Textes : 2 Corinthiens 12, v. 1 à 10 Actes 1, v. 1 à 14 Ps 47Pasteur Christian BarbéryTélécharger le document au complet

Notes bibliques

2 Co 12.1-10 : Quelques traductions Nouvelle Bible Segond (NBS) : « Il faut faire le fier… certes c’est inutile, mais j’en viendrai aux visions et aux révélations du Seigneur. Je connais un homme dans le Christ… voici quatorze ans –était-ce dans son corps ? Je ne sais pas ; était-ce hors de son corps ? Je ne sais pas, Dieu le sait –un tel homme fut enlevé jusqu’au troisième ciel. Et je sais qu’un tel homme –était-ce dans son corps, était-ce hors de son corps, je ne sais pas, Dieu le sait- fut enlevé au paradis et qu’il entendit des paroles ineffables, qu’il n’est permis à aucun homme d’énoncer. Je serai fier d’un tel homme, mais de moi-même, je ne serai pas fier –sinon de mes faiblesses. Si je voulais faire le fier, je ne serais pas déraisonnable, car je dirais la vérité ; mais je m’en abstiens, de peur que quelqu’un ne m’estime au-dessus de ce qu’il voit ou entend de moi, à cause de l’excellence de ces révélations. Aussi, pour que je ne sois pas trop orgueilleux, il m’a été donné une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me frapper –pour que je ne sois pas trop orgueilleux. Trois fois, j’ai supplié le Seigneur de l’éloigner de moi, et il m’a dit : « ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » Je mettrai donc bien plus volontiers ma fierté dans mes faiblesses, pour que la puissance du Christ repose sur moi. Aussi, je me plais dans les faiblesses, les outrages, dans les désarrois, dans les persécutions et les angoisses, pour le Christ ; en effet, c’est quand je suis faible que je suis fort. Parole de Vie : Est-ce que je dois me vanter ? Cela ne sert à rien ! Pourtant, je vais parler de ce que le Seigneur m’a fait voir et m’a fait connaître. Je connais un disciple du Christ. Il y a quatorze ans, Dieu a enlevé cet homme jusqu’au plus haut des cieux. Est-ce que c’était avec son corps ? Je n’en sais rien. Est-ce que c’était sans son corps ? Je n’en sais rien, mais Dieu le sait. Je le sais, Dieu a enlevé cet homme jusqu’au paradis. Est-ce que c’était avec son corps ou sans son corps ? Je n’en sais rien mais Dieu le sait. Là, il a entendu des paroles qu’on ne peut pas dire avec des mots. Ces paroles, personne n’a le droit de les répéter. Pour celui-là, je me vanterai. Mais pour moi, je me vanterai seulement parce que je suis faible. Si je voulais me vanter, je ne serais pas fou, je dirais seulement la vérité, mais je ne le fais pas. Ainsi, on me jugera seulement envoyant ce que je fais et seulement en entendant ce que je dis, sans rien de plus. Ce que le Seigneur m’a fait connaître est extraordinaire. Alors pour éviter que je me vante de cela, j’ai reçu dans mon corps comme une blessure : un envoyé de Satan est chargé de me frapper pour m’éviter de me vanter. Trois fois, j’ai prié le Seigneur de me délivrer de cette souffrance. Mais le Seigneur m’a dit : « Mon amour te suffit. Ma puissance se montre vraiment quand tu es faible » Donc je me vanterai surtout parce que je suis faible. Alors, la puissance du Christ habitera en moi. C’est pourquoi les faiblesses, les insultes, les difficultés, les souffrances et les soucis que je connais pour le Christ, je les accepte avec joie. Oui, quand je suis faible, c’est à ce moment-là que je suis fort. Une traduction personnelle [Je ne propose cette traduction que pour développer quelques points de sens. Je déconseille de la lire lors du culte. Elle n’est pas adaptée à cet usage] Ah ! Il faut jouer les fiers ? C’est vain ! Mais j’en viendrai à des visions et à des révélations que j’ai eues du Seigneur. Je sais un homme, (Christ vit en lui…) voici quatorze ans. Si c’était dans son corps, si c’était hors de son corps ? Je n’en sais rien ! Dieu le sait. Il