Notes bibliques 

Marc 6, 1 à 6

Dans ce court passage nous retrouvons Jésus au moment où il termine, en quelque sorte, la deuxième étape de son ministère, étape qui nous le montre progressivement rejeté par les siens au pays de Galilée (3, 7 – 6, 6a). Ceci est en contraste avec la première phase de son action, au cours de laquelle son autorité avait été révélée dans cette même terre de Galilée (1, 16 – 3, 6).

L’avenir du ministère de Jésus, qui s’ouvre pour lui immédiatement, va le confronter à une incompréhension et un malentendu surprenants de la part de ses disciples proches (6, 6b – 8, 21). Puis viendront successivement : un temps important d’instruction par Jésus de ses disciples lors de leur montée ensemble vers Jérusalem (8, 22 – 10, 52), puis les quatre premiers jours de Jésus à Jérusalem (11, 1 – 13, 37), première partie d’une unique semaine dans la Ville Sainte qui se terminera par la mort de Jésus à Jérusalem et la découverte surprenante de son tombeau vide au matin du premier jour de la semaine suivante. (14, 1 – 16, 20)

 

Vers une rupture : 

Jésus est de retour au pays

Il nous est présenté comme un itinérant, qui régulièrement se rend à Capernaüm. Il y a, semble-t-il, longtemps qu’il n’est pas revenu à Nazareth, ville où il a grandi.

Nazareth est un petit village de Galilée qui n’a jamais été le théâtre de grands événements historiques. Sa mention est totalement absente de l’Ancien Testament. Les évangiles sont les premiers à en parler, comme ville propre de la famille de Jésus.

La littérature juive des premiers siècles de l’ère chrétienne, y compris l’historien Flavius Josèphe, ne la mentionne pas davantage. Eusèbe de Césarée, au IVe siècle, le déclare encore comme un pauvre petit village de Galilée. Nos sources écrites révèlent qu’une église y est construite au VIe siècle. Le village connaîtra aussi les misères des guerres perses et arabes; il sera totalement rasé en 1263 par le sultan égyptien Baybars, pour être ensuite laissé en ruines jusqu’au XVIIe siècle.

 

Le retour du charpentier !

Dans la plupart des villages de la Galilée existaient des artisans : charpentier, forgeron, teinturier, vannier, tanneur, cordonnier, etc. Ces corps de métiers échangeaient leurs services contre de l’huile, du grain, des légumes et autres produits de première nécessité. Le métier de charpentier faisait partie des plus respectés, et chaque village pouvait fournir du travail à au moins un charpentier.

La transmission du métier se faisait de père en fils, les parents veillaient toujours à ce que leurs enfants apprennent des métiers utiles. L’apprentissage débutait par l’observation des aînés, il commençait réellement vers treize ou quatorze ans. Jésus apprit probablement son métier auprès de Joseph.

Selon les données ethnologiques et archéologiques qui sont parvenues jusqu’à nous, le charpentier exerçait son métier devant sa maison, dans une rue au centre du village en compagnie d’autres artisans qui tenaient boutique. Les outils et les matériaux étaient rangés à l’intérieur de l’habitation dans une pièce servant de dépôt et d’atelier. La plupart du temps les outils se transmettaient de père en fils.

 

Le récit nous présente la famille de Jésus :

Il nous est présenté ici comme le fils de marie et non de Joseph( comme dans Luc ou fils du charpentier en Matthieu).nous apprenons au passage qu’il a des frères et sœurs .Les évangiles appellent ainsi Jacques, Joseph (nommé aussi Joses), Simon, et Jude, en mentionnant expressément qu’ils avaient aussi des sœurs. Mt 13,55-56; Mr 6,3.

Famille recomposée, demi-frères, cousins, beaucoup d’hypothèses ont été avancées sur le sujet. Si l’on s’en tient au récit lui-même Marc ne confond pas en grec le mot cousins et le mot frères ; tout semble indiquer qu’il est bien question de ses frères et sœurs.

