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3e dimanche du Carême

Les textes retenus suivent le lectionnaire « Paroles pour tous »

 

 

NOTES BIBLIQUES JN 2/13-25

  • – Jn 2/13-25 se compose de 2 textes.
  • 1er récit : Jn2/13-22 : Jésus chasse les marchands du temple. Un récit connu des 4 évangiles avec quelques variantes (Mt 21/12-13, Mc 11/15-19 et Lc 19/45-48)
  • 2ème texte : Jn 2/23-25 : Un sommaire, la foi et les signes.
  • – Jn 2/13-25 fait partie de la séquence Jn 2/13 –Jn 4/3 où les épisodes se passent à Jérusalem ou dans la Judée.

1°) Jn 2/13-22

– Le récit est précédé par le signe de Cana où Jésus changea l’eau en vin. Jésus se révèle comme Celui qui apporte le renouveau dans le système religieux de son peuple.

V13 : Le contexte du récit.

Jean situe l’histoire à Jérusalem et dans le temps de la Pâque. Dès le début de son ministère dans l’évangile de Jean, Jésus monte à Jérusalem comme un de ces pèlerins juifs pour qui la Pâque est la principale fête annuelle ! La Pâque rappelle le passage de Dieu qui sauve son peuple en Égypte. Il a épargné à son peuple la mort en Égypte. Il a libéré son peuple de l’esclavage en Égypte et il l’a fait passer la mer à pied sec.  

Que va faire Jésus à Jérusalem ? Il va au temple !

 

  1. V14-16a : L’action de Jésus au temple.

Le temple est le haut lieu où Dieu habite avec son peuple et fait de la ville de Jérusalem la cité sainte d’Israël. Au temple les croyants viennent accomplir les pratiques religieuses : la prière, les sacrifices et l’impôt du temple. Et en cette période de la Pâque, avec les pèlerins l’affluence au temple est à son comble. Les vendeurs d’animaux pour les sacrifices de différents animaux ainsi que les changeurs d’argents pour payer l’impôt du temple se trouvent sous les portiques des païens, loin du « Saint des saints » où réside la gloire de Dieu.   Ils sont présents au temple pour vendre ce dont avait besoin les croyants et les pèlerins pour leur rite religieux. « Ces marchands et ces changeurs étaient nécessaires au fonctionnement du système religieux et étaient des auxiliaires légitimes du clergé de Jérusalem. »

Pourquoi alors Jésus a eu vis-à-vis de ce marché ce geste violent ?

Jean ne parle ni de colère soudaine de Jésus ni de vente abusive des marchands !

Jésus « trouva » v14 les vendeurs et les changeurs. C’est-à-dire que Jésus est allé à la rencontre de ces gens-là et a décidé de faire ce geste délibérément ! Jésus a fait un fouet à cordes pour chasser les animaux pour les sacrifices et non les vendeurs. Jésus n’use pas de la violence physique vis-à-vis de l’humain.

En chassant les animaux, en jetant par terre l’argent des changeurs, Jésus ne purifie pas le temple. Il pose un geste prophétique, un geste symbolique pour passer son message en frappant les imaginations. C’est comme faisaient les grands prophètes ! Qu’est-ce qu’Il veut dire ? Que le culte sacrificiel est aboli avec Lui ! Qu’il rejette et renverse ce système religieux, fondamental pour son peuple celui des sacrifices pour opérer la réconciliation avec Dieu !»

« L’allusion aux trois catégories : bœufs, brebis et colombes, souligne l’ensemble du système sacrificiel que Jésus s’en est pris ». Dans le récit de Cana, Jésus apporte le renouveau en accomplissant la loi et les promesses. Ici, Jésus se radicalise en rendant périmés les rites sacrificiels !

  1. V16b-17 : Les explications du geste.

V16b : Jésus met une parole sur son geste.

Il parle pour la 1ère de « son Père ». Il révèle ainsi son identité de Fils de Dieu qui lui donne l’autorité de faire ce geste. Il est chez Lui en ce lieu.

Jésus oppose « la maison de son Père » à « une maison de commerce » ou «à une  maison de trafic ». Une maison de commerce place les croyants dans une relation du donnant-donnant avec Dieu que Jésus dénonce. Mais au-delà de cela, Jésus rejette la relation avec Dieu sous le registre comptable d’offrandes et de sacrifices, censés obtenir la faveur divine.

Mt, Mc et Lc oppose la maison de prière en référence à Ésaïe 56/7 à la caverne de bandits (Jr 7/11).

Jean fait référence à Zacharie 14/21 « Il n’y’aura plus de marchands dans la maison du Seigneur tout-puissant, en ce jour- là ! » Le geste prophétique de Jésus annonce l’arrivée de ce temps !