a été enlevé comme en un rapt jusqu’au troisième ciel. Je sais aussi que cet homme-là, (si c’était dans son corps, je ne sais pas, si c’était hors de son corps je ne sais pas, mais Dieu sait) a été enlevé comme dans un rapt vers le paradis. Là il a entendu des paroles sans parole, qu’il n’est pas permis à l’humain d’articuler. De celui-là, je jouerai les fiers. Mais de moi-même je ne joue pas les fiers, si ce n’est de mes fragilités. Oui, si je voulais jouer les fiers, je n’aurais pas perdu la tête : je dirai vrai ! Mais je m’en garde bien, de peur qu’on ne dise de moi plus que ce qu’on en voit ou en entend, avec l’exagération des révélations. Et c’est ainsi, pour que je ne sois placé au-dessus, qu’il m’a été donné un épieu fiché en chair. Un messager de Satan, pour qu’il me frappe, pour que je ne sois pas placé au-dessus. Trois fois, j’en appelé au Seigneur pour qu’il me l’ôte. Et Il m’a déclaré : « ma grâce te suffit. Oui, ma force a son achèvement dans la fragilité. » C’est donc bien plus volontiers que je mettrai mon honneur dans mes fragilités, c’est là que la puissance de Christ repose sur moi. De sorte qu’ainsi j’acquiesce avec désir aux fragilités, outrages, désarrois, persécutions, constrictions pour Christ. Oui, c’est quand je suis fragile que je suis fort. Quelques éléments d’exégèse Se vanter, jouer les fiers, mettre son orgueil dans… : le verbe grec signifie tout cela. Dans notre contexte il s’agit de savoir d’où on tire sa légitimité : de la performance religieuse et spirituelle (guérisons, dons des langues, etc.) qui induisent rivalité et surenchère entre les membres de l’Église de Corinthe, ou de la force-faiblesse de Dieu. Visions et révélations : événements spirituels, (événement, au sens où ça survient, où ça nous arrive) de l’ordre de la rencontre existentielle, du « choc du réel ». L’un se rapporte au voir, l’autre à l’entendre. Le mot révélation est celui qui a donné apocalypse. Dans son corps ou hors de son corps : c’est le genre d’expérience qui survient, qui surprend, qui requiert la conscience et le corps, mais qui semble les déborder. Dieu le sait : au fond, l’événement ne dépend pas de soi. On ne le contrôle pas, on n’en est pas maître. Quelque chose nous arrive. Des paroles sans paroles : à proprement parler quelque chose d’inouï. Qu’il n’est pas permis à l’humain d’articuler : Il ne s’agit pas d’un message, d’un contenu, de quelque chose qu’on peut faire entrer dans le langage. Il s’agit d’une expérience. Ce n’est que dans l’après-coup qu’on peut en parler, sans dire ce qui s’est passé, ce qui s’est dit. On peut juste dire que quelque chose s’est passé qui nous a bouleversés. Qui n’est pas une hallucination visuelle ou auditive, puisqu’on a conscience que « ça » nous a échappé, et puisque l’expérience ne nous coupe pas du monde mais au contraire nous y renvoie, tout en nous le faisant voir d’une façon nouvelle. « Ce qu’il n’est pas permis à l’humain d’articuler » n’est pas sans rappeler le nom de Dieu, impossible à prononcer : on ne peut Le faire entrer dans des concepts, dans un rôle, dans une image, dans un langage. Il est parole, mais Il échappe au langage. Enlevé [jusqu’à en être déchiré] : je traduis ainsi le verbe arpadzo qui va donner harpagon : il désigne un rapt. On ne signifie pas assez le caractère radical, brutal, de cette action de Dieu qui soustrait le sujet au monde. Au fond, c’est comme une action manu militari de la grâce : une soustraction à tout ce que l’on sait, à toutes les images du monde, de soi et de Dieu que l’on avait. C’est un rapt par la grâce, instant de total retournement. Je n’aurais pas perdu la tête ; je dirais vrai : ce qu’a vécu Paul ne relève pas de l’hallucination ni de l’auto suggestion : quelque chose lui est arrivé. C’est parfois difficile à entendre dans nos milieux réformés