Textes : Luc 16, v. 19 à 31 Psaume 126 Ésaïe 43, v. 16 à 21 Philippiens 3, v. 8 à 14 Jean 8, v. 1 à 11Pasteur Fabienne Ambs SzafarczykTélécharger le document au complet

Notes bibliquesQuelques remarques : Je vous invite à lire ce texte comme une parabole. Le but de cette parabole n’est pas de nous familiariser avec des détails de la vie à venir, mais de nous confronter avec le sens de cette vie-ci.Comme dans d’autres paraboles (Luc 16.19-31), la leçon vient à la fin : le refus de Jésus de donner un signe à une génération méchante : » S’ils n’écoutent ni Moïse ni les prophètes, ils ne se laisseront pas davantage convaincre par un mort revenant à la vie ! « (v. 31). Aucun signe, si évident soit-il, ne peut produire la foi chez ceux qui n’y sont pas disposés. La résurrection de Lazare n’a pas convaincu les chefs des Juifs ; au contraire, ils ont décidé de faire mourir Jésus et Lazare. La résurrection de Jésus ne les a pas convaincus davantage : ils ont cherché à étouffer l’affaire en donnant un pot-de-vin aux témoins de l’événement et en faisant taire les apôtres. Pour ceux qui désirent connaître et sont prêts à obéir, les Écritures sont suffisantes pour produire la foi.D’autre part, il faut se souvenir que les paraboles ne sont pas des allégories dont tous les détails ont une signification. La plupart des paraboles ont une leçon principale, les détails paraboliques font partie de l’histoire racontée, mais ne donnent pas un enseignement dogmatique.v.19 Que signifie : « vêtu de pourpre et de fin lin » ?L’habit de dessus, un vêtement de laine, était teint de pourpre. La substance colorante était extraite d’un coquillage : le murex. Comme il en fallait de grandes quantités, les habits de pourpre revenaient très cher, et seuls les riches pouvaient s’en payer Le vêtement de dessous était une tunique de byssus, un fin lin égyptien. C’est donc une manière de montrer la richesse de cet homme en opposition avec Lazare. V.20 Si l’homme riche n’a pas de nom le pauvre s’appelle Lazare. En effet Jésus nomme l’un des personnages : Lazare, ce qu’il ne fait dans aucune autre parabole. Ce nom peut très bien être un symbole. En effet, Lazare, de Eléasar, signifie : Dieu aide. C’est une allusion discrète à la conclusion de l’histoire. Le pauvre attend tout de l’aide de Dieu, le riche se confie en son argent. Lazare ne fut pas recueilli dans le sein d’Abraham parce qu’il était pauvre mais à cause de sa confiance en Dieu illustrée par son nom.V.22 Ce verset contient effectivement un certain nombre de traits caractéristiques du judaïsme de l’époque. « Le pauvre mourut » ; il est cité en premier. Est-ce parce qu’il mourut d’abord, des suites de ses blessures et du dépérissement dans lequel l’égoïsme du riche l’a laissé, ou pour respecter la structure hébraïque du chiasme qui veut qu’après la présentation « riche – pauvre », on inverse les deux membres : « pauvre – riche » ? Peu importe. Ce qui est à noter davantage, c’est l’absence de mention d’un enterrement pour le pauvre. Dans le contexte juif, ne pas recevoir de funérailles dignes – ou pas de funérailles du tout (1 Rois 14.13) était le déshonneur suprême. Mais la mort sans honneurs de Lazare, enterré peut-être à la sauvette dans une tombe collective des pauvres de la communauté, fut suivie d’honneurs célestes : emporté par les anges auprès d’Abraham. C’était l’expression traditionnelle du sort réservé aux Israélites fidèles : ils seraient avec le patriarche, auprès de lui. L’expression grecque reproduisant l’hébraïsme dit littéralement : « dans le sein d’Abraham ». Elle représente l’au-delà sous la forme d’un banquet où les convives sont à moitié couchés sur des sortes de divans. Celui qui est le plus près de son voisin touche sa poitrine avec sa tête lorsqu’il la penche en arrière (cf. Jean 13.23-25) ; être « dans le sein d’Abraham » signifiait donc se trouver tout près de lui.On lira aussi avec intérêt la prédication d’A. Maillot dans les paraboles de Jésus aujourd’hui, celle-ci en est directement inspirée.Proposition de prédication Lectures de Luc 16; versets 19 à 31 et de Amos 6; verset 1 à 7Quelle histoire, nous la connaissons tous presque par cœur, comment faire pour la recevoir nouvelle pour nous aujourd’hui !Pas comme une histoire qui concerne les autres, les riches bien sûr, ceux qui sont condamnés au malheur et les pauvres vengés. Pas non plus comme une histoire qui me donnent des détails sur l’au delà afin que dès aujourd’hui je puisse raconter ce qui s’y passe et faire naître la peur.Non cette histoire est une parabole que Jésus raconte aux pharisiens qui aimaient l’argent. Une parabole destinée à ceux qui aiment l’argent et d’une certaine manière nous en faisons tous partie dans notre société de consommation, ou pouvoir acheter semble être l’horizon de la vie proposée à nos contemporains, il suffit pour s’en rendre compte de regarder l’importance de la publicité.Bref cette parabole nous concerne tous, car elle rend attentive à l’importance du partage pour ne pas rester prisonnier de son propre monde et ne plus pouvoir en sortir, jamais.Il y avait donc un homme riche, et un pauvre Lazare.Un riche, nous dit le texte. Un, un homme du chiffre et de la fête. Nous avons tous des chiffres, ils permettent de nous reconnaître, mais