Désormais, dans Jn, Jésus révèle Dieu comme son Père et offre pour les croyants une relation nouvelle à Dieu qui exclura toute démarche d’achat ou de mérite de la bienveillance divine.

Jésus annonce la suppression de l’usage des sacrifices par ce geste de chasser les vendeurs du Temple. Nous pouvons ainsi nous approcher et compter sur le seul et l’unique sacrifice de Jésus Christ par lequel le salut de Dieu nous est offert !

V17 : Une explication des disciples

Les disciples émettent une interprétation tirée de Ps 69/10 : la prière d’un juste persécuté pour éclairer le geste de Jésus. Le zèle, l’amour de Jésus pour la maison de Dieu, pour son Père en est la cause de son geste mais aussi de sa mort. Le futur du verbe « le zèle de ta maison me dévorera » fait allusion au conflit mortel qui se développera entre Jésus et les autorités religieuses. « Les disciples annoncent les conséquences à venir d’un geste par lequel Jésus a attaqué en plein fouet le système du temple. »

Dans Mc et Lc, après avoir chassé les vendeurs du temple, il est écrit que les chefs juifs cherchaient à le faire mourir. 

 

  1. Jn 2/18-22 : Le malentendu sur le temple entre les chefs juifs et Jésus

Face au geste violent de Jésus, les chefs religieux réagissent en demandant à Jésus un signe qui lui donne le droit d’agir ainsi. Dans la bouche des chefs religieux, le signe demandé est un acte prodigieux, un signe venant du ciel (Mt 8/11) qui permet de l’identifier comme un envoyé de Dieu !

Jésus donne une réponse provocatrice, celle de la destruction du temple et sa reconstruction en 3 jours. Le v21 nous explique que le temple dont parlait Jésus était son corps. Les chefs religieux pensent à la bâtisse, d’où le malentendu !

Le mot par le quel est traduit ici « temple » est « Naos »v20, sanctuaire non pas « hieron »v14. C’est le mot utilisé par Paul pour désigner le corps comme le temple de Dieu, le temple du St Esprit.

Pour le chrétien, Jésus fait allusion à sa mort à sa résurrection le 3ème jour. En plus le verbe grec qui est traduit par « rebâtir », « reconstruire » est le verbe qui sert à proclamer la résurrection dans le Nouveau Testament : « relever »v20 « je le relèverai » dit Jésus ; « Tu le relèvera en 3 jours » dit les chefs religieux et « quand il fut relevé d’entre les mort » v21

Le signe prodigieux que Jésus peut donner à ces chefs religieux est donc la mort et la résurrection du Fils de Dieu.

Les disciples n’ont compris le sens de cette réponse provocatrice de Jésus sur le temple qu’après la mort et la résurrection de Jésus qui n’éclaire pas seulement les paroles et les actes de Jésus mais aussi toutes les Écritures.

C’est la foi en la résurrection de Jésus-Christ qui permet de comprendre l’Écriture, les jugements et les promesses de Dieu !

 

2°) Jn 2/23-25 : Le sommaire. La foi et les signes miraculeux.

Jésus est toujours à Jérusalem pendant la période de la Pâque. Jésus a fait beaucoup de signes miraculeux que nous ignorons car jusqu’à ce chapitre il n y’a que le miracle de Cana qui nous est raconté.

Jean raconte brièvement que beaucoup crurent en Jésus en voyant les signes miraculeux.   La foi peut donc naître de la vue des miracles.

Mais Jésus qui connaît intimement l’homme disait qu’il ne leur fait pas confiance. Pour Jésus, les miracles ne font pas naitre en l’homme la vraie foi ni la conversion des cœurs.

Le récit suivant sur Jésus et Nicodème va justement poser les exigences profondes d’une vraie conversion et une authentique foi.

 

Pistes de prédication :

