Textes : Actes 2, v. 14 à 36 Psaume 97 Actes 7, v. 55 à 60 Apocalypse 22, v. 12 à 20 Jean 17, v. 20 à 26 Pasteur Douglas NelsonTélécharger le document au complet

Textes : Actes 2, v. 14 à 36 Psaume 97 Actes 7, v. 55 à 60 Apocalypse 22, v. 12 à 20 Jean 17, v. 20 à 26 Pasteur Douglas NelsonTélécharger le document au complet

Textes : Actes 2, v. 14 à 36 Psaume 97 Actes 7, v. 55 à 60 Apocalypse 22, v. 12 à 20 Jean 17, v. 20 à 26 Pasteur Douglas NelsonTélécharger le document au complet

Textes : Actes 2, v. 14 à 36 Psaume 97 Actes 7, v. 55 à 60 Apocalypse 22, v. 12 à 20 Jean 17, v. 20 à 26 Pasteur Douglas NelsonTélécharger le document au complet

Textes : Actes 2, v. 14 à 36 Psaume 97 Actes 7, v. 55 à 60 Apocalypse 22, v. 12 à 20 Jean 17, v. 20 à 26 Pasteur Douglas NelsonTélécharger le document au complet

Textes : Actes 2, v. 14 à 36 Psaume 97 Actes 7, v. 55 à 60 Apocalypse 22, v. 12 à 20 Jean 17, v. 20 à 26 Pasteur Douglas NelsonTélécharger le document au complet

 

 

 

Notes bibliquesLes textes proposés à notre réflexion pour ce dimanche entre l’Ascension et la Pentecôte sont reliés au thème du Christ « élevé » (Ac 1.9, Jn 3.14, 12.32 ; Ph 2.9), « glorifié » (Jn 12.23-28, 17.1-5), « exalté dans la gloire » (1 Tm 3.16). Selon l’apôtre Paul (Rom. 8.34), « est à la droite de Dieu et intercède pour nous ».Le texte des Actes des Apôtres raconte comment Étienne, juste avant d’être lapidé, voit « Jésus debout à la droite de Dieu » et le décrit comme « le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu ».Le Psaume 97 chante la louange du Seigneur, Roi de toute la terre, « souverainement élevé au-dessus de tous les dieux ». La fin du livre de l’Apocalypse rapporte la prophétie du Seigneur Jésus lui-même, qui promet de (re)venir bientôt « pour rendre à chacun selon son œuvre » et répète à plusieurs reprises la prière de l’église primitive : « Viens… viens, Seigneur Jésus », une traduction en grec de l’araméen maranathá (voir 1 Co 16.22). Enfin la fin du discours d’adieu (13.31-17.26) dans l’Évangile de Jean exprime la prière du Christ sur le point d’être glorifié. Il intercède pour l’unité des siens et de tous ceux qui « croiront en [lui] à cause de leur parole ».Ce qui est difficile pour nous dans ces textes aujourd’hui est leur élément mythologique. Nous ne concevons plus l’univers de la même manière que ceux à qui ce message a été adressé au premier siècle. Notre prédication doit donc traduire ce message dans un langage accessible à nos contemporains. La prédication qui suit sur le texte de l’Apocalypse essaie de faire cela à partir de la notion de la résistance.Cette démarche s’inspire en partie d’un article paru dans un ouvrage collectif des théologiens presbytériens américains intitulé Résistance et l’éthique théologique (Voir Brian K. Blount, « Reading Revelation Today : Witness as Active Resistance » in Resistance et Theological Ethics R.H.Stone et R.L.Stivers, éds., Rowman et Littlefield, Lanham, Maryland, 2004, pp. 155-171).Dans cet article, l’auteur insiste sur le fait que le langage crée un sens potentiel, mais que l’on n’accède vraiment au sens d’un texte qu’en le mettant en pratique dans un certain contexte. Il fait le parallèle entre l’appel adressé à ses lecteurs par l’auteur de l’Apocalypse de témoigner de leur foi et l’appel lancé par le pasteur Martin Luther King, Jr. aux noirs américains dans les années 1960 de manifester de façon non-violente pour leurs droits civiques.L’Apocalypse, tout comme le pasteur King après lui, emploie un langage de résistance. Dans la tradition juive dans laquelle puise l’auteur de l’apocalypse, la littérature apocalyptique est une littérature d’opposition. « Ce n’est pas seulement le langage des opprimés et marginalisés ; c’est aussi le langage qu’ils ont utilisé pour survivre et défier l’existence coloniale que l’on leur a imposée. » Face à l’occupant, il existe seulement deux options : soit l’accommodation qui mène finalement à l’assimilation, soit la résistance. L’auteur de l’Apocalypse, comme Jésus avant lui, choisit de résister au pouvoir impérial. C’est à cause de ce choix que Jean est exilé sur l’île de Patmos, d’où il écrit pour encourager ses compagnons dans la foi.Dans son commentaire sur l’Apocalypse, Pierre Prigent parle de la « fonction pastorale » des hymnes et proclamations liturgiques dans le livre de l’Apocalypse « qui invitent les chrétiens à se découvrir directement concernés par les événements apocalyptiques décrits. » Au-delà de cette fonction pastorale, les réflexions et intuitions profondes de l’auteur « proposent aux hommes de se découvrir dès maintenant dans leur réalité dernière comme les créatures nouvelles qui se tiennent à jamais devant leur Dieu dans le ciel. » (L’Apocalypse de Saint Jean, Delachaux et Niestlé, Lausanne, Paris, 1981, p. 366) Notre situation en France est loin d’être la même que celle des chrétiens à la fin du premier siècle ou des chrétiens noirs américains dans les années 1960 aux États-Unis. Mais nous pouvons toujours entendre ce texte comme un appel à rester fidèle au Dieu de justice qui se révèle en Jésus-Christ, et de résister à tout ce qui menace et défigure notre humanité.PrédicationViens !Le fin mot de la BibleCe texte que je viens de lire clôt le livre de l’Apocalypse et avec lui