jamais de nous connaître. Ainsi nous avons un n° de sécurité sociale, un de compte bancaire, un n° de carte de crédit, de code de porte peut-être de permis de conduire et que sais-je encore de téléphone… La liste est longue de tous ces chiffres qui nous repèrent mais paradoxalement nous font perdre notre identité si nous nous qualifions à travers eux, nous laissant enfermer dans ces chiffres qui qualifient l’avoir.Il y avait donc un homme riche, un homme de chiffres qui vivait de noces qu’il tenait chaque jour, c’était là tout son horizon, le but de son existence, il vivait pour lui-même, complaisamment installé dans ses biens, comptés, calculés avec une marge bénéficiaire et un pourcentage de rentabilité, bref, il pouvait faire la fête. C’était un homme anonyme qui a pourtant cinq frères tout comme lui semble-t-il.Et près de lui, un pauvre du nom de Lazare.Lazare ce qui signifie Dieu aide. Quel humour noir, s’appeler Dieu aide et vivre sa vie dans la misère et pourtant malgré la misère, la dépendance vis à vis des autres qui préfèrent ne pas s’en occuper, c’est bien lui cet homme là qui s’appelle Dieu aide ! Quelle aide a-t-il donc reçu de Dieu, on peut douter de son efficacité pour qu’il se retrouve dans cet état.Cela nous permet de découvrir que Dieu ne promet pas une vie sans souci, sans malheur aux siens, ils peuvent tout à fait y être plongés jusqu’à l’extrême comme cet homme Lazare, pourtant ce qu’il ne perd pas, c’est son nom, c’est à dire sa relation avec Dieu, ce nom de Dieu invoqué sur sa vie, dit dans sa vie malgré tout. C’est cette ouverture qui fait que cet homme quoique seul devant cette porte, ne cesse de chercher la relation à l’autre dont sa vie dépend.Voilà la vraie vie nous dit la Bible, celle qui trouve son achèvement dans le sein d’Abraham pour parler comme la parabole, c’est à dire dans la présence de Dieu, en relation vivante avec lui.Ainsi on pourrait dire que notre histoire, la vraie, notre nom c’est avec les autres qu’elle se vit, qu’elle se tisse. C’est par les autres que nous existons. Lazare est contraint par sa situation précaire de faire place aux autres, d’attendre quelque chose des autres.Et la Bible nous avertit, et cet avertissement nous concerne tous quelque soit l’état de notre compte en banque, cela n’est pas le problème tant que notre nom subsiste, qu’il est celui de notre vie en relation avec les autres, avec Dieu lui-même. Mais voilà ce nom, cette relation peut être anéantit par le poids de la richesse qui rend aveugle et sourd. Manifestement le riche ne s’était jamais rendu compte que Lazare gisait à sa porte, il ne l’a jamais considérer comme un homme avec lequel il pouvait entrer en relation, partager, le rencontrer. Il l’enjambait et ne le voyait pas et ainsi il est passé à côté de sa chance de retrouver son nom, une histoire.Ainsi ce n’est pas tant l’abondance de biens qui caractérise le riche, on ne connaît pas le montant de sa fortune, mais bien son refus de communication et de relation.Abraham, lui va répéter à l’adresse de ses 5 frères, ils ont déjà Moïse et les prophètes qu’ils les écoutent. Le miracle est inutile, ni l’extraordinaire, ni le retour d’un revenant ne peut faire advenir la foi qui est relation avec Dieu et du coup avec les autres, de la même manière la misère n’a pas le pouvoir de couper la relation entre Dieu et Lazare. Non le miracle ne peut convaincre, il est inutile dit cette parabole par la bouche d’Abraham, car vous avez déjà tout. Des hommes sont là pour vous entourer, les frères avaient Moïse et les prophètes, nous avons Jésus-Christ.À travers cette parole, cette certitude, se dit la bonne nouvelle, dans le sens où elle redit avec insistance aux frères, à nous, que tout est déjà donné, que Dieu est présent, qu’avec la Bible, sa parole faite chair en Jésus Dieu avait fait tout ce qu’il devait faire et dit tout ce qu’il pouvait dire pour notre salut. Rien de plus, rien d’autre ne sera jamais donné aux hommes que Jésus-Christ parole vivante de Dieu dont témoigne la parole écrite. Nous replaçant ainsi dans notre vocation d’homme et de croyant, être à l’écoute de notre prochain.Une dernière remarque à propos de cette histoire, assez curieusement c’est le partage ou le non partage qui vérifie l’impossible communication entre le riche et Lazare.Le riche n’a pas voulu partager ses festins, Lazare n’a pas pu partager son eau parce qu’il était trop tard, cela n’était plus possible. Le riche a oublié que Moïse et les prophètes existaient appelant au partage et par là même il a ignoré Lazare, refusant même de lui donner les miettes de son festin. Ce que le riche n’a pas compris, c’est qu’il fallait faire vite, car Dieu est présent maintenant et tout se joue aujourd’hui et non plus tard, et que Dieu avait justement choisi comme signe de sa présence ce partage du pain.Oui, les souffrances, la mort du Christ sont pour les croyants ce signe permanent d’une présence, d’un amour renouvelé de Dieu aux hommes. Et le partage du pain est signe de communication, de communion rétablie et de la présence de Dieu parmi nous. C’est justement ce que n’avait pas compris le riche, sans quoi il aurait donné des signes de partage et de reconnaissance et serait ainsi sorti de son anonymat pour recevoir ce nom: signe de vie!Amen