Textes : Matthieu 13, v. 53 à 58 Romains 3, v. 21 & 25 à 28 Deutéronome 11, v. 18 à 32 Ps 31 Matthieu 7, v. 21 à 27Madame Odile BigotTélécharger le document au complet

Notes bibliques

Réflexions et Notes bibliques

  • Le texte biblique : Nul n’est prophète en son pays – Évangile selon Matthieu (13, 54-58)

En ce temps-là, étant venu dans son pays, Jésus les instruisait dans leurs synagogues, de sorte qu’ils étaient dans l’admiration et disaient : D’où viennent à celui-ci cette sagesse et ces miracles ? N’est-ce pas là le fils du charpentier ? Sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie ? Et Jacques, Joseph, Simon et Jude ne sont-ils pas ses frères ? Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes parmi nous ? D’où lui viennent donc toutes ces choses ? Et ils prenaient de lui un sujet de scandale. Mais Jésus leur dit : Un prophète n’est sans honneur que dans son pays et dans sa maison. Et il ne fit pas là beaucoup de miracles, à cause de leur incrédulité.

  • Le dicton actuel et son sens : « Nul n’est prophète en son pays » : il est difficile d’être reconnu et apprécié dans son propre pays ou parmi les siens.

Son origine est donc dans le Texte biblique : Jésus revient prêcher à Nazareth, ville où il avait passé son enfance. Mais les Nazaréens s’étonnent d’entendre prêcher le « Fils du charpentier » et essayent de le chasser de la ville. Les paroles de Jésus, rapportées par les Évangiles sont : « un prophète n’est méprisé que dans sa patrie et sa maison »

  • Notes bibliques :

*Le dictionnaire : profhths = Celui qui parle au nom de Dieu – Vient de fhmi = dire – donc : dire devant. *Quelques occurrences : Mt 2, 17 – 23, 34 Lc 3,4 1 Cor 14, 29 Mt 21, 11, 26 Jn 6, 14 Apoc 10,11 — *Selon les Traductions de la Bible en Français Courant (BFC), de la Parole de Vie (PDV), de la Nouvelle Bible Second (NBS) 1/ Mt 2, 17-18 BFC 17Alors se réalisa ce qu’avait déclaré le prophète Jérémie : 18« On a entendu une plainte à Rama, des pleurs et de grandes lamentations. C’est Rachel qui pleure ses enfants, elle ne veut pas être consolée, car ils sont morts. » PDV 17Alors se réalisa ce qu’avait déclaré le prophète Jérémie : 18« On a entendu une plainte à Rama, des pleurs et de grandes lamentations. C’est Rachel qui pleure ses enfants, elle ne veut pas être consolée, car ils sont morts. » NBS 17Alors s’accomplit ce qui avait été dit par l’entremise du prophète Jérémie : 18Une voix s’est fait entendre à Rama, des pleurs et beaucoup de lamentations : c’est Rachel qui pleure ses enfants ; elle n’a pas voulu être consolée, parce qu’ils ne sont plus. 2/ 1 Cor 14, 29 BFC 29Quant à ceux qui reçoivent des messages divins, que deux ou trois prennent la parole et que les autres jugent de ce qu’ils disent. PDV 29Deux ou trois peuvent parler au nom de Dieu. Les autres doivent examiner ce qu’ils disent. NBS 29Quant aux prophètes (profhths) que deux ou trois parlent, et que les autres jugent. Au verset 30, le mot employé est apokalufqn = révélation Il s’agit bien de « parler », après avoir reçu une « révélation » (donc, une parole divine) Apocalypse 10, 11 BFC 11On me dit alors : « Il faut une fois encore que tu annonces ce que Dieu a prévu (profhteusai) pour beaucoup de peuples, de nations, de langues et de rois. » PDV 11Ensuite on me dit : « Tu dois encore parler au nom de Dieu (profhteusai), au sujet de beaucoup de peuples et de pays, de beaucoup de gens de toutes langues et au sujet de beaucoup de rois. » NBS 11Alors on me dit : Il faut encore que tu parles en prophète (profhteusai) sur beaucoup de peuples, de nations, de langues, de rois. Chants :AEC 743 : La route est courte…AEC 317, Alléluia 46-09 : Laisserons-nous à notre table …AEC 628, Alléluia 47-15 M : La foi renverse devant nous …

Prédication

« Nul n’est prophète dans son pays » ! Nous et nos contemporains connaissons bien cette expression : elle signifie qu’il est difficile d’être reconnu et apprécié dans son propre pays ou parmi les siens. Jésus revient prêcher à Nazareth, ville où il avait passé son enfance… Mais les Nazaréens s’étonnent d’entendre prêcher le « Fils du charpentier » et essayent de le chasser de la ville. … Jésus dit : « un prophète n’est méprisé que dans sa patrie et sa maison »

  • Le « Fils du charpentier » …?? Si Jésus est le « Fils du charpentier », alors nous le connaissons, nous savons TOUT sur Lui … Il n’a rien à nous apprendre …. Une étiquette de plus !! … Mettre une étiquette sur le dos ou sur le front de quelqu’un, n’est-ce pas l’empêcher de s’exprimer … le dialogue, l’échange devient impossible … Il n’y a d’échange QUE dans le « différent » …

C’est le « Fils du charpentier » … !!!… Ce n’est pas un étranger ! Nous savons tout de lui !