les Écritures Saintes se terminent. C’est en quelque sort le mot fin de la Bible. Et quel mot étrange !Ce mot fin de la Bible annonce et appelle de ses vœux la fin de l’histoire. Il évoque le jugement final où le Christ, mort et ressuscité, reviendra établir son règne de justice et de paix sur un monde injuste.Un refrain revient sans cesse dans ce texte : viens !Les Écritures saintes se terminent avec cet appel vibrant d’un autre monde, d’une nouvelle terre et de nouveaux cieux. Nous vivons un moment de l’histoire où surgissent spontanément d’autres images « apocalyptiques », notamment écologiques qui mettent en doute notre avenir individuel et collectif. L’apocalypse chrétienne, quant à elle, annonce la victoire du Christ et son prochain retour, comme une promesse mais aussi comme une mise en garde.Ce mot fin, comme toutes les paroles de la Bible, nous vient de loin, de très loin. Comment le comprendre ? Comment le recevoir ?Ce qui doit arriver bientôtL’auteur de l’Apocalypse, un certain Jean, emprisonné pour sa foi sur l’île de Patmos, écrivait pour les chrétiens en proie aux persécutions. La vision de Jean est une parole prophétique, faite pour fortifier un peuple chancelant. C’est un appel vibrant à la résistance face aux forces qui menacent et écrasent notre humanité. La vision de l’Apocalypse s’inscrit dans une perspective de l’avenir :Le Seigneur, le Dieu des esprits des prophètes a envoyé son ange, pour montrer à ses serviteurs ce qui doit arriver bientôt…Ce qui doit arriver bientôt n’est rien d’autre que le retour de Jésus, le Christ. Ceci est attesté à trois reprises dans le texte par une parole dite par le Ressuscité lui-même : Voici je viens bientôt.Le retour de Christ a été depuis les premiers jours un article de foi pour l’Église chrétienne, comme nous disons dans le Symbole des apôtres : …il est monté au ciel, il siège à la droite de Dieu, le Père tout puissant, il viendra de là pour juger les vivants et les morts.Comme nous voyons dans ce texte qui date de la fin du premier siècle, le retour du Christ a été lié au thème du jugement du monde. Jésus, le juste, qui a subi le jugement des hommes, reviendra pour être lui-même l’agent du jugement de Dieu. Comme dit le Ressuscité à la fin du livre de l’Apocalypse : Voici je viens bientôt et ma rétribution avec moi, pour rendre à chacun selon son œuvre…Nous savons bien que le Christ n’est pas revenu tout de suite. Voilà bientôt 2000 ans que les chrétiens l’attendent comme le peuple juif attend toujours le Messie…Comme nous sommes relativement nantis, nous ne sentons peut-être pas l’urgence de ce message. Et pourtant, le monde va toujours aussi mal. Nos histoires personnelles et collectives prendront toutes fin un jour. Pouvons-nous ignorer cette parole qui annonce un jugement à venir ? Ne devons-nous pas vivre toujours à la lumière de cette conscience de la fin ?Tout le livre de l’Apocalypse annonce une bonne nouvelle : la victoire du Christ sur les forces du mal. Mais cette victoire déjà donnée dans l’histoire doit être réalisée dans la vie de chaque croyant et consumée dans l’histoire des peuples. Tout l’enjeu de ce texte est là. Que faisons de l’Évangile de Jésus-Christ ? Que faisons-nous pour que son règne vienne ? Comment résistons-nous dans nos vies de tous les jours à tout ce qui menace et défigure notre humanité ?Ce que nous faisons de notre vie n’est pas indifférent. C’est pourquoi le retour du Christ, symbole du jugement à venir, peut être salut pour les uns et jugement pour les autres. C’est pourquoi la fin de l’Apocalypse comporte une promesse et une mise en garde.Une promesse…La promesse est en forme de deux béatitudes qui mettent l’accent sur l’importance de l’action du croyant qui s’approprie et actualise dans sa propre vie la victoire qui lui est offerte en Jésus-Christ :Heureux celui qui garde les paroles prophétiques de ce livre…Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d’avoir droit à l’arbre de vie, et d’entrer, par les portes, dans la cité…Le bonheur ne se trouve peut-être pas là où on le pense. Dans un monde qui se fourvoie, comment préserver et développer notre véritable humanité ? Le livre de l’Apocalypse a été écrit pour une petite communauté de résistants qui refusaient de plier le genou devant le culte impérial et qui pouvaient payer de leur vie cet engagement là. Les paroles prophétiques qui promettent un ciel et une terre nouveaux (Ap. 21.1) développent une autre vision de l’avenir que celle des puissants de ce monde. Ce monde nouveau est donné, comme un bonheur, à ceux et celles qui l’anticipent et qui montrent par leur façon de se comporter que ce n’est pas une chimère. Le langage de la deuxième béatitude est chargé de symbolisme mythologique, mais le message est clair. L’image de la robe qu’il faut laver rappelle le baptême. Laissant derrière nous ce qui est vieux et sale, ce qui nuit à notre véritable humanité et nous enferme en nous-mêmes, nous sommes appelés à revêtir le Christ, à vivre dès aujourd’hui cette nouvelle humanité qu’il nous fait découvrir. « Ce n’est plus moi qui vis, dit l’apôtre Paul dans sa lettre aux Galates (2.20), c’est le Christ qui vit en moi. » Ou pour reprendre la parole de Jean-Baptiste dans l’Évangile de Jean (3.30) « Il faut que lui croisse et que, moi, je diminue. » C’est une façon de dire que nous devons apprendre à résister à ce qui est en nous qui ne va pas dans le sens de la vie, le partage et la justice. Cela implique un travail constant sur nous-mêmes.