attachés (à juste titre) à la rationalité de la pensée. Il est pourtant arrivé à beaucoup d’entre nous d’être ému d’une façon inexplicable devant une œuvre d’art pourtant maintes fois contemplée, ou devant un paysage pourtant mille fois fréquenté. Ce jour-là, à cet instant-là, quelque chose s’est passé. Il y a eu un avant et un après. Sans qu’on sache pourquoi ni comment. De même il est arrivé à beaucoup d’entre nous d’avoir été dans une situation où l’on a eu la certitude d’être porté, parfois même habité ou transpercé par une parole dont on aurait été incapable par soi-même. On ne sait pas ce qui s’est passé. C’est impossible à dire. Mais c’est après qu’on peut attester une expérience. Mais je me garderai bien de m’en vanter : là n’est pas ma gloire, là n’est pas mon identité, là n’est pas mon autorité. Dans un contexte très polémique contre des Corinthiens fiers de leur foi, fiers de leur réussite spirituelle, qui mettent toute leur fierté dans leurs prouesses religieuses, Paul dit : « j’en ai largement autant à mon actif ! Mais ce n’est sûrement pas là-dessus que je fonde mon apostolat ! » Façon de dire : vous ne m’impressionnez pas, parce que vous vous trompez sur Christ ! Vous ne le cherchez que dans la gloire, pour en concevoir vous-même quelque gloriole. Alors que vous devriez savoir que vous ne le rencontrerez vraiment que dans la fragilité de l’humain. Fragilité : j’ai choisi de traduire ainsi le mot asthénia (qui va donner asthénie) qui signifie infirmité, faiblesse. Faiblesse à un côté péjoratif. Infirmité un côté discriminatoire. Fragile renvoie à l’éphémère contingence de l’humanité, à son côté faillible et précaire. De peur qu’on ne dise de moi plus que ce qu’on en entend : Je ne souhaite pas être écouté pour mes expériences spirituelles, mais pour ce que je dis. Ce n’est pas l’expérience personnelle qui fonde mon autorité, mais ma parole. L’exagération des révélations : le mot que j’ai traduit par exagération est uperbolè. Qui va donner hyperbole. Mot à mot « jeter au dessus » (à appareiller avec parabole, « jeter près de »). La parabole s’approche, la parabole éveille la parole de l’auditeur, appelle à la parole. L’hyperbole écrase l’auditeur. Paul emploie ce même mot en 1 Co12 : 31b ; les dons les plus grands, le chemin selon l’hyperbole. Dans les deux les traducteurs traduisent généralement dans un sens positif : excellence. Mais ils ne rendent pas le côté écrasant, le côté « exagération ». D’où la traduction proposée. Afin que je ne sois pas placé au dessus : je traduis ainsi pour mettre en évidence le préfixe uper du verbe. On a dans tout ce texte une inflation des « hyper » (2 fois comme préfixe du verbe dans ce verset, une autre fois en 8, encore à la fin en 10). Face aux « hyper-méga-géniaux » chrétiens de Corinthe, mus par un Dieu « super-hyper-méga-puissant », Paul oppose un Dieu qui loge au creux de la fragilité humaine. Un épieu : Plutôt qu’une écharde, le mot signifie plutôt un épieu ou un poteau sur lequel on empale le condamné. Un messager de Satan : on ne sait qui commandité ce messager. Mais on sait qu’il est satanique, à proprement parler, accusateur. C’est le lieu de la mauvaise conscience, le lieu du remord qui poursuit, le souvenir de la faute impardonnable. On a beaucoup parlé sur la nature de l’écharde. Peu importe ce qu’on peut en imaginer. Il s’agit d’un tourment qui menace la vie en l’accusant. Ce qui fait de cet épieu une expérience que bien des gens peuvent partager. Placé au dessus : là encore, uper J’en ai appelé : le verbe grec désigne l’avocat. Mot-à-mot : appeler près de. Appeler de l’assistance. Même racine que le mot paraclet. Ma force : le mot désigne la force. C’est ce qui va donner en français le mot « dynamique ». Il exprime la force et le mouvement. Je n’ai pas traduit par puissance qui