 

Plusieurs remarques peuvent surgir au fil du texte :

Tout d’abord pour ceux qui l’écoutaient, Jésus a manifesté sa sagesse par son discours en paraboles. Pour ceux qui l’ont suivi, il s’est révélé par de grands miracles (cf. Marc 4 et 5). L’évangéliste avait déjà signalé une tension entre Jésus est sa famille  (cf. Marc 3,21. 31-35) Avec l’ultime visite à Nazareth, la rupture sera consommée. Elle est le constat d’un échec et d’une orientation irréversible dans son ministère.

 

L’enseignement de Jésus et les réactions

Le passage estime inutile de nommer ce pays peu accueillant. Jésus participe à l’assemblée du sabbat et y enseigne. Mais les réactions ne sont pas celles qu’il a rencontrées précédemment.

Les auditeurs sont choqués, étonnés, perplexes. Un prêcheur surgit de nulle part, ou plutôt trop connu par sa famille pour en être un, vient leur annoncer un message surprenant. Il n’a aucune qualification pour le faire. Son message interpelle pourtant mais ne suscite pas l’adhésion. Ici marc ne met pas cette capacité de persuasion en relation avec la divinité de Jésus. Ce qui pose problème aux auditeurs c’est qu’un non reconnu puisse oser parler de Dieu et en son nom ! Jésus comme les prophètes est rejeté.

En revanche, Marc souligne la présence des disciples. Bientôt Jésus les enverra eux-mêmes en mission (6,7-12). Il importe donc qu’ils voient à l’œuvre leur maître et modèle.

La réaction des auditeurs est une surprise émerveillée et sceptique. Et les questions qu’ils posent restent un peu les mêmes pour nous.

Les trois premières portent sur son enseignement, sa sagesse, ses miracles.  D’où cela lui vient-il ? On connaît sa famille, somme toute banale, qui lui a donné ces talents ? Cela vient-il de Dieu ? Ou d’une prétention humaine outrancière, voire d’une manipulation par Satan ?  cf. (Marc 3,22. 30; et 11,30). Les deux dernières questions portent sur l’origine de Jésus. On connaît sa mère, ses frères et ses sœurs. Si donc on connaît bien sa famille, comment pourrait-il être le Messie caché ?

 

Le manque de foi

Ce que Marc tient à souligner c’est que les auditeurs sont choqués, plus exactement, ils buttent sur ce qui leur semble peu crédible parce qu’ils ne sortent pas de leurs idées toutes faites. Un tel refus ne dessert pas l’identité de Jésus.  Au contraire, il replace celui-ci dans la lignée des vrais prophètes, tel Ézéchiel et surtout Jérémie (11,21et 12,6) haï par les gens d’Anatot, son village.

Mais le refus est profond. Car en énumérant le pays, la parenté et la maison, le texte évoque les relations sociales les plus étroites. Si Jésus n’accomplit aucun miracle, ce n’est pas par impuissance personnelle. Ni parce que Dieu ne veut pas agir mais en raison du manque de foi des auditeurs .les miracles de Jésus sont une réponse à la foi.

Comment ne pas se risquer à croire quand on a entendu ce que Jésus a déjà fait ? Et bien ici c’est non ils ne se risqueront pas !

Marc insère tout de même la mention de quelques guérisons, soulignant par-là la miséricorde de Jésus et préparant ainsi la mission prochaine des disciples qui guériront les malades (cf. Marc 6,13). D’ailleurs, nullement rebuté par le mépris; le Missionnaire du Règne de Dieu pourquoi son œuvre dans les villages d’alentour.

 

Alors qu’en penser ?

Tout semble tourner ici autour de la confiance. Peut-on faire confiance à toute personne qui parle de la part de Dieu, est-ce réservé aux spécialistes ? Faut-il gober les propos des illuminés et de ceux qui brandissent la menace divine ?

Peut-on accepter que quelqu’un d’imprévu ou d’improbable surgisse avec la parole de Dieu au bon moment ?

Quelle confiance particulière peut-on faire à jésus, a ses paroles et à Dieu ? Cette question est fondamentale pour nous chrétiens, elle détermine notre marche quotidienne dans la vie et la foi.