…et une mise en gardeLa mise en garde est le revers de la promesse. Tout d’abord il y a l’ange qui reprend Jean lorsque celui-ci se prosterne pour l’adorer. L’ange lui dit :Garde-toi de faire cela. Je suis un compagnon de service…C’est Dieu que tu dois adorer.Il ne faut pas attacher trop d’importance ni à la forme du message, ni au messager. Les images de l’Apocalypse ne sont pas à prendre au premier degré. Elles ne sont pas là pour satisfaire une quelconque curiosité quant aux événements de la fin du temps. Ce qui importe c’est le message lui-même, ou mieux, l’actualisation du message dans la vie de chaque croyant. L’ange n’est qu’un compagnon de service pour ceux qui gardent les paroles du livre et en les gardant rendent un culte à Dieu, c’est-à-dire en résistant à tous les faux dieux qui nous demandent de leur plier le genou encore aujourd’hui.Une deuxième mise en garde suit la béatitude qui se réfère au baptême. Elle est choquante par sa virulence et sa sévérité, à tel point que la lectionnaire pour ce dimanche propose de l’expurger :Dehors les chiens et les magiciens, les impudiques et les meurtriers, les idolâtres et quiconque aime ou pratique le mensonge.De semblables énumérations de vices à rejeter se retrouvent à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament. Leur fonction est de « tracer la frontière des conduites ou attitudes incompatibles avec l’attachement au Christ et la nouvelle naissance qu’il accorde à ceux qui sont baptisés en son nom. » (P.Prigent)Il y a des comportements qui sont incompatibles avec l’Évangile. On ne peut pas contraindre les autres à se conformer à une éthique évangélique, mais nous pouvons et devons dire ce qui est inacceptable, je pense, par exemple, au racisme dans toutes ses formes. Il nous faut donc forger un langage et un comportement de résistance.La dernière mise en garde est adressée plus particulièrement aux scribes et aux lecteurs pour sauvegarder la transmission du livre. Ceux qui ajoutent ou retranchent aux paroles du livre sont avertis qu’ils risquent la colère de Dieu.Mais on peut aussi voir le revers de cet avertissement. C’est une invitation à recevoir les images et paroles étranges de l’Apocalypse comme une parole prophétique, une parole qui échappe à notre rationalité et nous invite à croire à la victoire du Christ sur la mort, malgré tout ce qui dans notre monde peut nous faire douter de cette victoire. C’est aussi un appel à la résistance : résister à toutes les forces de mort qui agissent en nous et autour de nous.On revient ainsi à la première béatitude : heureux celui qui garde les paroles prophétiques de ce livre, qui actualise dans sa propre vie et selon sa propre liberté la victoire du Christ sur la mort et les forces du mal. Ce texte nous appelle à un combat.Viens !C’est pourquoi ce qui est le plus passionnant dans ce mot de la fin, c’est l’invitation qui se trouve dans le verset 17 :L’Esprit et l’épouse [l’Église] disent : Viens !Que celui qui entend dise : Viens !Que celui qui a soif vienne,Que celui qui le veut reçoive de l’eau vive, gratuitement.Voilà toute l’urgence et toute la promesse de l’Apocalypse. On peut voir dans le « Viens ! » de l’Esprit et de l’Église une invitation et une prière.Une invitation de venir s’associer à cette assemblée de gens qui vivent à la lumière de la victoire du Christ sur la mort et sur le mal. Mais aussi une prière adressée au Christ, qu’il vienne pour apporter son aide, pour accomplir et instaurer son royaume sur la terre.Celui qui entend cette invitation et cette prière est poussé par l’Esprit de les reprendre. Il dit à son tour : Viens !Celui qui a soif, qui est en manque de ce qui est vital dans sa vie, est poussé par l’Esprit à répondre à cette invitation, à venir recevoir gratuitement cette eau vive qui devient en lui une source d’où jaillit la vie éternelle. Il est invité à croire et à vivre dès maintenant la victoire du Christ sur la mort en attendant sa consumation finale.Viens, Seigneur JésusAinsi le livre de l’Apocalypse et la Bible tout entière s’achève avec cette prière qui est peut-être la plus ancienne de l’Église primitive, que nous trouvons dans la lettre de Paul aux Corinthiens dans sa forme araméenne : Maranathá. Viens, Seigneur Jésus !Seul Dieu peut établir son royaume.Seul le Christ peut assurer la victoire sur les forces de la mort.Notre prière s’adresse donc à Dieu le Père : Que ton règne vienne.Il s’adresse à son Fils : Viens, Seigneur Jésus.Mais comment prier cette prière si nous ne sommes pas prêts à laisser le règne de Dieu s’établir dans notre vie ? Voulons-nous vraiment que le Seigneur vienne ? Que va-t-il découvrir dans ma vie, dans la vie de notre Église ? Va-t-il venir comme un Sauveur ou comme un juge ?PrièreViens, Seigneur Jésus.Viens dans ma vie.Viens balayer tout ce qui ne s’accorde pas avec la vie nouvelle que tu me donnes à vivre.Viens me donner la force d’être un témoin fidèle de ta grâce et de ta miséricorde et de résister à tout ce qui, autour de nous et en nous, écrase et défigure notre humanité.Amen. Viens, Seigneur Jésus.