renvoie trop à une potentialité, et pas assez à une effectivité. Dieu agit. Trouve son achèvement : la force de Dieu n’élit pas seulement domicile au creux de la fragilité. C’est en quelque sorte son terme, selon le verbe grec. Il ne s’agit pas tant de transformer la faiblesse en force, que d’inverser la logique : la faiblesse est la véritable force. La fragilité est le vrai moteur de la création. Bouleversant bouleversement. Non seulement Dieu se sert de nos faiblesses. Mais bien plus, ce sont nos failles, nos fragilités, notre éphémère qui constituent l’ultime horizon de notre humanité. Le but du salut n’est pas de les effacer, mais de les habiter. La foi, en laissant Christ habiter ces fragilités en fait le lieu de l’humanité véritable, le lieu du déploiement du Royaume de Dieu. [pour ma part, je prêcherai sur ce point. Mais je le trouve difficile à adapter dans le cadre d’une prédication destinée à des communautés et à des prédicateurs qui peuvent être très différents.] J’acquiesce avec désir : Je traduis ainsi ce verbe qui dans le nouveau testament est souvent trouvé par « je trouve ma satisfaction » ou « je trouve mon plaisir ». (Par exemple : « mon fils bien aimé, celui en qui j’ai mis mon bon plaisir ») Il y a quelque chose de l’ordre de la jouissance dans cette traduction, alors que le verbe grec a plutôt une nuance de désir. On entend ainsi, souvent, la phrase de Paul comme une revendication quasi masochiste, comme une culture de la mortification. Je crois qu’au contraire, c’est l’expression d’une fragilité habitée et rendue féconde. Rien à voir avec un appel morbide à jouir de la souffrance. Mais la reconnaissance, au cœur de la faiblesse d’une force transformatrice de soi et du monde. Ac 1 :1-14 Traductions : Bible Segond : Théophile, j’ai parlé, dans mon premier livre, de tout ce que Jésus a commencé de faire et d’enseigner dès le commencement jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel, après avoir donné ses ordres, par le Saint Esprit, aux apôtres qu’il avait choisis. Après qu’il eut souffert, il leur apparut vivant, et leur en donna plusieurs preuves, se montrant à eux pendant quarante jours, et parlant des choses qui concernent le royaume de Dieu. Comme il se trouvait avec eux, il leur recommanda de ne pas s’éloigner de Jérusalem, mais d’attendre ce que le Père avait promis, ce que je vous ai annoncé, leur dit-il; car Jean a baptisé d’eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés du Saint Esprit. Alors les apôtres réunis lui demandèrent: Seigneur, est-ce en ce temps que tu rétabliras le royaume d’Israël? Il leur répondit: Ce n’est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais vous recevrez une puissance, le Saint Esprit survenant sur vous, et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée, dans la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. Après avoir dit cela, il fut élevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux. Et comme ils avaient les regards fixés vers le ciel pendant qu’il s’en allait, voici, deux hommes vêtus de blanc leur apparurent, et dirent: Hommes Galiléens, pourquoi vous arrêtez-vous à regarder au ciel? Ce Jésus, qui a été enlevé au ciel du milieu de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu allant au ciel. Alors ils retournèrent à Jérusalem, de la montagne appelée des oliviers, qui est près de Jérusalem, à la distance d’un chemin de sabbat. Quand ils furent arrivés, ils montèrent dans la chambre haute où ils se tenaient d’ordinaire; c’étaient Pierre, Jean, Jacques, André, Philippe, Thomas, Barthélemy, Matthieu, Jacques, fils d’Alphée, Simon le Zélote, et Jude, fils de Jacques. Tous d’un commun accord persévéraient dans la prière, avec les femmes, et Marie, mère de Jésus, et avec les frères de Jésus. Chouraqi : Le premier discours, je l’ai