3e dimanche de Carême

Notes bibliques

Le contexte large
Luc 13/1-9 se situe dans la section de l’évangile qui raconte la montée de Jésus vers Jérusalem, lieu de la passion qui commence au ch. 9/51. Dans ce voyage, Jésus est confronté de plus en plus à ses opposants et au manque de foi de ses interlocuteurs. D’où l’appel de Jésus à la conversion.

Le contexte proche
Le texte de Luc13/1-9 s’inscrit dans l’exigence de reconnaître le temps présent qui est l’arrivée du temps de Jésus le Christ et l’imminence du jugement. Cf. Luc 12 /54-59.

Plan
Luc 13/1-5 : Deux appels à la conversion
Luc 13/6-9 : Une grâce !

Commentaire du texte
1ère partie. v1-5
Il y deux événements racontés qui décrivent une mort « injuste ». Après l’exposition des faits, la question sur la relation que peut avoir cette mort et le péché des victimes est posée. Par le biais de cette question est exposée une opinion fausse des interlocuteurs de Jésus qu’il réfute catégoriquement. Par deux fois, il dit : «  Non ! ». Il les appelle à la conversion. Et leur refus entraînera une mort semblable.

v1. Les Galiléens sont un groupe de résistants à l’occupation romaine. Ils sont assez remuants et souvent en conflit avec la garnison romaine.
Notre texte évoque une des rébellions des Galiléens contre Hérode qui a mal fini. Pilate a massacré ces Galiléens, ces rebelles. Leur sang fût mélangé à celui des animaux sacrifiés au temple « le sang de celui de leurs sacrifices ». C’est un drame horrible qui est rapporté par « des gens qui surviennent à ce moment-là. » Le culte a été profané. Dieu a été déshonoré. Le peuple est dans l’impureté car le rite de la réconciliation est violenté.

v2. Jésus sans être demandé intervient dans le dire de ces gens en posant la question sur le lien que les gens peuvent faire entre le crime et la grandeur de leur péché. Les auditeurs de Jésus pensent donc qu’il y a une corrélation entre l’événement dramatique et le degré du péché des victimes. L’idée de la rétribution : récompenser l’homme selon ce qu’il mérite et le châtiment de Dieu ne sont pas étrangers à l’ancien Testament. Dieu prend compte de ce que l’homme fait de bien ou de mal. La souffrance de l’homme est le résultat de l’état du péché de celui-ci. Et le bonheur est la récompense de sa justice, sa sainteté.
La question de Jésus sert à amené ses auditeurs à une autre vérité : l’urgence à conversion.

v3. On retrouve la même phrase au v5.
Jésus dit sans ambiguïté que : cette idée de cause à effet entre la mort « injuste »  et le degré du péché est fausse. Mais par contre, il annonce la nécessité de se convertir sinon « le même sort », « la même perdition » . Jésus n’annonce pas une mort prochaine mais la nécessité de prendre conscience de la condition pécheresse de l’homme. L’accent est porté sur l’impérative de la conversion et non pas sur la similarité de la perdition. Parce que l’homme est pécheur, il est donc menacé de mort, de perdition car il est coupé de Dieu, de la Vie.
Les auditeurs de Jésus sont devant un choix : se convertir ou se perdre. Et leur choix engage tout leur avenir.
« A l’inverse d’une justice divine impersonnelle fonctionnant sur le mode comptable, Jésus se fait donc le héraut d’un Dieu interpellant tout un chacun de manière absolue. »

v4. Jésus lui-même rappelle à ses auditeurs un autre événement catastrophique. La tour de Siloé, au sud-est de Jérusalem, a écrasé dans sa chute 18 personnes. Jésus refuse pour la deuxième fois de mêler Dieu dans cet accident. Dieu n’a rien à avoir dans ce malheur. Et le degré de la culpabilité des victimes n’est en rien dans cet accident. Ils ne sont pas plus coupables que les autres. Ce qui sous-entend, qu’ils ne méritent pas cela plus que les autres.
Tous sont pécheurs alors tous doivent se convertir, tourner vers Dieu pour qu’ils soient tournés vers la Vie.
Jésus déplace les auditeurs du pourquoi « ça ? », « tel sort ? » vers l’avenir d’une vie tournée vers Dieu.

2ème partie. v5-9
Jésus raconte une parabole sur un figuier planté qui n’a pas donné de fruit durant 3 ans. Au lieu d’être coupé, le figuier infructueux reçoit un sursis, une grâce d’une année et une promesse de bon soin par son vigneron.

v6. Le figuier est improductif. L’homme sans doute le propriétaire est déçu de ne pas y trouver de fruit.

v7. L’homme après 3 ans de patience et d’espérance face au figuier infructueux informe le vigneron de l’état de ce figuier inutile et lui ordonne de le couper.

v8-9. Le vigneron plaide en faveur du figuier. Et voilà la surprise, l’imprévu du récit, le vigneron devient « l’intercesseur » du figuier. Il se met entre le maître qui en a assez et le figuier sans fruit. Il offre au figuier une année en plus et des bons soins. Il lui ouvre une possibilité d’un avenir autre que la mise à mort, la coupure s’engage à y contribuer. Alors que tout semble être fini, joué, une nouvelle vie, une nouvelle espérance est donnée, proposée au figuier, aussi imprévisible que l’abattage était prévisible. C’est donc au figuier seul à saisir cette espérance en produisant du fruit c’est à dire en se convertissant.
La relation entre v1-4 et la parabole v5-9 réside dans cette Vie pour laquelle Jésus appelle à la conversion et vers laquelle le figuier est promis de façon inattendue.