Notes bibliquesLes textes proposés à notre réflexion pour ce dimanche entre l’Ascension et la Pentecôte sont reliés au thème du Christ « élevé » (Ac 1.9, Jn 3.14, 12.32 ; Ph 2.9), « glorifié » (Jn 12.23-28, 17.1-5), « exalté dans la gloire » (1 Tm 3.16). Selon l’apôtre Paul (Rom. 8.34), « est à la droite de Dieu et intercède pour nous ».Le texte des Actes des Apôtres raconte comment Étienne, juste avant d’être lapidé, voit « Jésus debout à la droite de Dieu » et le décrit comme « le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu ».Le Psaume 97 chante la louange du Seigneur, Roi de toute la terre, « souverainement élevé au-dessus de tous les dieux ». La fin du livre de l’Apocalypse rapporte la prophétie du Seigneur Jésus lui-même, qui promet de (re)venir bientôt « pour rendre à chacun selon son œuvre » et répète à plusieurs reprises la prière de l’église primitive : « Viens… viens, Seigneur Jésus », une traduction en grec de l’araméen maranathá (voir 1 Co 16.22). Enfin la fin du discours d’adieu (13.31-17.26) dans l’Évangile de Jean exprime la prière du Christ sur le point d’être glorifié. Il intercède pour l’unité des siens et de tous ceux qui « croiront en [lui] à cause de leur parole ».Ce qui est difficile pour nous dans ces textes aujourd’hui est leur élément mythologique. Nous ne concevons plus l’univers de la même manière que ceux à qui ce message a été adressé au premier siècle. Notre prédication doit donc traduire ce message dans un langage accessible à nos contemporains. La prédication qui suit sur le texte de l’Apocalypse essaie de faire cela à partir de la notion de la résistance.Cette démarche s’inspire en partie d’un article paru dans un ouvrage collectif des théologiens presbytériens américains intitulé Résistance et l’éthique théologique (Voir Brian K. Blount, « Reading Revelation Today : Witness as Active Resistance » in Resistance et Theological Ethics R.H.Stone et R.L.Stivers, éds., Rowman et Littlefield, Lanham, Maryland, 2004, pp. 155-171).Dans cet article, l’auteur insiste sur le fait que le langage crée un sens potentiel, mais que l’on n’accède vraiment au sens d’un texte qu’en le mettant en pratique dans un certain contexte. Il fait le parallèle entre l’appel adressé à ses lecteurs par l’auteur de l’Apocalypse de témoigner de leur foi et l’appel lancé par le pasteur Martin Luther King, Jr. aux noirs américains dans les années 1960 de manifester de façon non-violente pour leurs droits civiques.L’Apocalypse, tout comme le pasteur King après lui, emploie un langage de résistance. Dans la tradition juive dans laquelle puise l’auteur de l’apocalypse, la littérature apocalyptique est une littérature d’opposition. « Ce n’est pas seulement le langage des opprimés et marginalisés ; c’est aussi le langage qu’ils ont utilisé pour survivre et défier l’existence coloniale que l’on leur a imposée. » Face à l’occupant, il existe seulement deux options : soit l’accommodation qui mène finalement à l’assimilation, soit la résistance. L’auteur de l’Apocalypse, comme Jésus avant lui, choisit de résister au pouvoir impérial. C’est à cause de ce choix que Jean est exilé sur l’île de Patmos, d’où il écrit pour encourager ses compagnons dans la foi.Dans son commentaire sur l’Apocalypse, Pierre Prigent parle de la « fonction pastorale » des hymnes et proclamations liturgiques dans le livre de l’Apocalypse « qui invitent les chrétiens à se découvrir directement concernés par les événements apocalyptiques décrits. » Au-delà de cette fonction pastorale, les réflexions et intuitions profondes de l’auteur « proposent aux hommes de se découvrir dès maintenant dans leur réalité dernière comme les créatures nouvelles qui se tiennent à jamais devant leur Dieu dans le ciel. » (L’Apocalypse de Saint Jean, Delachaux et Niestlé, Lausanne, Paris, 1981, p. 366) Notre situation en France est loin d’être la même que celle des chrétiens à la fin du premier siècle ou des chrétiens noirs américains dans les années 1960 aux États-Unis. Mais nous pouvons toujours entendre ce texte comme un appel à rester fidèle au Dieu de justice qui se révèle en Jésus-Christ, et de résister à tout ce qui menace et défigure notre humanité.PrédicationViens !Le fin mot de la BibleCe texte que je viens de lire clôt le livre de l’Apocalypse et avec lui les Écritures Saintes se terminent. C’est en quelque sort le mot fin de la Bible. Et quel mot étrange !Ce mot fin de la Bible annonce et appelle de ses vœux la fin de l’histoire. Il évoque le jugement final où le Christ, mort et ressuscité, reviendra établir son règne de justice et de paix sur un monde injuste.Un refrain revient sans cesse dans ce texte : viens !Les Écritures saintes se terminent avec cet appel vibrant d’un autre monde, d’une nouvelle terre et de nouveaux cieux. Nous vivons un moment de l’histoire où surgissent spontanément d’autres images « apocalyptiques », notamment écologiques qui mettent en doute notre avenir individuel et collectif. L’apocalypse chrétienne, quant à elle, annonce la victoire du Christ et son prochain retour, comme une promesse mais aussi comme une mise en garde.Ce mot fin, comme toutes les paroles de la Bible, nous vient de loin, de très loin. Comment le comprendre ? Comment le recevoir ?Ce qui doit arriver bientôtL’auteur de l’Apocalypse, un certain Jean, emprisonné pour sa foi sur l’île de Patmos, écrivait pour les chrétiens en proie aux persécutions. La vision de Jean est une parole prophétique, faite pour fortifier un peuple chancelant. C’est un appel vibrant à la résistance face aux forces qui menacent et écrasent notre humanité. La vision de l’Apocalypse s’inscrit dans une perspective de l’avenir :Le Seigneur, le Dieu des esprits des prophètes a envoyé son ange, pour montrer à ses serviteurs ce qui doit arriver bientôt…Ce qui doit arriver bientôt n’est rien d’autre que le retour de Jésus, le Christ. Ceci est attesté à trois reprises dans