Fête des Récoltes

Notes bibliques

Choix du Capitule pour la méditation 

« Que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni ». Il a paru opportun de centrer la prédication sur ce capitule car la matière est particulièrement riche et le sujet suffisamment crucial et actuel pour ne pas déborder sur le second thème contenu dans l’Évangile du jour et qui a trait à l’accueil privilégié réservé aux enfants dans le Royaume. Ce sujet peut d’ailleurs à lui seul faire l’objet d’une méditation.

Bibliographie
Incontournable : L’Évangile de Marc, Parole de puissance, Message de vie, Jean VALETTE, Les Bergers et les Mages. Rouen 1986 (tome II)
Catholique : L’Évangile selon Marc de R.SCHNACKENBURG, Coll. Parole et Prière. Desclée de Brouwer. Paris 1973 (tome II)
Indispensable : Vocabulaire biblique, Collectif. Sous la direction de JJ. Von ALLMEN Delachaux & Niestlé. Neuchâtel Paris 1964
Utile : Témoignage de l’Évangile de Marc, Béda Rigaux, Desclée de BrouwerParis 1965
Remarquable : L’Évangile de Marc, Elian Cuvillier,  « Bible en Face-Traduction et lecture » Coédition Bayard Labor et Fides Paris 2002
Utile complément : deux articles consacrés l’un au mariage, l’autre au divorce, Encyclopédie du Protestantisme. Labor et Fides-PUF Coll. Quadrige. Paris 2006

Suggestions de Psaumes et Cantiques
Psaume 62 : En toi, mon Dieu, str. 1, 3 & 4
AEC 419, Alléluia 43-09 : Torrents d’amour et de grâce, str. 1, 2 & 3
AEC 407, NCTC 270, Alléluia 43-04 : Seigneur reçois, Seigneur pardonne, str. 1, 3 & 4
Suggestions de textes liturgiques :
Traces vives, Paroles liturgiques pour aujourd’hui, Labor et Fides Genève 1997
Accueil p 9 Suzanne SCHELL
Louange p. 17 Lytta BASSET
Humilité p. 57 S.SCHELL
Paroles de grâce p. 65Francine CARRILLO
Confession de foi p. 75 F.CARRILLO
Ouverture à la Parole p. 79 S.SCHELL
Prière p. 116 S.SCHELL
Bénédiction p. 127 L.BASSET

 

Prédication

Que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni.

En région parisienne deux mariages sur trois s’achèvent par un divorce. L’institution matrimoniale est très largement mise à mal : elle est en butte à de sérieux coups de boutoir. Les accidents de la vie, le chômage, le dérèglement des mœurs, l’absence de références morales et spirituelles, la généralisation de l’union libre, sans parler de l’extraordinaire facilité avec laquelle les divorces par consentement mutuel sont prononcés, constituent autant d’éléments de fragilisation du mariage. Sur un tel sujet, dire une parole d’Évangile peut paraitre totalement « décalé », inapproprié et même vain, et pourtant il est indispensable d’annoncer avec persévérance la Bonne Nouvelle, fut-ce à contre-courant, dans l’adversité, l’hostilité, et parfois bien pis, dans l’indifférence. Le texte qui est proposé à notre méditation constitue une illustration particulièrement significative de la façon dont le Christ Jésus prend, une fois de plus, à contrepied ceux qui veulent le piéger. Interrogé par les Pharisiens au sujet de la répudiation, il va essentiellement se prononcer sur le mariage et d’une façon plus générale sur l’union de l’homme et de la femme. Le message qu’il nous délivre nous surprend et nous étonne, car au lieu de répondre à la question posée, il recentre le vrai débat et nous renvoie la question, selon une méthode qui lui est coutumière. En cela, il perce à jour les desseins inavoués de ses détracteurs, et plus utilement il nous invite à réfléchir et à combattre les idées reçues dont nous sommes pétris.