  • Évidemment, avec l’étranger, il y a un risque, le risque de la rencontre … et ce n’est pas toujours facile de se risquer à la RENCONTRE : elle va me déstabiliser, m’obliger, peut-être, à me remettre en question ! … et je n’y suis pas toujours prêt …

La rencontre …. !!! … Depuis la Genèse jusqu’à l’Apocalypse, il est question de RENCONTRE : Dieu rencontre Adam et Ève, Adam rencontre Ève, Dieu rencontre Abraham, Dieu rencontre Jacob ( qui devient Israël), Jésus rencontre les gens sur son passage (qq. exemples), Paul rencontre le Christ sur le chemin de Damas, pour les Anciens de l’Apocalypse, il y a rencontre dans l’adoration …

  • Cet autre, dont la figure est l’étranger, est celui qui ne se laisse pas réduire au « déjà connu », à ce qu’il est, à ce que je comprends de lui … L’autre est fondamentalement ce qui échappe aux jeux des ressemblances ; en lui il y a toujours quelque chose d’ inatteignable … Il y a de l’incompréhensible qui nous échappe, qui échappe à toute anticipation, et à toute emprise…
  • Dans le dialogue, on veut toujours mettre en place des points communs, mais pourquoi ne pas laisser aussi poindre les différences, voire les différends qui nous animent, pourquoi ne pas se laisser rythmer par un double mouvement de rapprochement et d’éloignement … ?
  • S’il n’y avait pas de différence, pourrait-il y avoir RENCONTRE ?

…Si on continue à dire : C’est le « Fils du charpentier » … peut-il y avoir guérison, et, du coup, peut-il y avoir SALUT ?…

  • Ce rythme nous révèle que notre rapport à autrui est assez ambigu : Si l’étranger est celui qui stimule, éveille et enrichit, il est aussi celui qui dérange, qui désordonne et qui remet en question…

En affirmant que nul n’est prophète en son pays, la Bible implique logiquement que c’est toujours de l’étranger qu’arrive le prophète … C’est une manière de soutenir que seule une parole différente peut réellement nous enrichir… L’autre n’est-il pas constitutif de ce que nous sommes, étant tous structurés par nos relations, engendrés et transmis par l’Autre, les Autres (dans nos généalogies et nos rencontres) ? Mais cet autre nous fait peur, il est aussi porteur d’une menace, celle d’être dérangé dans nos conforts et nos certitudes, incompris, rejeté. Bon nombre de récits bibliques sont traversés par cette double attitude à l’égard d’autrui, de méfiance et d’approbation

  • Et il ne fit pas, là, beaucoup de miracles, à cause de leur absence de foi (verset 58).
  • Alors, chers frères et sœurs en J.-C, je vous invite à regarder maintenant, de plus près, notre 3ème lecture (Rm 3, 21-25) 23 « Car il n’y a pas de distinction : tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu ; 24et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce » et au verset 28 « Car nous comptons que l’homme est justifié par la foi, sans les œuvres de la loi. »