 

Prédication

Marc 6, 1 à 6

Nous voici en face d’un texte de l’Évangile où Jésus est directement mis en cause et contesté. Lorsque nous parlons de lui et que nous nous interrogeons sur son œuvre nous sommes parfois semblables à ceux qui le contestent dans le récit.  Qui est-il en vérité, que nous dit-il de Dieu ?

Savons-nous véritablement qui il est pour nous ou sommes-nous en chemin pour l’apprendre ?

Les auditeurs de Jésus ont eu beaucoup de mal à accepter qu’au travers de lui, un individu ordinaire, Dieu désire révéler sa volonté. Ils étaient troublés et il est vrai que nous-mêmes nous avons du mal à croire tout ce que nous entendons au sujet de Dieu. Ou a considérer véritablement qui est le Christ. Est-il un grand philosophe, un illuminé, un maître de sagesse ou le messie, le sauveur, le fils de Dieu ?

L’Évangéliste Marc relève que les nombreux auditeurs de Jésus étaient « frappés d’étonnement ». Et nous, Nous qui fréquentons Jésus depuis si longtemps, nous qui lui parlons, nous qui lisons et relisons son Évangile, sommes-nous encore « frappés » d’étonnement ?

Avons-nous un peu compris qui il est pour nous ? Avons-nous encore un cœur enthousiaste, et fasciné par le Seigneur, par ce qu’Il est, par ce qu’ il continue de nous révéler encore aujourd’hui, par ce qu’ Il continue de faire pour nous ?

C’est une question de confiance ! L’évangile est pour nous un miroir qui nous renvoie ce que nous sommes et ce que Dieu veut nous aider à devenir.

Notre foi est interrogée

À notre tour nous devons essayer de formuler ce que nous pensons de Dieu ? Comment l’imaginons-nous ? Le texte de l’évangile dit que ce qu’ils savaient de lui (ses origines familiales et son métier d’origine charpentier les empêchaient de voir qui il était véritablement ! soyons plus précis) : les empêchait de croire en lui !

Nous avons tous plus ou moins reçu accepté, discuté, reformulé les discours des théologiens et des églises sur Jésus mais lui faisons nous confiance ? Et au travers de lui quelle confiance avons-nous en Dieu ?

Sommes-nous attentifs au fait que Jésus incarne le visage de Dieu. Il tient un discours de proximité avec lui. Les habitants de Nazareth n’ont pas compris que le visage de Dieu se cache en lui comme il peut se cacher en celles et ceux que nous rencontrons 

Dieu est là tout proche d’eux mais ils ne le voient pas alors il ne se produit rien. Ils ne discernent pas les signes de sa présence. Ils n’ont pas encore compris que Dieu veut mêler sa puissance à la faiblesse humaine. Ils n’ont pas confiance ; ils n’ont pas la foi !

Il reste inconcevable pour beaucoup d’entre nous  que Dieu  se soit  fait si proche de la réalité humaine en Jésus Christ au point qu’il ait aboli toute  distance qui nous sépare de lui, et qu’il ne nous reproche pas nos fautes. 

Par son enseignement Jésus disait que désormais toute relation avec Dieu serait  possible, sans intermédiaire, ni contrainte.

C’est une question de confiance et non de dogmatique.

Faire confiance à Dieu !

Voilà donc la question

Faire confiance à Dieu c’est accepter que nous ne savons pas tout de lui mais qu’il est un ami fiable et qui ne fera pas défaut. Il vient nous aider à porter nos inquiétudes, nos soucis, il est l’ami qui entend la peine, qui comprend la détresse de la maladie, celui qui comprend nos déchirures et nos blessures. Il entend nos interrogations qui ne sont certainement pas celles des interlocuteurs de Jésus ici ; mais quelles excuses avançons-nous pour ne pas lui faire confiance ?

Il est vrai qu’en matière de croyances et de religions il y a de tout : le pire, le plus idiot comme le plus intelligent et compliqué sur le marché des idées.