Cela rappelé, ne jetons pas la pierre aux Pharisiens, nous leur ressemblons tant… et nos Églises avec ! Car à propos d’un sujet de société aussi piégé que le mariage notre problématique est souvent binaire, entre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. À la suite de ces « connaisseurs de la loi » nous avons une singulière propension à tout vouloir figer, mettre sous forme de normes, légiférer, puis à juger et à jeter le discrédit et l’anathème sur ce qui n’est pas religieusement et/ou moralement correct. « Que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni ». Ce verset a donné lieu à maints contresens. La sacralisation du mariage n’en a pas étéle moindre. Il s’agissait de la part de l’Église institutionnelle de conférer à cette union un caractère indissoluble. Ainsi, sans en dénier la réalité, il fallait que les inéluctables crises que traverse un couple, tout au longd’une vie commune soient surmontées, dépassées ou présentées comme des épreuves voulues par la divine Providence…Et sirien ne s’arrangeait, on avait toujours le recours ultime de la séparation de corps ! De surcroit, le droit canonique prévoyait tant de causes de nullité du mariage qu’il était toujours loisible de le faire annuler, tout en demeurant en règle vis-à-vis de l’institution ecclésiale.
Suprême hypocrisie ! Ne trouvez-vous pas qu’il y a une étonnante similitude entre cette position et celle professée par les Pharisiens ? Peut-on répudier sa femme demandent-ils non sans duplicité ? Nous sommes dans une société patriarcale, et bien évidemment la femme n’a pas voix au chapitre.

Première surprise : Jésus leur demande aussitôt ce qu’a ordonné Moïse. Ils répondent sans désemparer que l’on peut en pareil cas recourir à une attestation de répudiation, et de la sorte l’affaire est faite et partant le divorce consacré et officialisé. Alors pourquoi donc avoir posé la question ?

Deuxième surprise : Jésus va alors les pousser dans leurs retranchements. Au-delà du formalisme, de la légalisation de la rupture, il va leur faire toucher du doigt la raison d’être d’une telle pratique. « C’est à cause de votre obstination » – littéralement, à cause de la dureté de votre cœur – «  que Moïse a écrit ce commandement ». Somme toute, si vous viviez la relation de couple autrement qu’en termes d’affrontement, de refus du dialogue, d’agressivité et d’épreuve de force, bref de déni de l’autre, peut-être ne serait-il ni utile ni opportun d’envisager l’idée même de la répudiation. Et tout naturellement, Jésus va rappeler le dessein de Dieu pour sa création : l’homme et la femme sont ici placés sur un pied d’égalité, dans une situation d’équivalente dignité, ils ont vocation à s’unir. Tels deux cours d’eaux qui quittent la source, que sont leurs parents, ils vont confluer l’un vers l’autre pour ne plus former qu’un seul fleuve. Réunis, unis, mêlés, brassés façonnés l’un par l’autre, cette complémentarité ne sera concevable que dans la durée. Pour y parvenir, il suffit d’appliquer quelques maîtres mots : écoute, respect, attention, disponibilité. C’est là un idéal vers lequel il faut tendre. L’objectif est à notre portée, il suffit de nous en donner les moyens en vivant, malgré l’érosion du quotidien, un amour sincère en esprit et en vérité sous le regard de Dieu et au bénéfice de sa Parole.

Cela dit, ne sombrons pas dans l’angélisme. Certaines situations conjugales peuvent virer au véritable cauchemar  notamment quand surviennent les épreuves de l’infidélité, de l’alcoolisme, du chômage, ou plus simplement de l’incompréhension de l’indifférence et du « désamour » de l’autre. Faut-il souffrir en silence notamment avec les dégâts collatéraux que cela ne manque pas d’engendrer auprès des enfants et partant proscrire toute possibilité de divorce ? En nous disant «  que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni », Jésus ne place-t-il pas la barre trop haute pour nous ? Est-il possible de suivre vraiment cette parole ? Une fois encore, nous cédons à la tentation légaliste. Dans son Ministère et ses propos Jésus a systématiquement prôné le dépassement de la Loi ; ce n’est donc pas pour que la Tradition crée et sacralise de nouveaux carcans culpabilisants et suscite des cas de conscience sur la base erronée et fallacieuse d’une approche littérale de ses paroles. Une chose est hors de doute, en rappelant la volonté initiale du Créateur, Jésus poursuivait un dessein : celui faire naitre dans le cœur de l’homme et de la femme qui s’unissent le sentiment le plus vif et le plus élevé de leur responsabilité morale. En mettant en pratique cette parole, ils vivent au plein sens leur engagement réciproque – c’est-à-dire leur mise en gage – et, partageant authentiquement leur amour posent les jalons du Royaume qui est et qui vient.
Ainsi, pour éviter le piège du pharisaïsme, qui est notre tentation de tous les instants, gardons-nous du juridisme et du légalisme et proscrivons toute velléité de jugement. Face à des couples en difficulté, soyons présents, osons dire une parole d’espérance ou de consolation, exprimons notre compassion, prions, exerçons notre discernement, apprenons à les aider et à les accompagner dans l’épreuve qu’ils traversent. Mais surtout, souvenons-nous en toutes circonstances que l’Évangile est Parole de vie qui élargit et libère, en aucun cas Loi qui interdit emprisonne et culpabilise.
Que Dieu nous soit en aide !