fait, ô Theophilos, sur tout ce que Iéshoua‘ a commencé à faire et à enseigner, jusqu’au jour où, après avoir donné ses prescriptions par le souffle sacré aux envoyés qu’il a choisis, il a été enlevé. À eux, par de multiples preuves, il s’est présenté vivant, après avoir souffert; il leur est apparu pendant quarante jours, leur parlant du royaume d’Elohîms. En les rencontrant, il leur enjoint de ne pas partir de Ieroushalaîm, mais d’y attendre la promesse du père, « celle que vous avez entendue de moi: Iohanân a immergé dans l’eau; mais vous, vous serez immergés dans le souffle sacré, pas après de nombreux jours ». Alors quand ils sont réunis, ils le questionnent et lui disent: « Adôn, rétabliras-tu en ce temps-ci le royaume d’Israël ? » Il leur dit: « Ce n’est pas à vous de pénétrer les temps et les saisons que le père a placés sous sa propre autorité; mais vous recevrez un pouvoir du souffle sacré à sa venue sur vous. Vous serez mes témoins à Ieroushalaîm, dans tout Iehouda, à Shomrôn et jusqu’à l’extrémité de la terre. » Et après qu’il eut dit cela, tandis qu’ils le regardent, il est enlevé; puis un nuage le soustrait à leurs yeux. Tandis qu’ils fixent son départ vers le ciel, voici, deux hommes se tiennent devant eux en vêtements blancs. Ils disent aussi: « Hommes de Galil ! Pourquoi vous tenir à regarder le ciel ? Ce Iéshoua‘, celui qui vous a été enlevé au ciel, il viendra de la manière dont vous l’avez vu s’en aller au ciel. » Ils redescendent alors à Ieroushalaîm du mont appelé de l’Oliveraie, qui est proche de Ieroushalaîm, à route de shabat. Et quand ils entrent, ils montent à l’étage où attendent ensemble Petros et Iohanân, Ia‘acob et Andreas, Philippos et Toma, Bar Talmaï et Matyah, Ia‘acob bèn Halphaï, Shim‘ôn, un zélote, et Iehouda bèn Ia‘acob. Tous ceux-là persévèrent d’un même cœur dans la prière, avec les femmes et Miriâm, la mère de Iéshoua‘, et avec ses frères. Traduction personnelle : Théophile, mon premier propos je l’ai composé autour de tout ce que Jésus a commencé de faire et d’enseigner, jusqu’au jour où, après avoir fait ses recommandations aux apôtres, ceux qu’il a choisis par l’esprit saint, il fut enlevé en haut. C’est à eux qu’il se présenta vivant après le souffrir, dans de multiples preuves ; pendant quarante jours il se fit voir d’eux leur parlant du Royaume de Dieu. S’étant réuni avec eux, il leur fit savoir de ne pas quitter Jérusalem, mais « d’attendre la promesse du père, celle que vous avez entendue de moi » : Jean immergeait dans l’eau, mais dans l’esprit saint c’est que vous serez immergés, d’ici peu de jours. Ceux qui étaient réunis avec lui demandaient si c’est, seigneur, le temps où tu rétabliras le royaume d’Israël. Il leur dit : ce n’est pas à vous de connaître le temps ni le moment favorable que le père a fixés de sa propre autorité. Mais vous recevrez une force le saint esprit venant sur vous, et vous serez mes témoins en Jérusalem, dans toute la Judée et Samarie, et jusqu’aux confins de la terre. Et, ayant dit ces choses à eux qui regardaient, il fut enlevé. Un nuage le soustrait à leurs yeux. Et comme ils avaient les yeux fixés au ciel, à le voir partir, voici deux hommes, à se présenter devant eux, en habits blancs. Ils dirent : « hommes de Galilée, que restez-vous à regarder le ciel ? Ce Jésus, qui a été ravi au ciel devant vous, de même il viendra ainsi que vous l’avez vu partie pour le ciel. Alors, ils repartirent pour Jérusalem, depuis la montagne appelée « des oliviers », proche de Jérusalem, distance permise par le Sabbat. Quand ils entrèrent, ils montèrent dans la pièce du haut où ils étaient à attendre, Pierre et Jean, Jacques, André, Philippe et Thomas, Barthélémy, Matthieu, Jacques fils d’Alphée, Simon le zélote, et Judas, Fils de Jacques. Tous, assidus d’une même humeur à la prière, avec