le texte par une parole dite par le Ressuscité lui-même : Voici je viens bientôt.Le retour de Christ a été depuis les premiers jours un article de foi pour l’Église chrétienne, comme nous disons dans le Symbole des apôtres : …il est monté au ciel, il siège à la droite de Dieu, le Père tout puissant, il viendra de là pour juger les vivants et les morts.Comme nous voyons dans ce texte qui date de la fin du premier siècle, le retour du Christ a été lié au thème du jugement du monde. Jésus, le juste, qui a subi le jugement des hommes, reviendra pour être lui-même l’agent du jugement de Dieu. Comme dit le Ressuscité à la fin du livre de l’Apocalypse : Voici je viens bientôt et ma rétribution avec moi, pour rendre à chacun selon son œuvre…Nous savons bien que le Christ n’est pas revenu tout de suite. Voilà bientôt 2000 ans que les chrétiens l’attendent comme le peuple juif attend toujours le Messie…Comme nous sommes relativement nantis, nous ne sentons peut-être pas l’urgence de ce message. Et pourtant, le monde va toujours aussi mal. Nos histoires personnelles et collectives prendront toutes fin un jour. Pouvons-nous ignorer cette parole qui annonce un jugement à venir ? Ne devons-nous pas vivre toujours à la lumière de cette conscience de la fin ?Tout le livre de l’Apocalypse annonce une bonne nouvelle : la victoire du Christ sur les forces du mal. Mais cette victoire déjà donnée dans l’histoire doit être réalisée dans la vie de chaque croyant et consumée dans l’histoire des peuples. Tout l’enjeu de ce texte est là. Que faisons de l’Évangile de Jésus-Christ ? Que faisons-nous pour que son règne vienne ? Comment résistons-nous dans nos vies de tous les jours à tout ce qui menace et défigure notre humanité ?Ce que nous faisons de notre vie n’est pas indifférent. C’est pourquoi le retour du Christ, symbole du jugement à venir, peut être salut pour les uns et jugement pour les autres. C’est pourquoi la fin de l’Apocalypse comporte une promesse et une mise en garde.Une promesse…La promesse est en forme de deux béatitudes qui mettent l’accent sur l’importance de l’action du croyant qui s’approprie et actualise dans sa propre vie la victoire qui lui est offerte en Jésus-Christ :Heureux celui qui garde les paroles prophétiques de ce livre…Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d’avoir droit à l’arbre de vie, et d’entrer, par les portes, dans la cité…Le bonheur ne se trouve peut-être pas là où on le pense. Dans un monde qui se fourvoie, comment préserver et développer notre véritable humanité ? Le livre de l’Apocalypse a été écrit pour une petite communauté de résistants qui refusaient de plier le genou devant le culte impérial et qui pouvaient payer de leur vie cet engagement là. Les paroles prophétiques qui promettent un ciel et une terre nouveaux (Ap. 21.1) développent une autre vision de l’avenir que celle des puissants de ce monde. Ce monde nouveau est donné, comme un bonheur, à ceux et celles qui l’anticipent et qui montrent par leur façon de se comporter que ce n’est pas une chimère. Le langage de la deuxième béatitude est chargé de symbolisme mythologique, mais le message est clair. L’image de la robe qu’il faut laver rappelle le baptême. Laissant derrière nous ce qui est vieux et sale, ce qui nuit à notre véritable humanité et nous enferme en nous-mêmes, nous sommes appelés à revêtir le Christ, à vivre dès aujourd’hui cette nouvelle humanité qu’il nous fait découvrir. « Ce n’est plus moi qui vis, dit l’apôtre Paul dans sa lettre aux Galates (2.20), c’est le Christ qui vit en moi. » Ou pour reprendre la parole de Jean-Baptiste dans l’Évangile de Jean (3.30) « Il faut que lui croisse et que, moi, je diminue. » C’est une façon de dire que nous devons apprendre à résister à ce qui est en nous qui ne va pas dans le sens de la vie, le partage et la justice. Cela implique un travail constant sur nous-mêmes.…et une mise en gardeLa mise en garde est le revers de la promesse. Tout d’abord il y a l’ange qui reprend Jean lorsque celui-ci se prosterne pour l’adorer. L’ange lui dit :Garde-toi de faire cela. Je suis un compagnon de service…C’est Dieu que tu dois adorer.Il ne faut pas attacher trop d’importance ni à la forme du message, ni au messager. Les images de l’Apocalypse ne sont pas à prendre au premier degré. Elles ne sont pas là pour satisfaire une quelconque curiosité quant aux événements de la fin du temps. Ce qui importe c’est le message lui-même, ou mieux, l’actualisation du message dans la vie de chaque croyant. L’ange n’est qu’un compagnon de service pour ceux qui gardent les paroles du livre et en les gardant rendent un culte à Dieu, c’est-à-dire en résistant à tous les faux dieux qui nous demandent de leur plier le genou encore aujourd’hui.Une deuxième mise en garde suit la béatitude qui se réfère au baptême. Elle est choquante par sa virulence et sa sévérité, à tel point que la lectionnaire pour ce dimanche propose de l’expurger :Dehors les chiens et les magiciens, les impudiques et les meurtriers, les idolâtres et quiconque aime ou pratique le mensonge.De semblables énumérations de vices à rejeter se retrouvent à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament. Leur fonction est de « tracer la frontière des conduites ou attitudes incompatibles avec l’attachement au Christ et la nouvelle naissance qu’il accorde à ceux qui sont baptisés en son nom. » (P.Prigent)Il y a des comportements qui sont incompatibles avec l’Évangile. On ne peut pas contraindre les autres à se conformer à une éthique évangélique, mais nous pouvons et devons dire ce qui est inacceptable, je pense, par exemple, au racisme dans toutes ses formes. Il nous faut donc forger un langage et un comportement de résistance.La dernière mise en garde est adressée plus particulièrement aux scribes et aux lecteurs pour sauvegarder la transmission du livre. Ceux qui ajoutent ou retranchent aux paroles du livre