  • Jésus supprime une pratique religieuse ancestrale, celle du sacrifice, qui est fondamentale pour son peuple juif. Il bouscule et bouleverse ainsi la piété établie depuis des générations. Il crée un vide et un manque pour pouvoir le recevoir ! Dans notre communauté, quelle pratique historique Jésus pourrait supprimer pour que nous soyons capables de le recevoir avec la nouveauté qu’il apporte ? Ce qui rejoint la question de savoir : comment accueillons-nous les personnes nouvelles à notre communauté, à notre pratique religieuse. Est-ce que nous leur donnons de la place dans notre paroisse ? Ex : Lever leurs bras pendant la louange ? Est-ce que nous sommes capables de recevoir d’elles des idées et des pratiques nouvelles ? Ex : Des cantiques plus dynamiques  sans juger que c’est trop évangélique ?
  • Supprimer les sacrifices ne nous dérange pas car nous sommes d’accord pour dire qu’il n’est pas nécessaire de tuer une vie pour honorer Dieu. Mais le récit nous cite 3 animaux (bœuf, brebis et colombe) qui correspondent à la richesse et à la classe sociale du croyant. Le riche offre à Dieu le bœuf ; le moyen, la brebis et le pauvre les colombes. Nous reconnaissons par cette catégorie qu’il y a un souci des petits. Mais la suppression des sacrifices supprime aussi la différence de classes devant Dieu. Il n’y a plus ni riche ni pauvre devant Dieu et devant les hommes en Jésus-Christ. Tous espèrent et vivent de l’amour gratuit et incommensurable de Dieu ! Comment alors dans notre paroisse nous témoignons de cette abolition de classes,… de sexes, d’origines ? Nous annonçons l’évangile à tous aux membres de la paroisse, à ceux qui cotisent comme à ceux qui demandent des actes pastoraux et qui disparaissent ! Nous confectionnons une corbeille fermée pour que chacun donne son offrande dans le secret et sous le seul regard de Dieu ?
  • Le texte dit que beaucoup croient en Jésus en voyant les signes miraculeux mais Jésus dit en connaissant l’homme qu’une telle foi n’est pas vraie ! Dans notre prière, nous demandons pourtant miracle, signe de la part de Dieu pour savoir que Dieu existe, qu’Il s’intéresse à nous et pour fortifier notre foi ! Et souvent nous disons que Dieu ne nous écoute pas car nous n’a rien vu ! Ou bien nous disons que nous n’étions pas attentifs et nous n’avons pas vu le signe de Dieu ! Mais au dire de Jésus, nous avons les écritures pour fortifier notre foi, et la mort et la résurrection de Jésus comme fondement de notre foi. Dieu écoute et exauce notre prière dans l’absence de signe. Et nous n’avons pas à nous culpabiliser de ne pas voir les miracles car le vrai miracle c’est notre foi en Jésus-Christ qui reste vivante dans les moments difficiles !

 

Prédication

Chers sœurs et frères en Jésus-Christ !

Pour sa 1ère montée à Jérusalem au temps de la Pâque, Jésus a fait fort.

Il va au temple. Il trouva les marchands d’animaux et les changeurs d’argents et faisant un fouet avec des cordes, il chassa tous les animaux et leurs marchands, jeta par terre la monnaie des changeurs et renversa leurs tables !

Un geste violent qui marque le ministère de Jésus et retracé par tous les évangiles.

Un geste qui choque ses contemporains et les chefs religieux car il s’attaque quand même à une pratique fondamentale et ancestrale de la religion de ses pères !

Les animaux et les marchands ne sont pas des intrus dans le temple. Ils sont placés sur le parvis des païens pour permettre aux croyants et aux pèlerins qui viennent de loin en ce temps de Pâque de pourvoir trouver facilement leur animal pour le sacrifice !

Les changeurs d’argents aussi sont au temple pour que les croyants puissent acquitter leur impôt du temple qui un demi-sicle ou 2 drachmes par juif à partir de sa puberté. Cet impôt du temple sert pour l’entretien du temple et les frais du culte. Les pèlerins profitent certainement de leur venue au temple de Jérusalem pour payer ce qu’ils doivent comme leur contribution au temple. Et avoir les changeurs d’argents, sur place pour que l’argent romain qui ne peut pas entrer au temple soit converti en drachmes, est une disposition qui aide les croyants à accomplir leur geste de piété.

Nous reconnaissons donc que les animaux, les marchands, les changeurs d’argent malgré les bruits qu’ils puissent faire sont là dans ce temple de Jérusalem comme auxiliaires légitimes du clergé. Ils sont nécessaire au fonctionnent du système religieux. Ils sont au service de la loi de Dieu donnant ainsi aux croyants le moyen de l’obéir. La question nous est donc posée à savoir : pourquoi Jésus les a-t-il chassés en faisant un fouet avec des cordes ? Certes, il n’est pas dit que Jésus soit fâché ou en colère mais son geste reste violent ? Alors pourquoi ce geste ?

Le verbe « chasser » nous rappelle l’action « de chasser » les esprits impurs par laquelle Jésus délivre le possédé. Est-ce que ce temple est malade ? Jésus avec son fouet chassa, expulsa les animaux qui représentent le culte sacrificiel mais n’use pas de violence à l’égard de l’humain ! Est-ce que le culte est aliéné ?

Jésus en tout cas explique son geste en disant : «Enlevez tout cela ici, ne faites pas de la maison de mon Père une maison de commerce ! »

– Jésus oppose le temple qui est la maison de son Père à une maison de commerce.