les femmes Marie mère de Jésus et les frères de celui-ci. Quelques éléments d’exégèse : Un auteur revendiqué, une suite au premier récit. C’est ainsi qu’on attribue le livres des Actes à Luc. Il s’agit de faire face à « l’après-Jésus » : comment la foi va prendre la place du voir, comment les témoins vont devenir la présence de l’absent, comment ils vont vivre de cette absence, grâce à l’esprit ? Le livre s’organise en plusieurs plans : la communauté de Jérusalem, rendue capable par l’Esprit saint de s’adresser à tous, idyllique en ses débuts, tueuse dans son enfermement. Puis l’organisation : diacre et apôtres, ordre bien vite mis à mal par l’Esprit saint (Ac 8). Le glissement progressif d’une « Église sous la loi » (à l’image de Pierre) à une Église « sous la grâce » par l’intermédiaire de Paul qui devient le héros du livre. L’Esprit saint a une forte présence dans ce récit : c’est que désormais, c’est sur Lui qu’il faudra compter pour se souvenir de façon vivante (pas à la manière d’un musée), pour comprendre, pour témoigner et pour croire. L’Esprit ne succède pas à Jésus : il l’avait déjà accompagné. En particulier dans le choix des apôtres. (D’où l’invocation à l’Esprit Saint lors des nos cultes de reconnaissance de ministères). Je l’ai composé […] ce que Jésus a fait : il s’agit dans les deux cas du même verbe « faire », dont la racine va donner en français poésie et poète. Le faire en question n’est pas seulement pratique ou réalisation d’une chose. Le faire relève d’un discours, d’une mise en parole, d’une mise en histoire, d’une création. Enlevé en haut : le verbe n’est pas le même que chez Paul. Le sens de la direction : vers le haut est marqué. L’idée de retrait est aussi présente. D’où enlevé en haut. Soustrait à leurs yeux : La parole, seule, demeure. À interpréter et à annoncer sous l’aide du St Esprit. Ce qui est à annoncer ne relève plus du visible, c’est libéré de l’image. C’est pourquoi il importe de ne pas re-présenter le donné biblique, pour ne pas le couler, l’immobiliser dans la re-présentation. Une métaphore qu’on illustre ou qu’on met en scène, cesse d’être une métaphore. Une parabole qu’on fait rentrer dans une re-présentation n’est plus une parabole, elle devient captive de l’image. Au fond, c’est quand il est soustrait à leurs yeux que Jésus leur apparaît vraiment. Comme quelqu’un d’impossible à saisir. (comme d’ailleurs, chaque être humain). La grâce, contrairement à une idée reçue, ne nous ajoute pas quelque chose, mais nous soustrait à toutes les images qui prétendent nous définir. Dieu est toujours « autre », insaisissable. Et nous donne d’être pour soi-même et pour les autres toujours « autre », impossible à enfermer sous les apparences, sous un savoir sur nous-mêmes. Le Dieu de la Bible ne comble pas le monde, Il l’évide. Il « troue » le monde des apparences d’une altérité toujours renouvelée. Il met le monde en quête, en élan. Il n’écrase pas le monde, mais l’allège. Il ne règle pas le monde, mais lui inspire sa créativité. Preuves : le mot est lâché. Pourtant les preuves n’ont convaincus qu’une poignée. Et maintenant, c’est sans preuve qu’il faut croire. D’ailleurs, on ne croit pas quand on a des preuves : on subit l’évidence. Il n’ay de confiance que là où il n’y a pas de preuves. Attendre : demeurer dans l’attente de la promesse, c’est rester vivant, c’est demeurer en quête. Pour peu que cette attente ne nous fige pas, qu’elle ne soit que de « pas beaucoup de jours » Sera-ce le temps de la restauration du Royaume d’Israël ? Les disciples sont toujours dans le malentendu. Ce n’est pas le Royaume d’Israël que Jésus est venu restaurer. C’est le Royaume de Dieu qu’il est venu rendre proche. La promesse faite à Israël, c’est « un Royaume qui n’est pas de ce monde », et qui pourtant vient dans ce monde. C’est le