Mais ici c’est à nous dans notre vie quotidienne que Dieu parle. Il nous invite à découvrir, derrière nos questions, ce qui se cache derrière ses paroles, ses actes relatés dans les évangiles. Ce qu’il souhaite c’est de nous éclairer, de venir à la rencontre de nos doutes, d’interroger nos convictions, notre manière de voir la vie et de nous aider à surmonter nos peurs ; c’est une question de confiance !

Croyons-nous véritablement qu’il peut le faire avec nous et en nous ?

Nous avons du mal à accepter que Dieu puisse faire sa demeure en nous, parmi nous. Nous avons du mal à croire à son regard bienveillant sur nos vies et sur nos erreurs ; pourtant c’est ce qu’il fait !

Plutôt que de regarder aux apparences trompeuses il nous invite à abandonner nos hésitations et incertitudes. A lui exprimer notre reconnaissance pour ce qu’il nous donne jour après jour, pour le souffle de son esprit qui nous anime, pour sa présence discrète mais réelle en notre monde. Lui faire confiance c’est nous ouvrir à l’espérance.

Il nous conduit à exprimer notre foi par notre prière, par nos engagements, par nos combats ; si nous plaçons en lui notre confiance, si nous avons foi en lui alors les graines semées ne se détruisent pas elles germent et portent du fruit.

A Nazareth ils ne voulurent pas croire alors il ne se produisit rien pas de signes sauf quelques cas isolés. Ce Jésus qui était allé à la rencontre de siens vient aussi vers nous. Il pourrait peut-être nous dire aussi que nous sommes des hommes et femmes de peu de foi !

Il est vrai que notre foi est souvent chancelante.

Et pourtant nous pouvons nous-mêmes devenir des acteurs du monde et non seulement des spectateurs .Il peut renouveler notre capacité d’étonnement. Nous ne pouvons pas tout expliquer mais Dieu demeure mystérieusement à l’œuvre là où nous ne l’attendons pas !

Puisse-t-il nous rendre la vivacité et la fraîcheur des enfants pour que nous sachions encore et toujours nous émerveiller de ce qu’il est et de ce  qu’il fait.

Que son Esprit nous guide, pour que là ou nous vivons et ou nous sommes envoyés  nous soyons capables de voir ce qu’il veut et ce qu’il fait

Comme les habitants de Nazareth nous sommes assez prêts à concéder que Dieu est le créateur que dans l’absolu il peut tout mais quand il parle de nous nous ne réalisons pas qu’il soit si près de nous. Que de fois est-il peut être passé sans qu’il puisse faire quoi que ce soit parce que nous n’avions pas assez confiance en lui.

C’est là le paradoxe Dieu est à nos yeux puisant et infiniment grand et nous le rejetons si loin que nous oublions qu’il est d’abord proche de nous. Nos erreurs, nos péchés nos fautes ne l’ont pas détourné des siens.

Alors comme Jésus revenant à Nazareth Dieu se souvient de nous, nous rends visite, rappelle sa parole en espérant que nous allons l’entendre et nous poser la véritable question set ne pas nous laisser illusionner par les apparences. Que de fois est-il venu, sans que pourtant nous ne le prenions au sérieux ?

Lorsque nous sommes assombris par ce qui nous préoccupe n’est-il pas celui qui vient introduire un peu de légèreté dans nos vies pour que nous trouvions l’envie de reprendre la route ? N’est-il pas celui qui nous aide à mettre un peu d’humour dans ce que nous croyons trop sérieux ?

Ne peut-il pas faire souffler le vent de la paix au lieu de la tempête qui déracine tout ?

Le souffle de sa présence ne peut-il pas balayer les soucis accablants ?

C’est une question de confiance !

Oui la bible nous le rappelle Dieu connait notre réalité et il l’accepte, il vient vers nous et nous permet de déceler sa mystérieuse présence en ce monde, en nous, avec nous, avec nos frères et sœurs, en son Église en notre monde, sur nos lieux de vies.

Voulons-nous lui faire confiance ou le laisser partir comme ce jour-là à Nazareth ?

 

À chacun d’y répondre pour lui-même.

Amen