À la différence des 3 autres évangiles, Jésus parle de la maison de son Père et non la maison de prière. Une citation tirée du livre de Zacharie 14/21 « Il n’y aura plus de marchands dans la maison du Seigneur des armées en ce jour-là. »

Jésus annonce alors que « ce jour-là », cette promesse du jour du Seigneur est arrivée avec Lui. Avec Jésus, le peuple de Dieu aujourd’hui entre dans « ce jour-là », « ce temps de Dieu » où tous seront invités à entrer en relation avec Dieu sans avoir recours ni au prêtre ni aux sacrifices.

Pour la 1ère fois, Jésus appelle le Seigneur « mon Père » et donc annonce comme étant le Fils de Dieu ! Jésus donc ose agir ainsi car Il est chez lui !

Dans la maison de son Père, les relations sont basées sur l’amour gratuit, l’écoute et la confiance entre le Père et ses enfants. En appelant Dieu mon Père, Dieu se révèle donc en Jésus-Christ qui rend Dieu proche des humains !

 

Dans la maison de commerce, même si le commerce est équitable il y a quand même cette notion première de « payement » donc une relation basée sur le donnant-donnant mais en plus il y a la notion d’achat. Le peuple croyant en obéissant à la loi sur l’offrande et les sacrifices pourrait s’estimer heureux d’avoir acheté tout ce qu’il faut pour mériter l’amour de Dieu ! La relation avec Dieu vit sur l’ordre du mérite. Alors Jésus en étant le Révélateur du Père, place les croyants dans une nouvelle relation avec Dieu qui ne s’inscrit pas sous le registre comptable d’offrandes et de sacrifices, censé obtenir la faveur divine.

Nous ne pouvons ne pas penser aux indulgences au temps de Luther auxquelles beaucoup de chrétiens se fiaient pour mériter, payer, acquérir le pardon de Dieu !

Aujourd’hui, est ce que cette notion de mérite est complétement rayée de notre relation avec Dieu ? Nous entendons encore pourtant cette question de nous-mêmes ou des autres quand ça va mal : mais qu’est- ce que j’ai fait au bon Dieu  pour mériter cela ?

Jésus par ce geste violent s’expose comme un réformateur qui veut rétablir la vraie relation entre Dieu et les humains enracinée dans l’amour gratuit, l’écoute et la confiance réciproque ; un Réformateur qui veut rétablir le vrai sens du culte !

On peut dire alors que le culte était aliéné, que Dieu est enfermé dans ces pratiques religieuses. Jésus est venu délivrer le culte en rendant son vrai sens qui est la conversion du cœur et non la multiplication des sacrifices. C’est ce que nous lisons dans les textes des prophètes.

Jésus est venu libérer Dieu de la main des hommes et en même temps libéré l’homme du poids de la loi ! Dieu est le Père de Jésus, l’amour qui s’est fait chair !

– Jésus en chassant les animaux, en reversant les tables des changeurs et donnant l’ordre : « d’enlever tout cela » et de garder la maison de son Père pose un acte prophétique, un geste symbolique celui de la venue du Messie qui supprime tous les cultes sacrificiels ! Désormais avec Jésus, les rites sacrificiels sont périmés !

Ce qui ne laisse pas indiffèrent ni les disciples qui y voient le zèle du Messie pour son Dieu ni les chefs religieux qui sont choqué et lui demande un signe miraculeux qui justifierai un tel geste ! Car Jésus s’est attaqué à un élément fondamental, historique, ancestral dans la religion de son peuple celui du sacrifice. C’est tout le système religieux qu’il attaque de plein fouet !  

Désormais, en Jésus, tous les hommes sont pareils devant Dieu. Il n y’a plus de différence de classes exprimée par la différence d’animaux au sacrifice.

Désormais, le seul sacrifice de Jésus est le signe miraculeux donné à voir aux chefs religieux et à tous les hommes. Croire en la mort et la résurrection de Jésus comme le sacrifice du Fils de Dieu pour notre salut est le signe miraculeux de Jésus dans notre cœur et dans notre vie.

Désormais, le ministère de Jésus sera un ministère dévoré, consumé, porté par le zèle, l’amour ardent et passionné pour Dieu et pour les humains. Et nous savons que cet amour a fini par le don de la Vie de Jésus sur la croix  où il se révèle être le Sauveur du monde !

Aujourd’hui reconnaissons-le qu’il nous manque ce zèle pour Dieu et pour les humains, mais il y a des sujets, des causes qui nous prennent aux tripes, lesquels ?

En ce temps de carême où les jeûnes se pratiquent, vivons plutôt le don car c’est par le don de la vie de Jésus-Christ que nous recevons notre pardon et notre réconciliation avec Dieu !

Amen 

Thématique :Culte /Sanctifiation/Sacrifice/Incarnation/liberation