Paul parle par expérience et révélation … Justifiés par la foi ! … Il le sait parce qu’il l’a vécu, lui qui persécutait les Chrétiens, disciples de Jésus-Christ … Dans le passage précédent celui de ce Jour, il y avait eu des miracles, des guérisons, et des signes …. Et maintenant : RIEN ! … La force de Jésus serait-elle moins efficace, ou pas efficace du tout … ?… Nul n’est prophète en son pays … !!! … C’est le « Fils du charpentier » … !!! Et si c’est le Fils du charpentier, nous croyons en Lui en tant que « charpentier », et non pas en tant que « prophète », « porte-parole » de Dieu …. ! Il est enfermé « dans une boite » : celle de notre compréhension de l’autre, celle de notre compréhension du monde… Il n’est plus libre d’agir, de guérir, de justifier, de SAUVER … Alors que c’est LUI qui nous rend libres, n’emprisonnons pas le « SAUVEUR » dans un autre rôle, en le privant de la liberté de nous SAUVER … Au XVI° siècle, les Réformateurs l’ont bien compris Le moine Luther, si tracassé et s’auto-flagellant, a trouvé un chemin de liberté grâce à l’enseignement de Paul sur la justification. Celui-ci est venu juste à propos pour l’aider à contrer aussi la pratique devenue courante dans son Église (la catholique) consistant à administrer le salut des âmes à coup de mérites (et surtout de monnaie sonnante). Depuis le temps de Paul, le monde avait changé : la préoccupation principale n’était pas le Retour du Christ. C’était l’image de l’enfer qui pesait d’un poids lourd dans la conscience des gens du XVI° siècle, très préoccupés d’en être sauvés. Ce thème a été largement exploité pour soumettre les sujets des royaumes et de l’Église, et il occupait une grande place dans les esprits…. ! Quel bonheur, alors, d’être sauvé de l’enfer – et gratuitement ! – en vertu de la foi ! Cette théorie de la justification par la foi se trouve bien résumée en Galates, chapitre 3, v. 11 : « Celui qui est juste par la foi, vivra ». Paul utilise sa connaissance des « Écritures », que nous appelons maintenant « Ancien testament », pour forger sa théorie (Gal 3,11 est précisément une citation vétéro-testamentaire extraite de Ha 2,4). En effet, Dieu sauve d’une couverture à l’autre de notre Bible (AT + NT) De même, on lit en Es 45,22 : « Tournez-vous vers moi et soyez sauvés, vous tous les confins de la terre, car c’est moi qui suis Dieu. Il n’y en a pas d’autre ». L’idée du salut des peuples qui confessent le Dieu unique d’Israël (Adonaï Erhad) était alors largement répandue dans le Judaïsme. Aujourd’hui, la question du salut n’intéresse plus guère. . . De quoi, d’ailleurs, peut-on être sauvé ? D’un « enfer », qui a disparu de la représentation du monde à l’époque moderne – hormis pour quelques angoissés? Si la question de la perdition des païens (au temps de Paul) et celle de la menace de l’enfer (au Moyen Âge) paraissent aujourd’hui hors sujet n’est-il pas, alors, anachronique de poser la question de la justification par la foi ? Réfléchissons : Aujourd’hui, il me semble qu’être justifié par Dieu en vertu de ma foi signifie être reconnu par lui dans mes capacités de gérer mon existence et d’apprécier la beauté de la vie, en même temps que je reconnais la nécessité d’être rétabli, réconforté, re-dynamisé, réhabilité. Ainsi ma foi et le regard de Dieu sur moi, m’aident à reprendre conscience de ma place dans l’univers ; à comprendre que cet univers, j’en fais partie, je ne peux pas m’en extraire. Qu’au contraire, je ne peux vivre qu’en relation avec ce monde, avec ces autres humains que moi. Le besoin d’être justifié peut alors être défini comme le besoin de savoir que j’ai une place dans cet univers : ma place, le besoin de savoir que je suis à la bonne place, de savoir que j’ai un rôle à jouer – un rôle important, aussi mineur soit-il, de le savoir toujours à nouveau. Du coup, la raison d’être de la religion ne serait plus, aujourd’hui, de « sauver » des individus afin qu’ils soient béatement admis dans un royaume qui tomberait du ciel, mais de les encourager à une foi positive, une foi qui met en route, et constitue la force dont nous avons besoin pour prendre à bras le corps la gestion de ce monde. Une conception mécanique de la foi qui opérerait une sorte de salut-récompense priverait l’individu de liberté : Celui qui aurait pris conscience de son état de perdition, n’aurait d’autre choix que de saisir la planche de salut et la foi ne serait plus la confiance librement consentie, mais une nécessité. Aujourd’hui, il me semble qu’on est appelé à penser la « foi » autrement … peut-être plutôt comme source d’identité et de liberté d’action … Alors, faut-il toujours parler d’être « sauvé » ? ou, plus exactement d’être « libéré » … sauvé de nos carcans, sauvés de nos prisons, de nos enfermements, sauvés de ne pas savoir reconnaître la voix des prophètes ?!?!? – li – bé – rés – Soyons certains que ce Dieu de tous les « Possibles », ce Dieu dont le Nom peut se lire au « futur » (je suis celui qui serai), que ce Dieu mystérieux a pour nous des projets que nous ne connaissons pas, projets de bonheur et non de malheur … comme c’est écrit en Jérémie 29, 11 : « Car moi, le Seigneur, je sais bien quels projets je forme pour vous ; et je vous l’affirme : ce ne sont pas des projets de malheur mais des projets de bonheur. Je veux vous donner un avenir à espérer.» Du coup, la raison d’être de la religion est là, dans cette interprétation de Nos Textes Fondateurs : elle est là pour nous libérer de nos carcans, et nous aider à vivre. Ainsi, gratuitement justifiés par sa grâce, nous nous adressons à TOI :

  • Seigneur, je t’apporte ma difficulté à me laisser enrichir par l’autre… Toi, Tu es l’AUTRE…. Je veux changer ! Je veux être ouvert à une bonne RENCONTRE avec les autres, avec mon prochain, avec TOI ….

Seigneur, viens au secours de mon incrédulité ! Apprends-moi à VIVRE, aide-moi à VIVRE ! Plus de prisons dans ma vie, plus d’idées toutes faites, qui m’empêchent de voir l’AUTRE tel qu’il est ; je veux sortir de l’enfermement dans lequel je suis, et qui t’empêche de me guérir, de me tranquilliser, de me donner confiance, de me libérer, de me sauver… Si le Christ vous affranchit, vous serez réellement libres ! … vous aurez confiance (foi), vous pourrez écouter les « prophètes », vous pourrez « prophétiser » , parler de la part de Dieu … C’est à cela que vous êtes appelés : être des témoins, des porteurs de cette Parole qui vous porte. Béni sois-tu Seigneur ! Amen.