sont avertis qu’ils risquent la colère de Dieu.Mais on peut aussi voir le revers de cet avertissement. C’est une invitation à recevoir les images et paroles étranges de l’Apocalypse comme une parole prophétique, une parole qui échappe à notre rationalité et nous invite à croire à la victoire du Christ sur la mort, malgré tout ce qui dans notre monde peut nous faire douter de cette victoire. C’est aussi un appel à la résistance : résister à toutes les forces de mort qui agissent en nous et autour de nous.On revient ainsi à la première béatitude : heureux celui qui garde les paroles prophétiques de ce livre, qui actualise dans sa propre vie et selon sa propre liberté la victoire du Christ sur la mort et les forces du mal. Ce texte nous appelle à un combat.Viens !C’est pourquoi ce qui est le plus passionnant dans ce mot de la fin, c’est l’invitation qui se trouve dans le verset 17 :L’Esprit et l’épouse [l’Église] disent : Viens !Que celui qui entend dise : Viens !Que celui qui a soif vienne,Que celui qui le veut reçoive de l’eau vive, gratuitement.Voilà toute l’urgence et toute la promesse de l’Apocalypse. On peut voir dans le « Viens ! » de l’Esprit et de l’Église une invitation et une prière.Une invitation de venir s’associer à cette assemblée de gens qui vivent à la lumière de la victoire du Christ sur la mort et sur le mal. Mais aussi une prière adressée au Christ, qu’il vienne pour apporter son aide, pour accomplir et instaurer son royaume sur la terre.Celui qui entend cette invitation et cette prière est poussé par l’Esprit de les reprendre. Il dit à son tour : Viens !Celui qui a soif, qui est en manque de ce qui est vital dans sa vie, est poussé par l’Esprit à répondre à cette invitation, à venir recevoir gratuitement cette eau vive qui devient en lui une source d’où jaillit la vie éternelle. Il est invité à croire et à vivre dès maintenant la victoire du Christ sur la mort en attendant sa consumation finale.Viens, Seigneur JésusAinsi le livre de l’Apocalypse et la Bible tout entière s’achève avec cette prière qui est peut-être la plus ancienne de l’Église primitive, que nous trouvons dans la lettre de Paul aux Corinthiens dans sa forme araméenne : Maranathá. Viens, Seigneur Jésus !Seul Dieu peut établir son royaume.Seul le Christ peut assurer la victoire sur les forces de la mort.Notre prière s’adresse donc à Dieu le Père : Que ton règne vienne.Il s’adresse à son Fils : Viens, Seigneur Jésus.Mais comment prier cette prière si nous ne sommes pas prêts à laisser le règne de Dieu s’établir dans notre vie ? Voulons-nous vraiment que le Seigneur vienne ? Que va-t-il découvrir dans ma vie, dans la vie de notre Église ? Va-t-il venir comme un Sauveur ou comme un juge ?PrièreViens, Seigneur Jésus.Viens dans ma vie.Viens balayer tout ce qui ne s’accorde pas avec la vie nouvelle que tu me donnes à vivre.Viens me donner la force d’être un témoin fidèle de ta grâce et de ta miséricorde et de résister à tout ce qui, autour de nous et en nous, écrase et défigure notre humanité.Amen. Viens, Seigneur Jésus.

Notes bibliquesLes textes proposés à notre réflexion pour ce dimanche entre l’Ascension et la Pentecôte sont reliés au thème du Christ « élevé » (Ac 1.9, Jn 3.14, 12.32 ; Ph 2.9), « glorifié » (Jn 12.23-28, 17.1-5), « exalté dans la gloire » (1 Tm 3.16). Selon l’apôtre Paul (Rom. 8.34), « est à la droite de Dieu et intercède pour nous ».Le texte des Actes des Apôtres raconte comment Étienne, juste avant d’être lapidé, voit « Jésus debout à la droite de Dieu » et le décrit comme « le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu ».Le Psaume 97 chante la louange du Seigneur, Roi de toute la terre, « souverainement élevé au-dessus de tous les dieux ». La fin du livre de l’Apocalypse rapporte la prophétie du Seigneur Jésus lui-même, qui promet de (re)venir bientôt « pour rendre à chacun selon son œuvre » et répète à plusieurs reprises la prière de l’église primitive : « Viens… viens, Seigneur Jésus », une traduction en grec de l’araméen maranathá (voir 1 Co 16.22). Enfin la fin du discours d’adieu (13.31-17.26) dans l’Évangile de Jean exprime la prière du Christ sur le point d’être glorifié. Il intercède pour l’unité des siens et de tous ceux qui « croiront en [lui] à cause de leur parole ».Ce qui est difficile pour nous dans ces textes aujourd’hui est leur élément mythologique. Nous ne concevons plus l’univers de la même manière que ceux à qui ce message a été adressé au premier siècle. Notre prédication doit donc traduire ce message dans un langage accessible à nos contemporains. La prédication qui suit sur le texte de l’Apocalypse essaie de faire cela à partir de la notion de la résistance.Cette démarche s’inspire en partie d’un article paru dans un ouvrage collectif des théologiens presbytériens américains intitulé Résistance et l’éthique théologique (Voir Brian K. Blount, « Reading Revelation Today : Witness as Active Resistance » in Resistance et Theological Ethics R.H.Stone et R.L.Stivers, éds., Rowman et Littlefield, Lanham, Maryland, 2004, pp. 155-171).Dans cet article, l’auteur insiste sur le fait que le langage crée un sens potentiel, mais que l’on n’accède vraiment au sens d’un texte qu’en le mettant en pratique dans un certain contexte. Il fait le parallèle entre l’appel adressé à ses lecteurs par l’auteur de l’Apocalypse de témoigner de leur foi et l’appel lancé par le pasteur Martin Luther King, Jr. aux noirs américains dans les années 1960 de manifester de façon non-violente pour leurs droits civiques.L’Apocalypse, tout comme le pasteur King après lui, emploie un langage de résistance. Dans la tradition juive dans laquelle puise l’auteur de l’apocalypse, la littérature apocalyptique est une littérature d’opposition. « Ce n’est pas seulement le langage des opprimés et marginalisés ; c’est aussi le langage qu’ils ont utilisé pour survivre et défier l’existence coloniale que l’on