 

Pistes de prédication

Les accidents mortels ne sont pas une punition de Dieu !
Pourquoi ça m’arrive à moi ? Qu’est ce que j’ai fait pour mériter ça ?
Des questions qui restent sans réponse. Jésus nous détourne de cette préoccupation qui nous mange la vie en faisant entrer la notion de la conversion. Passe à la conversion. Passe à un changement de regard. Tourne à la vie devant Dieu et avec Dieu !

La conversion n’est pas la réponse à l’origine des souffrances. Elle déplace et décentre l’homme vers quelque chose de plus constructif. Que peut faire l’homme croyant dès à présent face aux souffrances dont il en est le témoin ? Agir et réagir pour l’homme souffrant comme Jésus l’a fait dans ces différentes rencontres. Refuser d’être un spectateur passif et ou des auditeurs blasés des mauvaises nouvelles mais un acteur engagé et auditeur compatissant et agissant pour le bien-être de tous. Refuser de mettre sur le dos de Dieu toute la responsabilité du mal du monde et prendre sa responsabilité envers les prochains.

La grâce : un don inattendu !

La mort concerne tout le monde ! Les souffrances touchent tout le monde ! Si la logique de la rétribution est à maintenir, le monde entier devrait déjà être dissout déjà bien longtemps. Tout le monde est pécheur. Personne ne porte le fruit que le maître attend du figuier. Nous ne sommes pas porteurs du projet de Dieu pour sa création. Le jugement peut s’abattre ! Mais Jésus-Christ a fait que la hache soit suspendue pour un temps. Que le jugement soit reporté ! La mort n’est plus une fatalité. L’homme peut espérer la vie venant de Dieu, le pardon de Dieu, l’espérance de Dieu, grâce à Jésus-Christ son intercesseur et défenseur auprès de Dieu. L’homme peut même espérer de porter de fruit s’il saisit ce temps en plus parce qu’il est aux bons soins de Jésus-Christ.

Jésus qui appelle à la Vie et qui donne à l’homme la Vie conjugue la responsabilité de l’homme sur sa vie : être avec Dieu et l’espérance inattendue qui ouvre un temps nouveau, la grâce inattendue : une sentence arrêtée, un temps en plus, et de l’aide pour porter du fruit

 

Prédication

Pourquoi la mort ? Comment vivre ?
Quelle question est pour vous la plus importante ?
L’homme a du mal avec le mal. Les multiples : « Pourquoi ça ? » « Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? » Il cherche les causes de ses souffrances qui restent sans réponse. Des vies, des relations peuvent être gâchées et perdues à cause de cette recherche de l’origine ou de l’acteur des malheurs humains. On accuse. On se culpabilise. Souvent l’homme incombe à Dieu leur malheur. Dieu les a puni ou c’est le jugement de Dieu.. Mais tout cela conduit l’homme où ? Vers un éloignement de l’homme à Dieu. Vers une classification des hommes comme des grands et des petits pécheurs, des justes et des injustes. L’homme n’a plus dès lors des regards fraternels ni de compassion. Les victimes méritent leurs malheurs qui sont à la mesure de leurs péchés. Les épargnés se croient être des justes devant Dieu et mérite leur salut ! Les souffrances sont banalisées.

C’est faux dit Jésus ! Dieu n’est pas un comptable qui additionne les fautes et envoie la facture monnayant les épreuves terrestres. Non ! dit Jésus. Mais Jésus n’a pas non plus de réponse pour expliquer le mal. Ce n’est pas qu’il ne veuille pas en donner mais parce qu’il pourrait être sans voix aussi devant le mal et la souffrance. Jésus n’a pas la réponse à tout. Cela ne lui a pas empêché de croire et servir Dieu, son Père et d’aimer ses prochains. Fut-ce frustrant c’est ainsi ! L’homme en Jésus choisit de vivre devant Dieu et de se tourner vers l’homme malgré les souffrances.
Mais Jésus appelle à la conversion. Il est urgent de se convertir et de réfléchir sur le comment vivre ! Certes, il y a le jugement de Dieu mais « un an plus tard », voire la parabole de la vigne. Il est reporté. Maintenant le plus urgent c’est de se convertir, revenir vers Dieu et vivre avec Lui pour nous donner un avenir meilleur.
Se laisser accompagner de Dieu permet de vivre autrement, de porter de fruit de l’amour.
La réponse à la mort c’est l’appel à vivre en et avec Dieu.

« Pourquoi la mort ? » une question mortelle en soi.
« Comment vivre ? » une question vivifiante, dynamique et engageante.
Face à la mort annoncée, la vie est à recevoir de Dieu et à promouvoir avec Lui. Notre condition humaine, où le temps vécu débouche sur la mort est ainsi appelée à devenir une existence devant Dieu et avec Dieu : porteuse de Vie.
La souffrance reste injuste, et personne ne la mérite. Mais il est plus injuste de ne rien faire car c’est gâcher la vie et celle des autres ! Il arrive que l’homme ne soit pas responsable de ses malheurs ni Dieu non plus. Mais il est responsable avec Dieu de son « Maintenant » dans la souffrance pour lui et son monde. Où dois-je mettre ou tourner mon regard ? En quoi, pour qui dois-je dépenser mon énergie ? Devant qui aimerai-je vivre et avec qui ?

Amen