sens profond de l’ascension : Dieu s’approche en se retirant, pas en s’imposant. En ouvrant les frontières, pas en confinant le monde dans les certitudes, les preuves et les territoires balisés. C’est un temps qu’on n’a pas à connaître : C’est nécessairement le temps de la surprise. Le temps de l’imprévu. Le chronos (la date historique) nous échappe : nul ne peut prétendre que l’histoire en est arrivée à tel ou tel « stade » de l’avancée du Royaume. Le kairos nous échappe : le temps de la foi, le temps de la rencontre qui est le temps du Royaume dans ma vie, ne dépend pas de moi, de mes actions, de mes tentatives. Il est pur cadeau. Mais vous serez mes témoins… : le verbe est au futur. Ce qui désormais fera « preuve », ce qui attestera l’avancée du Royaume, c’est que vous serez mes témoins. On notera la ressemblance entre ce passage et ce qu’avait dit Dieu à Moïse : la preuve de ce que je te dis, c’est que « vous me rendrez un culte… » La révélation du Dieu libérateur passe par la reconnaissance envers le libérateur de la part des libérés. C’est les témoins qui désormais font la parole (pas à partir d’eux-mêmes, bien sûr, mais à partir de l’interprétation qu’ils feront de la Bible, à la lumière de la libération. Libération d’Égypte, mais plus généralement, libération de tout ce qui nous rend esclave, en particulier les images que nous avons de Dieu, de Jésus, du Christ, de la Bible, et aussi les images ou nous-mêmes et les autres nous enferment. Il viendra : Jamais le Nouveau Testament ne parle du retour de Jésus. Mais de sa venue. Aussi voilée, aussi « en creux », en soustraction que cette « apparition-disparition ». Distance permise par le sabbat : dans le périmètre qu’il est autorisé de parcourir un jour de sabbat. Cette référence et l’ancrage à Jérusalem ancre cette première communauté dans le prolongement direct de la loi juive. Le christianisme n’est pas une autre nouvelle religion. Il est enfant, il est contenu dans la foi juive. Il est une interprétation de la loi et de la foi juive. [On verra, ailleurs, même chez Paul qu’il ne s’agit pas disqualifier la loi, mais bien plutôt l’usage qui en est fait] À retenir:Judas est encore là… Il n’y a pas d’Église qui puisse se réclamer d’une quelconque pureté.J’ai choisi de vous proposer une prédication qui articule les deux textes du jour. On aurait pu retenir bien d’autres possibilités.

Prédication

Imaginez le raz de marée médiatique, si Jésus aujourd’hui paraissait au JT de 20h, montrant ses plaies et attestant par je ne sais quel preuve ADN qu’il est le Nazaréen ! Je vois le show d’ici, de Bercy à Las-Végas ! Balayés les doutes, balayées les incrédulités, d’une seule voix, d’un seul corps l’humanité défilant à la gloire de Jésus ! Le rêve de certains pasteurs… Le cauchemar de Dieu. Le cauchemar du monde. Quand on dit Dieu, on ne peut s’empêcher de rêver tyrannie de l’évidence. Quand on parle vérité, on ne peut s’empêcher de penser preuve. Quand on parle vie, on ne peut s’empêcher de penser mort. Mais Dieu a choisi une autre stratégie de communication : « c’est dans la faiblesse que se déploie ma force ». Il est temps de vivre de foi. Il est temps de vivre de foi et non plus de certitudes. Car la foi libère, là où les certitudes assignent à résidence et obligent au conformisme religieux. Il est temps de vivre de vivre de la trace, du sillon tracés par Jésus à la surface du monde. Il est temps de renoncer à la suprématie de la chrétienté, pour faire place à une fraternité nouvelle. Voilà, ce que nous dit le temps de l’ascension ! Jésus est parti. Dieu se retire du monde. Non qu’il en soit absent, non qu’il y soit indifférent, mais qu’il nous le confie. La promesse faite à Israël -une terre pour bénir toutes les nations- n’est pas caduque, mais elle est remise dans les mains de la foi. Autrefois, dans