leur a imposée. » Face à l’occupant, il existe seulement deux options : soit l’accommodation qui mène finalement à l’assimilation, soit la résistance. L’auteur de l’Apocalypse, comme Jésus avant lui, choisit de résister au pouvoir impérial. C’est à cause de ce choix que Jean est exilé sur l’île de Patmos, d’où il écrit pour encourager ses compagnons dans la foi.Dans son commentaire sur l’Apocalypse, Pierre Prigent parle de la « fonction pastorale » des hymnes et proclamations liturgiques dans le livre de l’Apocalypse « qui invitent les chrétiens à se découvrir directement concernés par les événements apocalyptiques décrits. » Au-delà de cette fonction pastorale, les réflexions et intuitions profondes de l’auteur « proposent aux hommes de se découvrir dès maintenant dans leur réalité dernière comme les créatures nouvelles qui se tiennent à jamais devant leur Dieu dans le ciel. » (L’Apocalypse de Saint Jean, Delachaux et Niestlé, Lausanne, Paris, 1981, p. 366) Notre situation en France est loin d’être la même que celle des chrétiens à la fin du premier siècle ou des chrétiens noirs américains dans les années 1960 aux États-Unis. Mais nous pouvons toujours entendre ce texte comme un appel à rester fidèle au Dieu de justice qui se révèle en Jésus-Christ, et de résister à tout ce qui menace et défigure notre humanité.PrédicationViens !Le fin mot de la BibleCe texte que je viens de lire clôt le livre de l’Apocalypse et avec lui les Écritures Saintes se terminent. C’est en quelque sort le mot fin de la Bible. Et quel mot étrange !Ce mot fin de la Bible annonce et appelle de ses vœux la fin de l’histoire. Il évoque le jugement final où le Christ, mort et ressuscité, reviendra établir son règne de justice et de paix sur un monde injuste.Un refrain revient sans cesse dans ce texte : viens !Les Écritures saintes se terminent avec cet appel vibrant d’un autre monde, d’une nouvelle terre et de nouveaux cieux. Nous vivons un moment de l’histoire où surgissent spontanément d’autres images « apocalyptiques », notamment écologiques qui mettent en doute notre avenir individuel et collectif. L’apocalypse chrétienne, quant à elle, annonce la victoire du Christ et son prochain retour, comme une promesse mais aussi comme une mise en garde.Ce mot fin, comme toutes les paroles de la Bible, nous vient de loin, de très loin. Comment le comprendre ? Comment le recevoir ?Ce qui doit arriver bientôtL’auteur de l’Apocalypse, un certain Jean, emprisonné pour sa foi sur l’île de Patmos, écrivait pour les chrétiens en proie aux persécutions. La vision de Jean est une parole prophétique, faite pour fortifier un peuple chancelant. C’est un appel vibrant à la résistance face aux forces qui menacent et écrasent notre humanité. La vision de l’Apocalypse s’inscrit dans une perspective de l’avenir :Le Seigneur, le Dieu des esprits des prophètes a envoyé son ange, pour montrer à ses serviteurs ce qui doit arriver bientôt…Ce qui doit arriver bientôt n’est rien d’autre que le retour de Jésus, le Christ. Ceci est attesté à trois reprises dans le texte par une parole dite par le Ressuscité lui-même : Voici je viens bientôt.Le retour de Christ a été depuis les premiers jours un article de foi pour l’Église chrétienne, comme nous disons dans le Symbole des apôtres : …il est monté au ciel, il siège à la droite de Dieu, le Père tout puissant, il viendra de là pour juger les vivants et les morts.Comme nous voyons dans ce texte qui date de la fin du premier siècle, le retour du Christ a été lié au thème du jugement du monde. Jésus, le juste, qui a subi le jugement des hommes, reviendra pour être lui-même l’agent du jugement de Dieu. Comme dit le Ressuscité à la fin du livre de l’Apocalypse : Voici je viens bientôt et ma rétribution avec moi, pour rendre à chacun selon son œuvre…Nous savons bien que le Christ n’est pas revenu tout de suite. Voilà bientôt 2000 ans que les chrétiens l’attendent comme le peuple juif attend toujours le Messie…Comme nous sommes relativement nantis, nous ne sentons peut-être pas l’urgence de ce message. Et pourtant, le monde va toujours aussi mal. Nos histoires personnelles et collectives prendront toutes fin un jour. Pouvons-nous ignorer cette parole qui annonce un jugement à venir ? Ne devons-nous pas vivre toujours à la lumière de cette conscience de la fin ?Tout le livre de l’Apocalypse annonce une bonne nouvelle : la victoire du Christ sur les forces du mal. Mais cette victoire déjà donnée dans l’histoire doit être réalisée dans la vie de chaque croyant et consumée dans l’histoire des peuples. Tout l’enjeu de ce texte est là. Que faisons de l’Évangile de Jésus-Christ ? Que faisons-nous pour que son règne vienne ? Comment résistons-nous dans nos vies de tous les jours à tout ce qui menace et défigure notre humanité ?Ce que nous faisons de notre vie n’est pas indifférent. C’est pourquoi le retour du Christ, symbole du jugement à venir, peut être salut pour les uns et jugement pour les autres. C’est pourquoi la fin de l’Apocalypse comporte une promesse et une mise en garde.Une promesse…La promesse est en forme de deux béatitudes qui mettent l’accent sur l’importance de l’action du croyant qui s’approprie et actualise dans sa propre vie la victoire qui lui est offerte en Jésus-Christ :Heureux celui qui garde les paroles prophétiques de ce livre…Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d’avoir droit à l’arbre de vie, et d’entrer, par les portes, dans la cité…Le bonheur ne se trouve peut-être pas là où on le pense. Dans un monde qui se fourvoie, comment préserver et développer notre véritable humanité ? Le livre de l’Apocalypse a été écrit pour une petite communauté de résistants qui refusaient de plier le genou devant le culte impérial et qui pouvaient payer de leur vie cet engagement là. Les paroles prophétiques qui promettent un ciel et une terre nouveaux (Ap. 21.1) développent une autre vision de