qui le suivent car ils attendent de lui une guérison, un réconfort, une parole qui apaise, ou encore… du pain. A première vue, la proclamation est belle, harmonieuse, idéale, mais en y réfléchissant à deux fois, on peut être légitimement saisi par la perplexité : Heureux êtes vous, les pauvres, les persécutés, les éplorés, les cabossés de la vie… Cette proclamation n’est-elle pas totalement décalée voire malvenue ? N’est-il pas cruel et démagogique de faire des promesses qui ne seront jamais traduites en faits, ici bas ? Souvenons-nous au passage que sur la foi de telles affirmations des exploiteurs bien pensants firent longtemps trimer des malheureux en leur faisant miroiter une récompense dans l’au-delà ! Non, décidemment, en y pensant bien, ces « Béatitudes » ne sont vraiment pas raisonnables, elles ne satisfont pas le bon sens commun. Elles sont « à coté de la plaque », quand elles énoncent « heureux les pauvres, les doux, ceux qui pleurent… » Quand on nous répète à l’envi qu’il faut se battre pour la vie, être le meilleur, le plus compétitif, le plus performant car c’est le seul moyen d’être vraiment heureux. Où se situe donc la vérité ? Les Béatitudes sont aux antipodes des valeurs affichées par nos décideurs économiques et les princes qui nous gouvernent ? Elles ne correspondent en rien aux valeurs et aux aspirations de notre société mondialisée où le matérialisme et la réussite sont les normes à l’aune desquelles tout se calcule, tout se mesure ! Elles ne sont désormais ni audibles, ni recevables, si tant est qu’elles l’aient jamais été ! Reléguons-les au magasin des utopies périmées ! … Et si elles contenaient tout de même ne fut-ce qu’une part de pertinence, si ce n’est d’espérance ? Pour le démontrer livrons nous à un petit exercice consistant à en prendre l’exact contrepied : Heureux les riches et les suffisants… Heureux ce qui rient, notamment en se moquant des autres… Heureux les violents… Heureux ceux qui ne croient pas à la justice et font tout pour la corrompre… Heureux les sans cœur… Heureux les cœurs partagés et divisés… Heureux les fauteurs de trouble et les semeurs de zizanie… Heureux ceux qui n’ont rigoureusement rien à faire des autres… Le résultat est saisissant ! Égoïsme, « struggle for life », indifférence, combines, loi du plus fort… Curieux catéchisme en vérité ! Ainsi en « retournant » les Béatitudes, pour les mettre en quelque sorte en phase avec les règles de notre monde nous parvenons à prendre l’exacte mesure de notre folie et de notre aveuglement. Ce petit exercice remet donc les choses à leur place ! Jésus n’a jamais dit qu’il venait éradiquer le malheur et les souffrances du monde, il a dit qu’il venait pour partager notre humanité, et vivre nos souffrances en s’abaissant jusqu’au sacrifice suprême. Soyons attentifs au fait que le contraire du bonheur ce n’est pas le malheur, mais bien la désespérance et la perte de sens. Ainsi, Jésus redonne de l’espérance à l’humanité et du sens à nos malheurs. A qui s’adresse Jésus ? A des êtres qui vivent dans leur chair ou leur esprit une attente ou une désespérance. Et lorsqu’il dit « heureux » -la Bible Chouraqui traduit par « En Marche »-il donne sens relief, valeur et poids à des situations, des attitudes, des comportements profondément authentiques et humains. En d’autres termes, lorsque nous sommes accablés par un accident de la vie : séparation, chômage, maladie, addiction, deuil, nous sommes assurés qu’il existe un recours en la personne du Christ qui nous dit : « Debout, mon frère, ma sœur, relève la tête, je suis là pour partager ton fardeau et ta peine. Dans « tes pleurs même, il y a vie et consolation. Et Moi, je t’appelle à la vraie vie, une vie pleine de sens « dont le maître-mot est Amour. « Certes, cette vie ne sera pas sans épreuves comme celles que tu peux traverser actuellement, elle « implique de ta part une conversion c’est-à-dire un total bouleversement des valeurs auxquelles tu « sacrifiais comme à des idoles. Si tu crées autour de toi les conditions de la paix, si luttes pour plus « de justice en ce bas monde, si tu compatis vraiment avec ceux qui sont dans la peine, bref si tu « contribues à l’annonce de mon Royaume, tu connaitras le bonheur. « Mais, ne te méprends pas, je ne te promets ni la tranquillité ni le repos, je t’ouvre la route, suis « moi ! » Et même, si à la suite du Sauveur nous sommes appelés à porter notre croix, souvenons nous en toutes circonstances de ces paroles du Maître : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui perdra sa vie pour moi la retrouvera ! » Que Dieu nous soit en aide ! Amen.