le monde des Hébreux, la foi s’estompait à chaque fois que les signes du ciel se faisaient plus rares, cependant que les pratiques religieuses n’en étaient que plus pressantes. Jusqu’à construire un temple, à ce Dieu qui n’en voulait guère. Mais qui veillait, jusqu’à mettre la foi même au cœur des religieux : merveilleuse invention de la foi juive, un trône, dans le Saint des Saints, mais un trône vide. Un trône pour un absent. Rien à voir ! Pas de lieu où accrocher sa superstition, juste la trace, la place d’un absent. Au cœur du conformisme religieux, la subversion du souffle, de l’Esprit qui fait vivre de foi, et non d’évidences. Au temps de Jésus, il en a été de même pour les disciples. Prompts à crier Alléluia à chaque miracle, mais beaucoup moins démonstratifs au pied de la croix… Au lendemain de Pâques, croyez-vous qu’ils avaient enfin compris que « c’est dans la faiblesse que se déploie ma force » ? Pas du tout ! Il leur faut « beaucoup de preuves » comme dit le livre des Actes. Un Dieu qui s’impose, sinon rien ! Or Jésus leur confirme qu’Il n’est que de passage. Qu’il est passé pour leur dire un Dieu de passage. Un Dieu de passage. Comprenez le au moins de deux façons : le Dieu qui passe, qui n’envahit pas le monde, qui se fait discret, qui se réjouit de l’autonomie du monde. Et puis un Dieu qui nous fait passer. De la chose au souffle, de l’avoir à l’être, de la religion à la foi, de la mort à la vie, de l’objet au sujet. Dieu de passage, Dieu de Pâques. Dieu qui nous confie la tâche de désigner la trace de son passage. C’est une bonne chose que le monde se sécularise, qu’il ne sorte plus le joker « Dieu » à chaque fois qu’il sèche, à chaque fois qu’il est confronté à ses fragilités. Enfin… ce serait une bonne chose ! Mais le monde passe toujours et encore son temps à s’inventer des idoles, des objets de croyance. Et il ploie le genou devant ces vérités qu’il s’impose à lui-même : la crainte écologique, la souveraineté de l’économique, la toute puissance technologique, l’obligation de performance… Le monde est plein de certitudes incontournables, qui nous sont présentées comme autant d’exigences dont on croit que de les satisfaire nous sauveraient. En voilà, des dieux qui s’imposent ! Qui en imposent ! Vous pouvez dormir gavés de somnifères, repus de certitudes : vos dieux ne sont pas près de passer ! Reste des trajets singuliers, la trace d’une parole ineffable. A fleur de vie, à fleur d’histoire, à fleur de monde. Petite parole qui n’avait aucune chance, qui ne s’appuie que sur du vent, qui a été mise à mort, ensevelie dans un tombeau qui n’a pu la retenir. Petite parole enfouie en terre qui te demande, à toi, d’être son fruit, d’être la trace de son passage. Le Royaume qui s’approche n’est décidément pas régi par les lois de ce monde. C’est dans le secret des fragilités humaines qu’il habite, c’est dans la vie menacée qu’il fait refleurir la vie. Le lieu de ce secret c’est le plus intime de notre intime, là où il s’agit d’entendre, dans son corps, mais comme venu d’ailleurs l’écho d’une promesse : je suis venu jusqu’à toi dans ta chair, pour que tu cesses d’avoir les yeux fixés au ciel, dans la crainte. Je te laisse désormais le champ libre. Va, vis et deviens toi-même. Va, vis et découvre mon visage dans ces humains, mes frères… Je ne retourne pas au ciel pour retrouver les attributs divins dont tu m’affublais, mais pour te faire vivre de mon passage. Pour te faire vivre de l’éphémère fragilité des humains habitée par la confiance. Pas besoin de s’appeler Paul et d’être ravi au paradis pour entendre cela. Il y a juste à ouvrir ses oreilles. Alors intelligence, force, courage, audace, s’ouvrent en nous ! L’écho d’un passage fait éclore les fleurs d’une fraternité nouvelle, au ras des pâquerettes, à hauteur d’horizon ! Amen !