l’avenir que celle des puissants de ce monde. Ce monde nouveau est donné, comme un bonheur, à ceux et celles qui l’anticipent et qui montrent par leur façon de se comporter que ce n’est pas une chimère. Le langage de la deuxième béatitude est chargé de symbolisme mythologique, mais le message est clair. L’image de la robe qu’il faut laver rappelle le baptême. Laissant derrière nous ce qui est vieux et sale, ce qui nuit à notre véritable humanité et nous enferme en nous-mêmes, nous sommes appelés à revêtir le Christ, à vivre dès aujourd’hui cette nouvelle humanité qu’il nous fait découvrir. « Ce n’est plus moi qui vis, dit l’apôtre Paul dans sa lettre aux Galates (2.20), c’est le Christ qui vit en moi. » Ou pour reprendre la parole de Jean-Baptiste dans l’Évangile de Jean (3.30) « Il faut que lui croisse et que, moi, je diminue. » C’est une façon de dire que nous devons apprendre à résister à ce qui est en nous qui ne va pas dans le sens de la vie, le partage et la justice. Cela implique un travail constant sur nous-mêmes.…et une mise en gardeLa mise en garde est le revers de la promesse. Tout d’abord il y a l’ange qui reprend Jean lorsque celui-ci se prosterne pour l’adorer. L’ange lui dit :Garde-toi de faire cela. Je suis un compagnon de service…C’est Dieu que tu dois adorer.Il ne faut pas attacher trop d’importance ni à la forme du message, ni au messager. Les images de l’Apocalypse ne sont pas à prendre au premier degré. Elles ne sont pas là pour satisfaire une quelconque curiosité quant aux événements de la fin du temps. Ce qui importe c’est le message lui-même, ou mieux, l’actualisation du message dans la vie de chaque croyant. L’ange n’est qu’un compagnon de service pour ceux qui gardent les paroles du livre et en les gardant rendent un culte à Dieu, c’est-à-dire en résistant à tous les faux dieux qui nous demandent de leur plier le genou encore aujourd’hui.Une deuxième mise en garde suit la béatitude qui se réfère au baptême. Elle est choquante par sa virulence et sa sévérité, à tel point que la lectionnaire pour ce dimanche propose de l’expurger :Dehors les chiens et les magiciens, les impudiques et les meurtriers, les idolâtres et quiconque aime ou pratique le mensonge.De semblables énumérations de vices à rejeter se retrouvent à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament. Leur fonction est de « tracer la frontière des conduites ou attitudes incompatibles avec l’attachement au Christ et la nouvelle naissance qu’il accorde à ceux qui sont baptisés en son nom. » (P.Prigent)Il y a des comportements qui sont incompatibles avec l’Évangile. On ne peut pas contraindre les autres à se conformer à une éthique évangélique, mais nous pouvons et devons dire ce qui est inacceptable, je pense, par exemple, au racisme dans toutes ses formes. Il nous faut donc forger un langage et un comportement de résistance.La dernière mise en garde est adressée plus particulièrement aux scribes et aux lecteurs pour sauvegarder la transmission du livre. Ceux qui ajoutent ou retranchent aux paroles du livre sont avertis qu’ils risquent la colère de Dieu.Mais on peut aussi voir le revers de cet avertissement. C’est une invitation à recevoir les images et paroles étranges de l’Apocalypse comme une parole prophétique, une parole qui échappe à notre rationalité et nous invite à croire à la victoire du Christ sur la mort, malgré tout ce qui dans notre monde peut nous faire douter de cette victoire. C’est aussi un appel à la résistance : résister à toutes les forces de mort qui agissent en nous et autour de nous.On revient ainsi à la première béatitude : heureux celui qui garde les paroles prophétiques de ce livre, qui actualise dans sa propre vie et selon sa propre liberté la victoire du Christ sur la mort et les forces du mal. Ce texte nous appelle à un combat.Viens !C’est pourquoi ce qui est le plus passionnant dans ce mot de la fin, c’est l’invitation qui se trouve dans le verset 17 :L’Esprit et l’épouse [l’Église] disent : Viens !Que celui qui entend dise : Viens !Que celui qui a soif vienne,Que celui qui le veut reçoive de l’eau vive, gratuitement.Voilà toute l’urgence et toute la promesse de l’Apocalypse. On peut voir dans le « Viens ! » de l’Esprit et de l’Église une invitation et une prière.Une invitation de venir s’associer à cette assemblée de gens qui vivent à la lumière de la victoire du Christ sur la mort et sur le mal. Mais aussi une prière adressée au Christ, qu’il vienne pour apporter son aide, pour accomplir et instaurer son royaume sur la terre.Celui qui entend cette invitation et cette prière est poussé par l’Esprit de les reprendre. Il dit à son tour : Viens !Celui qui a soif, qui est en manque de ce qui est vital dans sa vie, est poussé par l’Esprit à répondre à cette invitation, à venir recevoir gratuitement cette eau vive qui devient en lui une source d’où jaillit la vie éternelle. Il est invité à croire et à vivre dès maintenant la victoire du Christ sur la mort en attendant sa consumation finale.Viens, Seigneur JésusAinsi le livre de l’Apocalypse et la Bible tout entière s’achève avec cette prière qui est peut-être la plus ancienne de l’Église primitive, que nous trouvons dans la lettre de Paul aux Corinthiens dans sa forme araméenne : Maranathá. Viens, Seigneur Jésus !Seul Dieu peut établir son royaume.Seul le Christ peut assurer la victoire sur les forces de la mort.Notre prière s’adresse donc à Dieu le Père : Que ton règne vienne.Il s’adresse à son Fils : Viens, Seigneur Jésus.Mais comment prier cette prière si nous ne sommes pas prêts à laisser le règne de Dieu s’établir dans notre vie ? Voulons-nous vraiment que le Seigneur vienne ? Que va-t-il découvrir dans ma vie, dans la vie de notre Église ? Va-t-il venir comme un Sauveur ou comme un juge ?PrièreViens, Seigneur Jésus.Viens dans ma vie.Viens balayer tout ce qui ne s’accorde pas avec la vie nouvelle que tu me donnes à vivre.