Textes : Jean 8, v. 31 à 47 Psaume 78Genèse 50, v. 15 à 21 Romains 14, v. 7 à 9 Matthieu 18, v. 21 à 35 Télécharger tout le document

Remarque préliminaire : comme le Ps 78 est assez long, la lecture peut se faire à plusieurs voix (par exemple : 1ère voix, les v. 1 à 11 ; 2e voix les v. 12 à 28 ; 3e voix les v. 29 à 42, 4e voix les v. 43 à 55 et 5e voix les v. 56 à 72). On peut entrecouper les lectures par le chant de quelques strophes du Ps 78, si l’assemblée est en mesure de le chanter. En lien avec le Ps 78, il est aussi possible de chanter le chant proposé pour « l’année Calvin » : « Peuple du Seigneur, écoute ma voix » (qu’on trouve sur le site : www.calvin09.org).

Prédication

Appartenant au recueil des Psaumes attribués à Asaph, un chantre de la tribu des Lévites, recueil qui englobe les Psaumes 50 et 73 à 83, le Psaume 78 est une instruction, un enseignement, et plus précisément une instruction sur l’histoire d’Israël : « Je vais ouvrir la bouche pour une parabole et dégager les leçons du passé », dit le Psalmiste en s’adressant au peuple qu’il invite à écouter et à suivre son enseignement.Le problème avec le passé, ce n’est pas seulement qu’on l’oublie, mais c’est encore que le passé est comparable à une énigme, dont on ne comprend le sens et l’importance pour le présent que si, au-delà des changements, on saisit ce qui demeure à travers les âges, à savoir les êtres humains avec leurs aspirations, leurs passions et leurs limites, mais aussi Dieu dans son action mystérieuse à l’égard des hommes. Il ne suffit donc pas de rappeler et de raconter les événements du passé, il faut encore dégager les leçons que contiennent ces événements, bref il s’agit de faire parler le passé qui souvent est recouvert par le silence ou par une histoire officielle qui le déforme.Pourquoi le Psalmiste fait-il parler le passé ? Pour plusieurs raisons. Mais surtout pour que la génération présente ne répète pas les erreurs des générations passées. Pour le Psalmiste, l’erreur des générations passées a été leur manque de confiance en Dieu. Les générations passées n’ont pas voulu reconnaître les œuvres que Dieu accomplissait dans leur vie et dans leur histoire, elles n’ont pas observé ses commandements. Et c’est pour cette raison que l’histoire d’Israël a été une succession de malheurs.La leçon qu’Israël doit tirer de son passé et en particulier de son passé jalonné de malheurs, c’est que son avenir peut être différent s’il fait confiance à Dieu et se conforme à sa parole et à ses commandements. Le Psalmiste va donc souligner dans son enseignement comment, d’un côté, Dieu a accompli des miracles et des exploits en faveur d’Israël et comment, de l’autre, le peuple a persévéré dans son endurcissement et sa rébellion appelant ainsi le malheur sur lui.La manière dont l’histoire d’Israël est reconstituée dans le Psaume est assez étonnante : le Psalmiste ne suit pas la chronologie des événements depuis les temps les plus anciens jusqu’au passé le plus récent, mais il construit l’histoire d’Israël autour d’un centre, autour d’une expérience fondamentale qui fait apparaître le drame qui sous-tend toute l’histoire d’Israël. Cette expérience fondamentale fut celle qu’a vécue la génération du désert, la génération de l’Exode : cette génération a été le témoin privilégié de l’action de Dieu pour son peuple : l’eau jaillissant du rocher au milieu du désert, la manne, les cailles… Mais cette génération s’est aussi illustrée par son endurcissement et par son manque de confiance en Dieu, si bien qu’elle a péri dans le désert sans avoir atteint le pays de la promesse et de l’espoir. Le Psalmiste conclut l’évocation du temps de l’Exode et du désert par une plainte :« Que de fois ils lui furent rebelles dans le désert, ils l’offensèrent dans les solitudes. De nouveau, ils mirent Dieu à l’épreuve, attristant le Saint d’Israël. Ils ne se rappelaient plus ce que sa main avait fait, le jour où il les avait rachetés à l’adversaire. »Placé au cœur de l’histoire d’Israël, le temps de l’Exode et du désert est encadré par deux autres moments, l’un plus ancien, l’autre plus récent, mais qui sont tous les deux évoqués avant l’Exode et puis rappelés ensuite. Il s’agit d’une part des signes que Dieu a opérés en Égypte et qui ont abouti à la libération d’Israël et d’autre part de l’anéantissement du Royaume du Nord, du Royaume d’Israël qui s’était séparé de Juda et de Jérusalem. Ce Royaume du Nord, que le Psalmiste désigne sous le nom d’Éphraïm qui en fut la tribu la plus importante, fut anéanti et soumis à l’Assyrie en 722/721 avant Jésus-Christ.On peut représenter l’histoire d’Israël telle qu’elle est retracée au Psaume 78 sous la forme d’un tableau :Au milieu : le temps de l’Exode et du désert qui fut à la fois le temps des exploits de Dieu pour Israël et le temps de l’endurcissement du peuple.Au deux extrêmes du tableau : la fin d’une histoire dominée par la rébellion contre Dieu.Entre le milieu et ces extrêmes, il y a le temps où Israël a séjourné en Égypte, le temps où Dieu, par ses signes et ses prodiges, a mené le peuple à la libération.« Il fait partir son peuple comme un troupeau, il les mène au désert comme des brebis, il les guide avec sûreté, ils n’ont pas à trembler quand la mer recouvre leurs ennemis.Il ressort de cette manière originale de présenter l’histoire d’Israël, non chronologique, mais articulée autour de trois moments, dont l’Exode constitue le moment central, que le Psalmiste cherche à dégager pour ses auditeurs un enseignement du passé : à savoir que le salut pour Israël, même s’il doit se retrouver à nouveau en Égypte, privé de terre et de liberté, réside dans la foi et la confiance qu’il place en Dieu qui a été et qui reste le berger fidèle de son peuple.Le Psaume se termine par le rappel de l’élection de David comme roi et berger d’Israël. David, en tant que roi juste et avisé, incarne l’espérance et le salut d’Israël. Ni l’endurcissement, ni le malheur où l’endurcissement entraîne les hommes ne sont une fatalité. L’histoire n’est jamais condamnée à se répéter. Pour nous, le Christ prend place au cœur de l’histoire tragique des hommes pour nous signifier qu’une autre histoire est possible, dans laquelle à l’action libératrice de Dieu répondent la foi des hommes et leur engagement pour la justice, la paix et la fraternité.